MIGRATIONSCrise des migrants: Pourquoi les réfugiés boudent la France

Crise des migrants: Pourquoi les réfugiés boudent la France

MIGRATIONSChômage, bureaucratie ou squats insalubres expliquent pourquoi ils privilégient d'autres destinations...
Une faille de réfugiés venus de Homs en Syrie installés dans un immeuble promis à la démolition à Toulouse en France, le 11 septembre 2015
Une faille de réfugiés venus de Homs en Syrie installés dans un immeuble promis à la démolition à Toulouse en France, le 11 septembre 2015 - Remy Gabalada AFP
20 Minutes avec AFP

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L’Allemagne, la Suède, le Royaume-Uni, mais pas la France. Les réfugiés qui traversent la Méditerranée rêvent généralement d’atteindre une destination plus au nord, moins touchée par le chômage, la bureaucratie et les squats insalubres. La France, « c’est bien pour visiter, mais pas pour l’emploi », lance Abdulrahman Alshehagi à l’AFP, un Syrien de 26 ans croisé dans une gare de Suède, pour expliquer pourquoi il n’envisage pas d’y mettre les pieds.

La Tribune de Genêve publiait le week-end dernier une tribune sur le sujet. Elle pointait d’une part l’hypocrisie du gouvernement français, qui « se paye de mots en appelant à la tradition humanitaire ». Mais aussi le contexte économique global de la France, peu attractif pour attirer « ceux qui fuient les conflits ». Outre le taux de chômage qui dépasse les 10 %, les demandeurs d’asile n’ont pas le droit de travailler pendant l’examen de leur dossier et - c’est le second grief des exilés - il faut en moyenne neuf mois aujourd’hui pour obtenir l’asile en France.

65.000 nouvelles demandes d’asile

Autre difficulté : l’hébergement. Seuls un tiers des demandeurs d’asile sont logés dans des structures dédiées et il n’existe quasiment rien pour ceux qui décrochent le titre de réfugiés. En conséquence, de nombreux migrants se retrouvent dans des squats insalubres ou à la rue. Or, les exilés « échangent leurs expériences sur Facebook ou WhatsApp », souligne Sabreen Al-Rassace de l’association Revivre qui assiste les exilés syriens. « Pour eux, la France n’est pas un bon pays pour l’accueil. »

Conséquence : la France n’attend qu’environ 65.000 nouvelles demandes d’asile cette année, comme en 2014, alors que les dossiers s’accumulent en Allemagne, qui prévoit d’accueillir près d’un million de réfugiés. Pour soulager son voisin, le président François Hollande a proposé, il y a deux semaines, d’aller chercher un millier de Syriens et Irakiens arrivés à Munich pour les réinstaller en France.

« Beaucoup de temps avant que ma famille n’ait des papiers »

Des agents français sont allés sur place, mais ils n’ont réussi à convaincre que 600 personnes de monter dans des bus pour la région parisienne. Parmi eux, Sabah, 38 ans, une professeur d’anglais venue de l’est de la Syrie. « Ils nous ont promis trois choses : de nous donner facilement des papiers, que nos familles pourront nous rejoindre et un droit de séjour de dix ans », énumère-t-elle dans un monastère, à l’ouest de Paris, où elle est désormais logée.

Non loin d’elle, Ahmad, 29 ans, raconte qu’il a longtemps « hésité » avant de changer de cap. « Nous avions entendu dire que la France ne voulait pas prendre les réfugiés. D’autres Syriens ont rencontré des difficultés ici et ils m’ont dit qu’il faudrait beaucoup de temps avant que ma famille n’ait des papiers. »

Selon l’OCDE, des facteurs géographiques pèsent dans les routes migratoires

La présence de membres de la famille ou d’amis, qui peuvent faciliter l’intégration est un élément déterminant dans le choix des réfugiés pour un pays. Et si la France a eu un mandat pour administrer la Syrie de 1920 à 1946, la diaspora syrienne n’est pas importante sur son sol. De même, les Erythréens ou les Somaliens boudent Paris pour Londres, où vivent nombre de leurs compatriotes.

Enfin, souligne l’OCDE, des facteurs géographiques pèsent dans les routes migratoires : les réfugiés arrivent de plus en plus par l’est de l’Europe et croisent l’Allemagne avant la France. Pour toutes ces raisons, sur les quatre millions de Syriens qui ont fui leur pays depuis le déclenchement du conflit en 2011, la France a donné l’asile à seulement 7.000 d’entre eux.

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