Le rateau de Dubaï

Si reprise il y a, elle est chaotique. On dirait même, comme ça, de suffisamment loin pour ne pas entendre les piaillements de pom-pom girls extatique de la Ministre de l’Economie, que cette reprise est chimérique. Le nombre de chômeurs continue d’augmenter, et nous abordons maintenant les pentes escarpées de records jamais atteints en matière de (non)emploi en France. Et tout ça parce que certains scheiks n’étaient pas provisionnés…

En effet, la ruade boursière subie en cette fin de mois de novembre doit beaucoup à la demande de moratoire d’au moins six mois sur sa dette de la part de Dubaï World, principale société de l’état de Dubaï en charge, essentiellement, d’immobilier, et qui doit faire face à des remboursement de plusieurs milliards d’euros (39… Oui oui, 39).

Remboursements qui sont donc maintenant en suspend et qui mettent leurs créanciers dans une bien fâcheuse position. A la suite de quoi, la notation de plusieurs entreprises phares de Dubaï a pris une claque.  Or, comme ces entreprises sont partiellement ou totalement étatiques, c’est bien la notation d’un état qui, en réalité, a été dégradée ; et en pratique, cela veut dire que l’Etat et ces entreprises vont maintenant avoir beaucoup plus de mal à emprunter, et à fonctionner.

On pourra d’ailleurs lire avec bénéfice l’intéressant billet de Vincent Bénard qui aborde le Skyscraper Index et qui montre que les gratte-ciels géants peuvent servir de marqueurs, lorsqu’ils sortent du sol comme des champignons, d’une bulle monétaire en phase d’explosion…

La dégradation de ces entreprises illustre parfaitement la situation que ce blog expose depuis quelques années déjà : celle de l’état français dont les finances ne laissent en rien augurer un retour à l’équilibre ou même une meilleure gestion dans les mois ou années qui viennent.

La question n’est encore, bien évidemment, pas au menu des principaux médias mainstream qui se contentent de commenter, un peu en roue libre, sur les déboires de Dubaï, de l’immobilier et, dans une certaine mesure, sur la finance islamique, à la mode actuellement. Il faut aller sur les blogs, comme sur celui de l’Insolent ou de Toréador, pour voir poindre une réflexion sur l’endettement français ou européen en général et les ennuis qui nous pendent au nez.

Et maintenant ?

A présent que des signes extérieurs de richesse faiblesse se font jour dans des endroits qui, il n’y a pas si longtemps, étaient considérés comme sûrs, on doit réellement s’interroger sur toutes les autres places qui ont été présentées comme en plein essor.

Ici, évidemment, j’évoque les fameux pays émergents dont, on le rappelle, la croissance quasi-explosive doit absolument perdurer pour prendre le relai des pays développés qui, actuellement, tentent de relancer leurs marchés par des injections keynésiennes massives, avec l’effet absolument … nul qu’on observe.

Et on aurait raison de s’interroger : la Chine, par exemple, ne semble pas mieux en point que Dubaï.

Régulièrement, tant dans les commentaires de ce blog que sur d’autres blogs, on peut lire le navrant couplet des dépensiers qui disent, en substance, que la dette, c’est du bon, fumez-en, que l’état peut et doit donc relancer en endettant les prochaines générations, que le paiement, en tout état de cause, pourra attendre voire être, purement et simplement, oublié sans souci, et que tout ceci se résoudra de lui-même, avec plus ou moins de bonheur, moyennant quelques petites respirations rapides, resserrements de sphincters et exhortations volontaires à ne pas faire de catastrophisme.

Mais voilà : catastrophisme ou pas, actuellement, les Dubaïotes ne sont pas joyce ; certains diront qu’en face de leurs dettes, ils n’ont que du sable et des yeux pour pleurer, et ce n’est pas le cas en France. Sauf que Dubaï n’est pas aussi endetté que la France, en proportion et en volume, et que le patrimoine français est déjà totalement hypothéqué. De surcroît, on n’a pas de pétrole, et on n’a plus d’idées depuis bien longtemps.

Autrement dit : ce qui leur arrive va nous arriver aussi, et avec la force correspondante à la puissance de notre état. Les Émirats Arabes Unis, calculant que laisser tomber Dubaï signait leur propre arrêt de mort, feront autant que possible ce qu’il faut pour arrondir les angles d’une situation pénible. Lorsque ce sera le tour de la France, qui, exactement, pourra venir à son secours ?

L’Allemagne ?

Oooh, on me dira que la probabilité est faible d’une telle échéance elle-même lointaine : l’exposition de l’économie européenne à la déconfiture dubaïote est très très faible, voyons. Ce sont les banques qui le disent elles-mêmes (et elles sont fiables, hein, on peut leur faire confiance).

Et puis, ces mêmes banques ont affiché récemment d’insolents bénéfices. C’est donc qu’elles sont en bonne santé !

On peut alors s’étonner qu’aux US, ces institutions continuent de péricliter. Pourtant, c’est la reprise, que diable ! Et comme en plus, tout ce beau monde a l’assurance d’avoir le soutien de l’état, il ne devrait pas y avoir de crise de crédit, par exemple.

Ah. Zut, il y a bel et bien crise de crédit.

Et comme en plus, les normes comptables, assez sympathiques pour les banques jusqu’à présent, vont changer début 2010, les obligeant à recapitaliser massivement, on peut s’attendre à ce que ce problème persiste : l’argent disponible n’est pas infini, et ceux qui en ont (qu’ils soient des moutontribuables ou des entreprises) sont déjà lourdement mis à contribution pour financer les relances épileptiques d’états de plus en plus dispendieux.

L’avenir n’est pas rose : la relance keynésienne, comme prévu, ne fonctionne pas. Elle a repoussé toute résolution réelle de la crise – qui passe de toute façon par le remboursement des dettes et une déflation – en l’aggravant au passage par différents leviers, les bulles monétaire, immobilière et maintenant écologique étant une illustration de ce que ça peut donner lorsque la locomotive échappe aux piètres machinistes qui brûlent notre argent à toute vapeur…

Devant ces constats, la seule question qui vaille en fait est : combien de temps ce système basé sur l’endettement irréfléchi va-t-il encore tenir ?

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Commentaires21

  1. Mr T.

    Votre analyse est juste, c’est typiquement l’analyse autrichienne des cycles économiques, seule qui a prévu à l’avance avec un tel niveau de cohérence la période que nous vivons.

    D’ailleurs si vous m’autorisez à faire un peu de pub, je lis quotidiennement les chroniques financières de l’excellent dailyreckoning.com (particulièrement les articles de Bill Bonner) qui écrit très exactement autour des mêmes thèses. Je recommande à tous ceux qui ne sont pas rebuté par la lecture en anglais.

    Bon billet en tout cas !

  2. Evan

    Mince, j’attendais un billet sur la Suisse. ‘Sont ingrats ces commentateurs tout de même… Mais je m’incline devant la nette supériorité du problème de l’endettement.

    Bien sûr, la relance keynésienne ne produit pas d’effets positifs, ou alors ils sont drôlement bien cachés jusqu’ici. Seulement, il y a d’un côté ceux qui en sont conscients et n’ont pas besoin d’être convaincus, et de l’autre ceux qui sont persuadés que toute autre option économique serait faire le lit de l’ultranéolibéralisme extrémiste qui plongera le monde dans un chaos sans précédent.

    Mais pour répondre à votre question en conclusion, je serais bien tenté de penser que ça pourrait commencer en 2010-2011, si l’ACOSS, pas sauvée d’ici là par on ne sait quel tour de passe-passe économique, se retrouve effectivement en cessation de paiement. C’est un peu facile, mais ça fait une bonne échéance à court terme qui concernerait pas mal de monde.

  3. Mr T.

    Hervé : c’est une question stupide, vous êtes sur un blog de libéraux… il n’existe pas de remède miracle à une dépression causée par un boom alimenté par l’intervention de l’état tout azimuts ; une correction est inévitable, et elle est d’autant plus longue que les gouvernements s’efforce de l’empêcher.

    La déflation doit faire son oeuvre, les mauvaises dettes et les mauvais investissements doivent être purgés. Les capitaux engagés dans des projets ne correspondant à aucune demande et pour lesquels les ressources sont insuffisantes doivent être employés d’une autre manière. Il est urgent que l’état reconnaisse la nocivité de son action là ou elle est la plus flagrante et crée les plus importantes distorsions dans l’économie, je pense évidemment au secteur financier.

    Afin d’éviter des crises à répétition, il convient de reprendre aux Etats le contrôle de la monnaie qu’ils se sont approprié il y a un siècle. Retour à un système monétaire non-étatique donc (avec l’or à la clé?), ce qui signifie aussi la fin des banques centrales. A terme doivent également apparaître de nouvelles institutions politiques qui respectent les bases libérales du droit et limitent sérieusement les tentations despotiques de nos démocraties et le domaine d’intervention de l’Etat.

    Voilà, résumé en gros… vous remarquerez que ça ne dit pas grand chose de plus que ce qui est mentionné régulièrement dans les billets de ce blog.

  4. Hervé

    “””””etour à un système monétaire non-étatique donc (avec l’or à la clé?), ce qui signifie aussi la fin des banques centrales.””

    Bah tiens ! Et comme cela on recréera la crise puissance 10

  5. Mr T.

    Non seulement faire des citations correctement mises en page semble au delà de vos capacités mais vous m’avez l’air d’être un sacré rigolo pour rendre responsable de la crise un système monétaire libéral qui n’existe nulle part – c’est même tout le contraire qui est en vogue.

    Mais bon je sens que vous êtes une cause perdue, ça ne vous fait sans doute rien de savoir qu’à l’origine la monnaie n’est pas le fait de l’Etat, que chaque fois que celui-ci s’en est mêlé un foutoir impossible s’en est suivi, qu’il ne s’en est jamais occupé qu’au siècle dernier, et que – oh surprise ! – jamais auparavant le monde n’avait connu autant de crises économiques d’une telle ampleur sur un si bref horizon.

    Aller, retournez donc à vos passionnantes lectures subventionnées qui vous lavent le cerveau.

  6. adnstep

    “certains scheiks n’étaient pas provisionnés…”. Ohhh, trop facile, h16.

    “Devant ces constats, la seule question qui vaille en fait est : combien de temps ce système basé sur l’endettement irréfléchi va-t-il encore tenir ?” : chut, tant que personne ne s’en rend compte, faisons comme si ça n’existait pas.

  7. Abst

    Et quand tout le monde s’en rendra compte parce que ce sera trop tard, sur qui est-ce que ça va retomber ?

    Sur les méchants ultra-libéraux mangeurs d’enfants, ‘kipenskoprofi’ et qui exploitent le peuple…

    Et hop ! C’est reparti pour un tour.

  8. alex6

    Herve, recreer la crise puissance 10 c’est ce a quoi s’attachent les etats en ce moment meme.
    Les rigolos dans votre genre n’auront que ce qu’ils meritent quand la claque deflationiste arrivera pour de bon.

  9. Toréador

    “et que le patrimoine français est déjà totalement hypothéqué.”

    Tu veux parler de quoi ? Si c’est de la Dette publique, le ratio à 80% ne fait pas référence au patrimoine. Si c’est la dette privée des ménages, c’est faux ?!

    1. @Toréador : le raccourci est un peu rapide, mais voilà l’idée derrière : si l’Etat français devait vendre les bijoux de famille pour rembourser tout ou partie de la dette, l’ensemble de son patrimoine serait vendu et la dette ne serait pas recouverte intégralement. Un Louvre entier ne vaut pas 1200 milliards d’€ … Or, si, pour une raison ou pour une autre, les créanciers ne font plus confiance à l’état ( = ne lui prêtent plus), il ne restera que deux options : faire défaut sur sa dette, et là, c’est la catastrophe, ou vendre tout ce qu’on peut pour continuer à rembourser, et ça ne suffira pas.

  10. maurice b.

    > Mort de rire!

    C’est tout à fait normal N.Sarkozy n’a jamais été élu pour mener une quelconque politique d’austérité.
    Je crois que vous vous trompez lourdement sur ses intentions.

    Ah oui, c’est bien vrai, ça, môssieu momo : non seulement, le Sarko, il ne fait pas dans l’austère, mais en plus, il fait même dans le 150 milliards de déficit ! Champagne à tous les étages, putes & caviar pour tous, yahoo ! Quant à ses intentions, on a pu mesurer exactement la distance entre ce qu’il racontait (beaucoup, beaucoup) et ce qu’il faisait (rien).

  11. Hervé

    Qu’est ce qui ne faut pas tout entendre comme mensonges de la part des “libéraux” extrémistes, le Président il y a peu rappelé son engagement et sa volonté de faire changer les choses:

    J’adore cette expression de “libéral extrémiste”. Ridicule et déjà sépia avant d’avoir été usée.

    “En aucun cas, je ne prendrai le chemin des augmentations d’impôt. Je veux juguler les délocalisations, améliorer la compétitivité de l’économie française, alléger le poids de la fiscalité qui pèse sur le travail”, a-t-il assuré, ajoutant : “Je conseille aux collectivités territoriales d’adopter la même stratégie.”

    Mais oui dugenou qu’on te dit : les impôts, ils n’augmenteront pas ! Tu verras, ton pouvoir d’achat, tu vas pouvoir te le passer en bandoulière pour aller chasser en forêt, mais à part ça, non non, les impôts n’augmenteront pas. Et puis ensuite, les taxes et amendes, c’est pour rire. Tu payes pour de vrai, mais ce ne sont pas de vrais impôts, hein. Et puis pour les collectivités locales, hein, respirez un grand coup, voilà la pipette de vaseline, zwip zwip, de rien vous allez en avoir besoin… Le tout va se traduire par 4 millions de chômeurs, à plus ou moins long terme. Tu as un job, Hervé ? Mets de l’argent de côté. Plein. Ca te servira une fois au chômage.

    Pendant que vous faites mu-muse derrière votre clavier, nous nous réformons la France 😉

    C’est ça, réformez. Ou gonflez des petits ballons colorés, peignez des girafes, dansez autour d’un totem, ça peut aider.

  12. Hervé

    “J’adore cette expression de « libéral extrémiste ». Ridicule et déjà sépia avant d’avoir été usée.”

    Comme je l’ai dit, l’UMP comporte bon nombre de libéraux comme Novelli et Mariton. Ne vous en déplaises, certes ils ne sont pas dans le trips de l’anarchisme ultra capitaliste puisque eux sont des libéraux !

    Oui oui, à l’UMP, il y a les bons libéraux et les mauvais. Les bons à l’UMP, ils voient un règlement à pondre, et hop, ils tirent. Les mauvais, à l’UMP, ils voient un règlement à pondre aussi, et hop, ils tirent aussi. Mais c’est pas pareil. C’est les mauvais.

    Mais oui dugenou qu’on te dit : les impôts, ils n’augmenteront pas !

    Et ils n’augmenteront pas, puisqu’il s’agit d’une promesse de notre parti, qui est d’autant plus nécessaire au vu de notre fiscalité excessive crée par la gauche. L’UMP a d’ailleurs supprimés bon nombre de taxes et instaurer un maximum fiscal avec le bouclier fiscal, vous devriez vous en réjouir.

    Dans la famille “Naïf”, je voudrais Hervé. Ah, bonne pioche à ce que je vois. Avec momo, j’ai la famille complète, youpi 🙂

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