Accélération en descente

A l’occasion de précédents billets (comme ici), ce blog revient régulièrement sur les petits soucis et les gros problèmes financiers que l’état français tente de dissimuler, par des jeux de jambes plus ou moins habiles. Petit à petit, cependant, une constatation fait jour : les bourdes de l’état se font plus grosses, les appels à la vigilence ou les rapports de plus en plus alarmistes se font plus pressants.

Une des institutions en charge de, précisemment, dresser un état des lieux objectif de la situation est la Cour des Comptes. Vénérable institution pourtant totalement inféodée à l’état, elle tente vaille que vaille (mais pas coûte que coûte, sachons raison garder) de lui envoyer des messages cohérents qui vont tous dans le même sens : “iceberg droit devant”.

Il est cocasse de constater alors plusieurs choses :

  • les politiques, s’ils sont au courant de ce genre de rapports, ne réagissent pas ou ne montrent rien de leurs réactions internes. Villepin, la peau tannée par un bronzage intensif et une ingestion irraisonnée de carotène, l’oeil pétillant de malice du crétin qui s’ignore, préfère commenter lyriquement les “prouesses” footballistiques de l’équipe de France.
  • les média traditionnels, s’ils sont au courant de ce genre de rapports, prennent manifestement le parti de rester très discrets. Il ne faut en effet pas effaroucher le lecteur : en France, tout ne va pas si mal. Si la Cour des Comptes dit que l’évolution actuelle des finances publiques n’est pas soutenable, c’est, semble-t-il, une figure de style pour dire que l’état fait des petites bêtises pas bien grave et que, en moyenne, d’ici à la fin de l’année, tout ira bien, et le sourire reviendra, large et volontaire, sur la figure basanée du premier ministre en poste (dont le nom, à défaut du bronzage, aura peut-être changé d’ici là).
  • les institutions financières relaient, elles, ce genre d’information, et tous les jours montrent le sérieux qu’elles accordent aux remarques formulées : les grands groupes s’externalisent, se délocalisent ; les cervaux fuient discrêtement, les capitaux aussi.

Le décalage entre les différentes attitudes est alors criant : plus l’intérêt qu’on peut avoir dans un système presque routinier de la gabegie, des prébendes et avantages fumeux est important, plus l’envie d’autisme se fait forte. Plus on sent que le système pèse, plus il opère de contraintes nuisible à l’activité, plus on est tenté de le quitter ou de le corriger (parfois violemment), et les commissions, études et personnages qui effectuent des diagnostics réalistes fournissent alors autant d’arguments pour hâter le changement.

Pour le dernier rapport de la Cour des Comptes, l’ambiguïté du discours n’est plus de mise : “Compte tenu des niveaux actuels de déficit, d’endettement et de prélèvements obligatoires et de l’alourdissement déjà amorcé des charges de retraite, les tendances actuelles des finances publiques ne sont pas soutenables”. Voilà qui me semble clair : en langage courant, nous allons droit au mur.

Les autres phrases constitueraient presque de l’habillage si elles ne venaient, elles aussi, apporter de bien tristes constatations à la formule précédente quasi-lapidaire : “Cette évolution apparaît d’autant plus préoccupante qu’elle s’est opérée en période de baisse des taux d’intérêt et qu’elle est donc susceptible d’être aggravée par la remontée des taux qui s’est amorcée depuis la fin de l’été 2005”. Là encore, en langage courant, ceci revient simplement à dire que, la situation n’étant pas rose, compte tenu de la conjoncture, elle ne va qu’empirer.

Sans tenter l’exégèse complète du texte complet du rapport (qu’on pourra trouver ici) de la Cour et de la conférence de presse de Séguin, son président, on peut cependant noter les phrases suivantes : “les ventes d’actifs de l’Etat sont utilisées pour le camouflage des déficits”, “le gouvernement a recours à de telles mesures depuis des années” et “la richesse des administrations publiques ne cesse de diminuer”.

Ceci veut dire qu’un jour, désastre oblige, le bilan devra être fait ; à cette date, il y a fort à parier que plus aucune personne ne se souviendra exactement ni de ce rapport ni des précédents qui pointaient tous dans la même direction. A cette date, chacun d’entre nous pourra faire le deuil de la justice qui aurait conduit ces coupables en prison, pour abus répété et massif de biens publics. Ces coupables, pourtant, sont d’ores et déjà connus : ils occupent des postes importants, prétendant travailler pour l’état et les intérêts supérieurs de la nation. Ils ont été et sont encore ministres de l’économie, des finances, de l’industrie. Ils ont, régulièrement, signé en bas des budgets systématiquement en déficit depuis près de trente années.

Enfin, au delà même de la recherche de responsabilité et du constat que celle-ci n’aura jamais lieu, il est encore plus inquiétant de constater que, de plus en plus, certaines institutions tentent de prévenir la catastrophe, là où, il y a encore quelques années, personne n’osait mouffeter, soit par lâcheté, soit par intérêt, soit par ignorance.

Le mur du silence ne peut plus tenir.

Boursorama : un évolution des finances publiques “pas soutenable”

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Commentaires9

  1. Laurent

    Note tout de meme une des pistes proposees par Monsieur Seguin : remettre en cause les quelques allegements de charges sociales, d’une efficacite "douteuse", selon lui.

    En clair, pour reduire le deficit, faites un peu attention aux depenses, mais surtout n’oubliez pas d’augmenter les recettes la ou c’est possible!

    Quelle chevre!

  2. Laurent

    Sur le 1er lien : en fait Standard & Poor’s "specule" que les emprunts francais passeront en categorie "speculative" en 2020. Je speculerais bien avec eux…

    Sur le 2eme lien : comme le montre le rapport Pebereau, la dette ne represente pas 66% du PIB, mais environ le double, en tenant compte des retraite des fonctionnaires et d’autres montants non provisionnes. Le mur n’est plus si loin, et nous foncons a vitesse grand V.

  3. photon

    Le rapport Pebereau nous amene autour de 2000 milliards. Mais il faut ajouter divers montants. Un blog de l’Institut Turgot

    > chevallier.turgot.org/ <

    fait mention de bien plus et tout est tres detaille, minimun 2300 milliards, tout en notant que bien des "succes" en cours vont rejoindre ce compte!

    Donc le mur est deja bien attaque!

  4. Photon

    A propos du lien menant à l’étude de l’institut de l’entreprise, ses 37 mesures pour maîtriser la dépense publique. Intéressant, mais, proposer entre 45 et 52 milliards d’économie classées entre aisées et délicates à mener, ceci jusqu’en 2012, revient à vouloir pomper l’eau qui rentre à gros bouillons dans la cale du Titanic avec un dé à coudre! Soyons sérieux! Nous avons à traiter un problème qui se mesure en 2000 milliards et certainement plus près de 2500 quand nous serons passés partout! Proposer une pente négative dans ce négatf, donc positive de 50 par tranche de 6 ans, alors que tous les ans le négatif se creuse à double dynamique puisqu’on emprunte pour rembourser d’autres dettes, proposer cela revient à un rapport alibi, sous influence étatiste (on fait, mais pas trop, pour ne pas géner nos amis étatistes qui ont leurs mangeoires dans le machin truqué; ensuite on dit qu’on a fait, c’est la réforme statique…)! Preuve et dentiquement, réduire le nombre de fonctionnaires de 17000 cette année, alors que l’Etat a créé 400000 emplois de fonctionnaires en vingt ans, et dans la même période de 450000 territoriaux, revient à une joyeuse plaisanterie! France pays des fonctionnaires. Clémenceau avait dit: "La France est une terre fertile, on y plante des fonctionnaires il y pousse des impôts". Il y a bien longtemps que ce pays dérive!

  5. chris

    Ne sous-estimez pas les pouvoirs du Léviathan…

    Grosso modo, et vous m’excuserez pour la forme triviale, tout a commencé à partir en sucette sous Giscard, suite au 1er choc pétrolier.

    En gros. Donc ça fait 30 ans que ça dure.
    😉

    Ce qui me fascine, c’est la résilience, la formidable capacité à faire durer la chute…

    Car les déficits, le "chômage", la gabegie etc. rien de tout cela n’est nouveau.

    Il y a en revanche une chose que l’on peut espérer : c’est que cette fois, on n’aura pas "une" crise, mais "la" crise qui mettra à bas tout ce système pourri.

    Ceux qui pensent que l’ont peut encore "corriger" la situation, remettre l’Etat sur les rails (et si possible dans la bonne direction), en clair "réformer" les choses, constituent le dernier carré des naïfs que 30 ans d’histoire n’ont pas suffi à réduire.

    Pour le moment.

  6. photon

    @ Chris. En effet depuis trente ans, mais sous Giscard cela etait facteur exogene et phenomene emergent! Il faut dire que le niveau de vie des francais fut alors le plus haut (sous Barre). Apres, Chirac dans sa guerre anti Giscard, a amene Mitterand en esperant prendre la suite, l’histoire nous dit ce que cela a coute! Quatorze ans de "conneries" grandes et petites, montee des copains, chasse aux sorcieres, chasse aux entreprises (PME technologiques independantes et exportatrices) pour renflouer les dinosaures tenus par les copains etatistes (Thomson brille en cet exercice, a propos c’est bien l’origine des Fregates taiwanaises et Clearstream; Credit Lyonnais, suicide d’un Premier ministre et d’un proche du President a l’Elysee… Affaire Pelat, Triangle, Financement des partis, Urba Graco, travaux pharaonesques pour briller)… Enfin on en est arrive aux desastres actuels (dont les erreurs strategiques de Airbus, eads diriges par un ami du President, les autres s’annoncent…). Si les socio-marxo-verts sont coupables, Chirac et ses Bonapartistes le sont autant! Le pire avec Chirac c’est qu’il a trahi tout le monde! Bref a force de mettre des nuls aux affaires on recolte les pepins!

    Reformer n’est plus possible!

    Reformer suppose un redressement encore possible. Ce n’est plus le cas, l’entreprise france s’endette pour payer ses dettes!!!

    Pire, en parallele, la machine a faire des dettes s’emballe. N’oubliez pas que les "couts d’agence" de l’entreprise france sont enormes, ce sont 400000 politiques qui se partagent la gestion en 36000 communes, "n" communautes de communes, 3500 cantons, 100 departements, 22 regions, 1 Etat double (le regalien et l’etat deux sans drapeau qui emploie bien du monde en moult organismes bidon, doublons divers et autres organismes de coordination de la complexite voulue pour occuper tout ce petit monde abrite des affres du marche), et enfin le machin europeen qui fait des reglements sur la courbure des bananes! Si en vingt ans ce sont 850000 personnes de plus qui emargent dans les machins etatiques et territoriaux, il faut egalement dire l’impact sur l’economie qui s’est ainsi amollie aux marches publics et a leurs bidonnages!

    Le mal est excessivement grave car les hommes ne savent plus agir! Les couts imposes les etouffent! La culture "gnan gnan" les intoxique! Les media "adoubes" les enfument!

    Ere "d’inspiration sovietisante" juste avant la chute du mur de Berlin! Faites attention a ce que "apres" les nomenklaturistes ne prennet les meilleures parts des depouilles de tous ces machins! Puis ensuite on arriverait a une reprise en main musclee! Ce pays est coutumier de tels phenomene, apres une revolution, la terreur, puis un dictat, 50 ans pour arriver a Sedan, vous savez la suite et apres 1918 un francs qui plongea definitivement par rapport aux autres monnaies. Un De Gaulle qui fit un systeme a sa stature et son honnetete, sans penser a ceux, qui derriere, pourraient ne pas partager son gout pour une droiture responsable, oubliant de mettre des contre-pouvoirs, amenant et les derives Mitterandesques, et celles Chiradsoc-esques… Le coup est bien parti de tres loin! Cependant ces vingt dernieres annees le systeme s’accelera, sous l’impulsion de deux brillants phenomenes qui nous gouvernent depuis 26 ans (en 2007).

    Ce pays est tres mal parti. Je pense qu’il y a un mal francais. D’ailleurs le livre de Peyrefitte, "Le mal francais" n’a pas pris une ride, a le relire vous verrez que le constat pose en 1975 (a noter nous parlons des trente dernieres annees) est topujours d’actualite et meme que des blocages et derives se sont amplifies, ceci malgre un livre fait par un Ancien Ministre. Bref cela est revelateur de l’aveuglement, du jusqu’au boutisme et du cynisme de nos grand mandarins etatistes de la bureaucraztie francaise dont est issue 80% de la politique francaise! Car il y a conflit d’interet.

    Nous touchons la au cote corrompu, bananier. Bref j’arrete la! En fait vous savez, mais peut etre pas l’ampleur, la profondeur et l’interpenetration des divers maux. Si vous avez un projet? Partez! Le redressement demandera, si jamais, des annees, comptez en dizaines d’annees; je precise que le monde avance, et a forte allure! Si vous voulez vivre abrite? Restez. Clemenceau avait vu juste (voir commentaire plus haut) et ce n’est pas jeune!

  7. photon

    Un texte descriptif des fondamentaux qui expliquent la divergence entre les societes commercantes et celles agraires. Sorry it’s in English. But it’s the root of the french pb!

    Prior to the miracle of Civil Society, human societies habitually lived under coercive and superstitious systems, and generally took such a condition for granted. They were right to do so. There was no alternative. Within such societies, the maintenance of the social order was normally quite properly accorded far more importance than any possible augmentation of the cognitive capital or of productive potential, if indeed those things were valued at all, or held to be attainable or even conceivable. All this was reflected in the values pervading agrarian societies; these values led to a reverence of martial and hieratic skills, a Rule of the Red and the Black. They did not lead to any great respect or encouragement of productive capacity or of intellectual innovation. The specialist was often the object of contempt or fear or both. This, once again, is the normal social condition of mankind. It is foolish to expect anything else.

    Then, on one occasion, something strange and unusual happened. Certain societies, whose internal organization and ethos shifted away from predation and credulity to production and a measure of intellectual liberty and genuine exploration of nature, became richer and, strangely enough, even more effective militarily than the societies based on and practicing the old martial values. Nations of shopkeepers, such as the Dutch and the English, organized in relatively liberal polities, repeatedly beat nations within which martial and ostentatious aristocracies, addicted to the values of aggression and conspicuous display, dominated and set the tone.

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