Aubry : la transparence, oui, mais pour les autres…

Chuuuuut. Tout va bien, ne faites pas de bruit : la République Bananière du Bisounoursland est sagement endormie et le pays continue son chemin sur les rails ouatés d’une douceur calculée qui l’amènera, tranquillement, jusqu’en 2012, seul horizon visible de la politique française. Et pendant que l’INSEE n’arrive plus à payer ses factures (pas d’inquiétude, tout va bien, chuuuut), on s’active pour nous préparer une spécialité fromagère de Lille sauce acide.

Suite à la gifle intersidérale des Régionales, certains leaders de la gauche ont le pédoncule présidentiable qui pousse, à tel point que même la première secrétaire du PS est jugée crédible dans cette fonction exécutive.

Elle revient pourtant de loin : rappelez-vous, c’était en Juillet 2009, et les petites salves fusaient entre les différentes ténors du principal parti de l’opposition, à tel point qu’on croyait assister à une véritable guerre de tranchée préparatoire à une scission douloureuse ; les dissensions étaient telles au sein de Peintures Sanitaires S.A. qu’on sentait la société proche du dépôt de bilan.

Mais après le “succès” des régionales, la chance semble sourire à la Martine.

(Ici, je mets succès entre guillemets, puisque, pour rappel, compte-tenu de l’abstention, les joyeux filous de l’opposition représentent à peine un quart des Français et se croient cependant adoubés par la majorité d’entre eux, majorité qui a, essentiellement, préférer aller pêcher qu’écouter leurs salades.)

A tel point que, grisée par la victoire et, tout aussi probablement, fatiguée d’une longue séance municipale, la voilà qui s’emporte contre un conseiller municipal de droite qui a l’impudence de filmer la réunion :

“On est dans un lieu public, il y a des règles, et vous n’avez pas à filmer, à me filmer, depuis le début du conseil, sans autorisation, Je suis désolée, ce sont des pratiques d’un autre temps, et je dirais même d’autres pratiques, si vous voyez ce que je veux dire.”

Comme on peut le lire, très manifestement, Martine n’aime pas du tout qu’on puisse la tenir pour responsable de ce qu’elle dit en séance, quitte à assimiler – bizarrement – la publicité qu’on pourrait faire de ces enregistrements à des pratiques d’un autre temps, qu’elle se garde d’ailleurs de citer (pour éviter le point Godwin, sans doute).

C’est pour le moins étrange dans la mesure où les informations sont le plus contrôlées lorsque le régime en place est le plus totalitaire… En fait, il s’agit d’une vieille habitude ancrée dans les moeurs socialistes : traiter ouvertement ou à mots couverts son adversaire de fasciste ou de nazi dès lors qu’il ne pense pas comme vous. Les récents remugles zemmouriens et autres illustrent fort bien la tendance : la liberté d’expression doit être totale lorsqu’ils dénoncent les actes ou les discours de leurs opposants, et minimale pour ceux qui ont le mauvais goût de penser autrement que la ligne officielle qu’ils prônent.

Et en application, cela donne une Martine ronchonne qui tente par tous les moyens de récupérer l’enregistrement et faire cesser les fuites d’informations.

Oui mais voilà, la Martine a tort : un conseiller municipal a bel et bien le droit de filmer une séance :

Le principe de publicité des séances posé par l’article L. 2121-18 du même code, qui a conduit le législateur à prévoir la retransmission des séances par les moyens de communication audiovisuelle, fonde le droit des conseillers municipaux comme des membres de l’assistance à enregistrer les débats. Ce droit reconnu par la jurisprudence administrative a conduit les juges à considérer comme illégale l’interdiction par le maire de procéder à un tel enregistrement dès lors que les modalités de l’enregistrement ne sont pas de nature à troubler le bon ordre des travaux de l’assemblée communale.

A la suite de ce petit buzz un peu ridicule – auquel je participe indirectement avec ce billet, du reste – on peut tout de même retirer quelques réflexions intéressantes.

Ainsi, toute cette micro-affaire ne nous fait pas découvrir grand-chose quant au caractère stalinien tant des pratiques du vieux parti socialiste que d’Aubry elle-même. Toutes ces personnalités, depuis très longtemps habituées au pouvoir, en ont oublié le pendant, à savoir la responsabilité qui va avec. Progressivement déconnectées des réalités de tous les jours, elles s’imaginent toutes (Aubry comme beaucoup d’autres) que la transparence ou la publicité des débats, la responsabilité des actes ou des paroles ne s’adressent pas ou moins à eux qu’aux autres : si le pouvoir corrompt, il le fait surtout en amoindrissant grandement le sentiment d’implication dans les conséquences de leurs actes.

Autrement dit, il y a fort à parier que ce qu’on a observé ici avec la spécialité fromagère lilloise aurait très bien pu avoir lieu partout ailleurs dans une grande ville de France, ou dans les palais gouvernementaux ou présidentiels : ceux qui nous gouvernent n’ont plus, depuis longtemps, le sentiment que s’ils dérapent, s’ils mentent ou s’ils fautent, ils seront chopés, poursuivis et condamnés.

Ce n’est que dernièrement, avec l’apparition d’internet et la surmédiatisation des fuites des uns et des autres, que les politiciens ont commencé, assez timidement, à comprendre que la mémoire des moutontribuables allait s’en trouver diablement améliorée.

Et il faudra donc probablement des années avant que les élus comprennent bien que leurs revirements constants d’opinions, leur girouettie aigüe, leurs mensonges et leurs omissions finiront par leur coûter cher.

Ce qui m’amène à un deuxième point de réflexion : il faut absolument encourager ce genre de pratiques, et ce pour deux raisons.

D’une part, les élus nous sont redevables de leur vie publique, ils sont payés pour ça. Il faut absolument que la politique devienne une profession où l’élu se sente constamment épié, surveillé, à chaque minute contrôlé par la masse de ses électeurs et de ses contribuables, au point qu’il soit absolument persuadé qu’au moindre dérapage, il encourt une sanction immédiate. On doit encourager la transparence des débats, de tous les débats politiques et politiciens, comme par exemple ceux qui animent les syndicats et le gouvernement, les ministres et le président, etc…

Ce qui m’amène au second point : cette absolue transparence des débats politiques, la publicité maximale de chaque parole et de chaque transpiration d’homme ou de femme de pouvoir entraînera immanquablement ce que nous observons déjà en partie, à savoir l’amollissement complet des politiciens, qui se contenteront de débiter des lieux-communs, de ne prendre aucune décision et de faire de la fanfreluche consensuelle. Cela amènera aussi la plupart des gens de bon sens à renoncer à la carrière politique, ce qui devient une nécessité devant le marigot putride qu’elle est devenue.

En imposant, via internet, une mémoire solide de ce qui a été dit et fait, et en permettant à chaque citoyen de prendre vraiment conscience de ce qu’est, réellement, un politicien, en les mettant systématiquement face à leurs contradictions et leurs vices, on aboutira enfin à ce constat : l’exercice du pouvoir n’est qu’une forme subtile de manipulation honteuse d’une majorité par une toute petite minorité, coterie de puissants, menteurs, voleurs et assassins.

Aubry, dans cette histoire, ne fait ni plus ni moins que ce qu’on fait et feront encore tous les autres : exercer le pouvoir avec mépris, pour elle-même, et sans considération de sa charge.

Et pour cela, elle comme tous les autres doivent payer.

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Commentaires25

  1. GM

    Vous n’y pensez pas. Museler ainsi le pouvoir politique, ce serait ouvrir grand la porte aux exactions des méchanlibéraux dont chaque citoyen ressent encore les abominations au plus profond de sa chair. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire dans une démocratie, voyons. Non, non, le pouvoir doit rester assez fort pour distribuer ce qu’il faut d’édredons moelleux à l’électorat. Ce qu’il faudrait par exemple, c’est définir des critères de surveillance du politique en fonction du discours tenu… comment, ça existe déjà?

    Sinon, pour ma part, je suis extrêmement favorable aux retransmissions télévisées en direct des négociations entre “pouvoirs publics” et “partenaires sociaux”. Le public a le droit de s’instruire. Là pour s’instruire, il s’instruirait.

  2. halford

    Je suis extrêmement favorable aux retransmissions télévisées en direct des négociations entre « pouvoirs publics » et « partenaires sociaux ».

    Ce serait la moindre des choses à mon humble avis.

  3. daredevil2009

    Bonjour Hash,

    A propos de ce billet, avez-vous vu la une de ce mazine?
    http://www.booksmag.fr/

    Pour en revenir à ce que vous écriviez, je pense que le fond du problème se situe au niveau du statut de toute cette caste… la majorité sont des fonctionnaires qui – quoi qu’il advienne – ont un emploi à vie garanti! Je pense qu’un tel état est profondément déresponsabilisant et les diverses “affaires” de ces dernières années tendent à le prouver clairement ; sous d’autres cieux, tout politique qui aurait été condamné pour tel ou tel acte, aurait vu sa carrière finie une fois pour toute! Mais chez nous, que nenni! Vous n’y pensez pas ma bonne dame… ça serait trop injuste, n’est-ce pas?!

    1. C’est effectivement une des facettes du problèmes. Dans les pays anglo-saxons, il y a la notion d’ “accountability” qui, en gros, fait qu’un type qui s’est fait choper la main dans le pot de confiture se retrouvera jeté de la carrière politique et des instances publiques dans lesquelles il travaille. Dernièrement, il y eu un scandale impliquant des députés (travaillistes en l’occurrence) soupçonnés de corruption. Ils ne finiront pas leur mandat.

      En France, … Emmanuelli, Juppé, Fabius, j’en passe.

  4. Pierre

    C’est bizarre, personne n’a parlé des journalistes !!!

    Eux aussi, racontent n’importe quoi, et hochent la tête à chaque fois qu’une grosse légume raconte n’importe quoi à l’antenne…

    Je pense que les réunions des directions de rédaction de TF2 et FR1 devraient aussi être tenues devant webcam !…

      1. Laetitia

        C’est vrai mais ils jouent avec l’opinion, donc finalement c’est de même gravité.

      2. Hoho

        > Eux ne jouent pas avec notre argent.

        Ceux du service public, si.
        Et ceux de la presse écrite aussi: ce sont des semi-fonctionnaires qui vivent de subventions de l’État.

  5. adnstep

    “Et il faudra donc probablement des années avant que les élus comprennent bien que leurs revirements constants d’opinions, leur girouettie aigüe, leurs mensonges et leurs omissions finiront par leur coûter cher.” : que nenni. Ils ont déjà voté le “droit à l’oubli” au Sénat : http://bit.ly/bvMZZ7

    Et puisque j’y suis, et que j’aimerais bien rire un peu : http://bit.ly/al1qxr

  6. Laetitia

    “D’une part, les élus nous sont redevables de leur vie publique, ils sont payés pour ça. Il faut absolument que la politique devienne une profession où l’élu se sente constamment épié, surveillé, à chaque minute contrôlé par la masse de ses électeurs et de ses contribuables, au point qu’il soit absolument persuadé qu’au moindre dérapage, il encourt une sanction immédiate. On doit encourager la transparence des débats, de tous les débats politiques et politiciens, comme par exemple ceux qui animent les syndicats et le gouvernement, les ministres et le président, etc…”

    Je plussoie. Effectivement, nous devrions avoir accès à ces débats (moi j’aimerais bien voir ceux du Parlement, on doit bien rigoler à les voir voter la loi de règlement à 2h du matin à 4 ou 5).

    Et il y a également une chose fondamentale à laquelle nous devrions avoir accès: Les COMPTES, dans le DETAIL. Là par contre j’aurais sans doute besoin de beaucoup de calmants et d’un solide soutien psychologique…

    1. Winston the only (other) one

      je crains que ce type d’ultra transparence ne donne lieu à des réunions informelles trèèès privées où seront prises les décisions. Nos élus ont déjà pris la mesure de la menace que la démocratie fait peser sur eux en plébiscitant des machins non-élus type ONU, UE, etc…

      1. Mr T

        Pour les séances de l’Assemblée et du Sénat ça existe déjà sur Public Sénat même si tout (loin s’en faut) n’est pas retransmis… bien sûr le défi c’est d’arriver à tenir plus de 5 minutes 😀

        1. Laetitia

          Peut être aurais-je du dire: “j’aimerais avoir accès à l’intégralité de ces débats” 🙂

      2. Bien sûr, oui. Ce qui permet aux gens de se rendre compte plus facilement qu’on les entube. Enfin, à mon avis…

  7. Nick de Cusa

    Cette petite affaire de vidéo me rappelle celle où un eurodéputé finnois ou autrichien avait filmé ses collègues pointant au parlement à Strasbourg puis ressortant aussi sec du bâtiment. Avantages : grasses rémunérations pour “présence” (en particuliers en frais de déplacements ahurissants). Le parlement européen, voyant cette vidéo, avait décidé qu’il était en effet temps de prendre des mesures fermes pour éviter que ne se reproduisent de telles malversations : interdiction de filmer dans le parlement européen.

    Sad but true.

    1. Laetitia

      Oui et d’ailleurs dans la même veine, il me semble que H16 avait parlé de certains problèmes au Parlement Européen, comme par exemple le fait qu’on y entre comme dans un moulin, et que donc n’importe qui pouvait voter n’importe quoi.

  8. Th

    “Aubry, dans cette histoire, ne fait ni plus ni moins que ce qu’on fait et feront encore tous les autres : exercer le pouvoir avec mépris, pour elle-même, et sans considération de sa charge. Et pour cela, elle comme tous les autres doivent payer.”

    De tout temps le “seigneur” assurait la protection a ses “vassaux”, qui en échange lui fournissaient subsistance et moyens d’assurer sa tache. Quand le peuple comprendra que ses “seigneurs” n’assurent plus leur protection, ceux-ci seront mis hors jeu et d’autres prendront la place. Reste que nos seigneurs actuels sont de grands illusionnistes donc cela prendra un certain temps. Il faudra hélas surement une grosse crise pour qu’il y ait prise de conscience. Les gens bougeront quand le frigo deviendra dur à remplir, pas avant.

    1. Franck

      Bien d’accord.
      Ce qui se passe dans ce pays et la manière d’y réagir me fait penser que toute attente de “réforme” est illusoire. J’ai le sentiment que tant que les français ne se seront pas pris une grosse baffe en pleine gueule, rien n’évoluera…

  9. adnstep

    Les “débats” de l’assemblée passent en direct sur France 3, et LCP. Pas très intéressant, voire soporifique. Ça permet juste de voir une vingtaine de personnes voter une loi (ils ont un système de roulement très efficace).

    1. Laetitia

      “Les « débats » de l’assemblée passent en direct sur France 3, et LCP”

      Ils ne montrent pas tout, seulement les choses les moins choquantes. D’ailleurs c’est plutôt inquiétant (que ce qui est montré soit estimé moins choquant que la réalité habituelle) 😉

  10. Thierry Fouquereau

    Bonjour,
    Comme dit, nos élus sont soporifiques. le risque, si on suppose qu’ils soient épiés en permanence est qu’ils fonctionnent encore plus dans la com. Déjà, je connais un président de conseil général, député et adjoint au maire d’une petite ville, qui passe bien la moitié de son temps à chercher le passage télé, radio ou journal. Si, on lui rajoute une suvillance étroite, il risque de rentrer dans la parano et ne faire plus que des “phrases”. Le mec doit avoir 3/4 vies.
    Je pense qu’un non cumul des mandats effectif serait une avancée sérieuse. Cela créerait une arrivée massive de nouveaux élus. Car, il ne faut pas l’oublier. Sur les 21 p^résidents des conseils régionaux socialistes (ou ex), la plus jeune est madame Royal avec 57 ans et le plus vieux est monsieur Malvy qui a dépassé les 74 ans. Pour une moyenne d’âge qui frise les 64 ans avec en fin de mandat une moyenne de 70 ans. Beaucoup sont nés sous la TSF. Nous sommes à l’heure du numérique?
    Cordialement

    1. a/ oui, ils ne feraient que de la com. Et comme justement, avec Sarko, ça s’est vu, il y a fort à parier que ça transparaisse aussi pour les autres. L’étape d’après est, qu’enfin, les électeurs arrêtent d’élire. Et là, ça deviendrait rigolo.
      b/ oui pour le non cumul. Mieux : quorums dans les élections. Pas de quorum : les candidats sont virés et non pas le droit de se représenter. Arf arf arf.

    2. Théo31

      “qui passe bien la moitié de son temps à chercher le passage télé”

      Ca explique pourquoi ils sont nombreux le jour où les questions au gouvernement sont diffusées à la télé et qu’ils sont absents le jour des votes importants et qu’il n’y a personne pour filmer leurs pitreries de mongaulliens.

  11. Pierre

    Même si ce petit socialiste de droite est dans son droit, après lecture de votre article et ces divers liens je me suis renseigner sur ce jeune UMPiste. J’ai failli faire un infarctus tellement cela semblait irréel ( il faudra que je pense à contacter la brigade anti-secte sinon je serais condamné pour non assistance à personne en danger). Une véritable tête à claques comme vous pourrez en juger http://hervemariemorelle.hautetfort.com/ Il illustre parfaitement la connerie socialiste de l’UMP

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