La chute du pétrole est-elle terminée ?

Depuis le mois d’août dernier, le prix du pétrole a chuté de 104$ à 82, perdant plus de 21%.

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La chute du pétrole est-elle terminée ?

Publié le 18 octobre 2014
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Par Thibault Doidy de Kerguelen.

cours-du-pétrole-2014

Depuis le mois d’août dernier, le prix du pétrole a chuté de 104$ à 82, perdant plus de 21% ! La raison fondamentale de cette chute est structurelle. Les États-Unis deviennent autosuffisants grâce au pétrole de schiste. Une situation que nous vous avions annoncée il y a maintenant deux ans, même si certains idéologues adeptes de la religion du peak oil vous prédisaient mille maux autour de cette technologie et en particulier qu’elle ne changerait rien dans les équilibres énergétiques mondiaux.

Les conséquences de la baisse du pétrole sont majoritairement positives

Le prix de l’énergie baissant, les coûts de production en Europe vont baisser. Le coût de production baissant, soit les entreprises françaises reconstituent un petit peu de marge leur permettant d’investir, soit les prix de ventes vont baisser, leur permettant de gagner quelques parts de marché, même si, au regard du périmètre de marché de nos entreprises (extrêmement franco et euro centrées) leurs gains de parts de marché seront limités puisque les autres entreprises européennes bénéficieront aussi de cette baisse du coût de l’énergie. On peut même imaginer que l’Allemagne, qui exporte plus que nous en dehors de la zone euro, en bénéficiera plus.

L’euro, comme nous l’avons évoqué précédemment, chutant face au dollar et le pétrole restant encore coté dans cette dernière unité de compte, le coût de l’énergie se renchérissait mécaniquement. La baisse du cours permet de contrer cette hausse mécanique, là encore pour le plus grand profit des entreprises… de production (nous ne répéterons jamais assez que la France, depuis Mitterrand, s’est fourvoyée dans la désindustrialisation…).

En théorie, la chute des cours devrait bénéficier au consommateur. Le prix des carburants devrait baisser, permettant ainsi aux budgets malmenés des ménages français de retrouver un tantinet de souplesse. Malheureusement, l’ogre fiscal risque de manger cette marge retrouvée. En effet, qui dit baisse des cours dit baisse des revenus relatifs liés aux carburants. Or, le gouvernement ayant déjà largement triché sur l’établissement de son budget ne peut pas se permettre de voir une de ses vaches à lait fiscales rendre moins que prévu. Ainsi donc, il y a fort à parier que, sous prétexte d’écologie, de bons sentiments et avec moult démonstrations « citoyennes et responsables », on voit le monstre de Bercy augmenter les taxes sur les carburants, maintenant ainsi les carburants à leur prix maximum et assurant éventuellement au passage un petit surcroît de recettes fiscales…

Un point négatif à la baisse du pétrole

Il est nécessaire d’envisager une vraie politique énergétique dans ce pays (dans d’autres aussi, mais sincèrement, il m’arrive parfois de penser que les autres, je m’en fiche, tant je vois la France partir à la dérive…). Cette politique énergétique passe par la dissociation entre les besoins domestiques, les besoins agricoles et les besoins urbains et industriels.

Sur le plan domestique, l’incitation à la production décentralisée, voire autonomisée, d’énergie électrique est capitale. Si le coût des carburants fossiles baisse trop, la rentabilité d’investissements domestiques ne sera plus établie et nous connaîtrons à nouveau la situation des années 70 où nous avons raté l’opportunité qui se présentait à nous.

Sur le plan industriel, les ayatollahs de l’anti nucléaire entraînent notre planète vers une pollution aérienne au soufre et une surconsommation d’énergies fossiles, condamnant à terme la réindustrialisation de notre pays. En effet, il est impossible d’envisager la réindustrialisation de la France sans prendre en compte le surcroît d’énergie nécessaire. Si vous ne disposez pas de la capacité de production des centrales nucléaires, vous serez amenés à multiplier les centrales à énergies fossiles. Or, les normes internationales et la responsabilité mondiale en matière de pollution ne le permettront pas. Ne pas construire de centrales nucléaires aujourd’hui revient à condamner notre pays au sous développement économique pour plusieurs générations. La baisse du prix des énergies fossiles va accentuer le ralentissement du développement énergétique de la France car il va rendre le nucléaire moins compétitif et donner ainsi des arguments supplémentaires aux passéistes.

Où va le prix du pétrole ?

Comme toujours en matière de prospective, rien n’est sûr. Je serais néanmoins tenté de répondre… nulle part ! En effet, plusieurs phénomènes conjugués laissent à penser que le pétrole ne descendra pas en dessous de 80$.

  • 80$ représente le seuil en deçà duquel le pétrole de schiste n’est plus rentable. Les États-Unis n’y ont pas intérêt.
  • 80$ est déjà en dessous du seuil a minima des business plans des compagnies pétrolières (88$ pour Total).
  • 80$ est le seuil en deçà duquel les économies des pays arabes ne s’équilibrent plus. On imagine mal l’Arabie Saoudite entrer en restriction (il ne manquerait plus que cela au regard de ce qu’elle représente pour les économies américaine et européenne…).

Trop de facteurs, donc, pour que nous risquions de voir le pétrole s’installer en dessous de ce seuil. Maintenant, il arrive quelquefois que des phénomènes « anormaux » s’installent (comme le cours surévalué des actions pendant plusieurs années…), mais, comme le savent les lecteurs, les équilibres naturels reprennent toujours le dessus…


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  • encore une chance que sa baisse suit (ou la précède) la baisse de l’euro sinon nous serions tous étranglés !

  • On note la récente corrélation négative entre le prix du baril en dollars et le pouvoir d’achat du dollar. Si jamais le dollar devait s’apprécier fortement, il n’est pas improbable de voir le prix du baril plonger bien en dessous de 80 dollars. Trois arguments viennent soutenir cette spéculation.

    Quelles que soient les tentatives pour le remplacer, le dollar demeure la monnaie refuge en cas de récession mondiale. Les producteurs de pétrole ont ainsi intérêt à remplacer le plus possible leur stock de pétrole déprécié par un stock de dollars apprécié.

    Il y a peu de chance de voir les producteurs de pétrole baisser leur production dans le cas d’une baisse prolongée du prix liée à l’effritement de la croissance mondiale, car ils s’appliqueraient la double peine prix et quantité. Afin de maintenir leurs équilibres budgétaires, face à un prix qu’ils ne maîtrisent plus, les principaux producteurs auront tendance, du moins dans un premier temps, à tenter de compenser la baisse du prix par une hausse de leur production, en raflant des parts de marché à leurs concurrents. Les producteurs disposant des coûts d’extraction les plus faibles peuvent en effet jouer le jeu de la surproduction quelque temps, contrairement à leurs concurrents non conventionnels qui ne pourront pas le supporter bien longtemps. Ainsi, les premiers peuvent tenter d’affaiblir les seconds, faute de rentabilité. C’est seulement lorsqu’ils auront repris la main sur le prix du baril que les principaux producteurs pourront de nouveau restreindre leur production.

    On met en avant la connivence historique entre les USA et les pays producteurs de pétrole, notamment l’AS. Mais les USA étant sur le chemin de l’indépendance énergétique, c’est plutôt la Chine qui devient le principal allié par défaut de l’AS. L’AS peut trouver quelque intérêt à renforcer la baisse du prix du baril pour soutenir son nouvel allié objectif si jamais ce dernier devait voir son économie stagner, ou même entrer en récession. L’émergence de la Chine et l’indépendance énergétique relative des USA ont notablement modifié les anciens rapports de force.

    Accumulation de la monnaie refuge, jeu concurrentiel, nouveaux équilibres géostratégiques : tout ceci milite pour une continuation de la baisse du prix du baril dans un premier temps.

    Dans l’affaire, l’Europe ne bénéficiera pas de la baisse du prix du baril puisque l’euro se déprécie peu ou prou au même rythme que le pétrole face au dollar. Avec à terme le risque de voir le prix du baril remonter mais l’euro continuer de stagner en même temps que l’économie européenne. Une seule solution dans ce cas : agir pour une forte appréciation de l’euro, c’est-à-dire l’exact inverse des politiques actuelles, sachant qu’il est tout à fait farfelu d’imaginer pouvoir se passer du pétrole, du moins au cours des prochaines décennies.

  • Certains évoquent également une manœuvre pour accroître les difficultés économiques de la Russie dont les revenus sont étroitement liés aux hydrocarbures, quoique moins qu’auparavant.
    Autre hypothèse, une mesure de rétorsion de l’AS contre les UE dont les intérêts (pétroliers et géostratégiques) commencent à diverger sérieusement, et, accessoirement contre l’Iran qui n’a pas les mêmes réserves monétaires pour faire face à une baisse de leurs revenus pétroliers et gaziers.

    • Je pencherais plutôt pour votre analyse. Le prix du baril libellé en dollar est un instrument de chantage utilisé par les Américains pour mettre en difficulté l’Iran, la Russie et accessoirement le Venezuela dont la situation économique déplorable a été orchestrée par les USA. L’Arabie Saoudite peut doubler sa production du jour au lendemain mais il ne faut pas oublier que ce pays consomme plus de 50 % de son pétrole extrait pour dessaler l’eau de mer et faire tourner les conditionneurs d’air … on oublie parfois de le mentionner ou encore que le pompage du pétrole est accéléré par injection d’eau de mer dans les gisements afin de faire remonter le pétrole et les réserves en pétrole de l’AS sont top secret. Il faut insister sur le fait que les USA sont derrière cette manipulation géostratégique des cours du pétrole mais l’Europe ne pourra pas s’en tirer sans casse car l’euro va continuer à s’effondrer face au dollar compte tenu de la situation économique et politique en Europe qui a de facto perdu un partenaire commercial important la Russie.

      • Tout dépend de combien de temps cette monnaie de singe (le dollar) pourra tenir. Les BRICS envisagent sérieusement de s’en passer, et Russie et Chine ont déjà passé des contrats en roubles et yuans. Jusqu’à maintenant, les pays qui ont tenté de s’affranchir de la monnaie de réserve l’ont payé cher, mais rien n’est dit que l’édifice ne va pas s’écrouler (avec des conséquences imprévisibles d’ailleurs).

      • Les problèmes du Venezuela orchestré par les USA… lol… Sinon je pencherait plutôt pour une volonté de l’AS de casser un cartel dont elle est le dindon de la farce… Il ne faut pas oublier que plus un producteur est performant plus il perd à la cartellisation…

  • L’électricité d’origine nucléaire ne represente que 2% de l’énergie consommée (l’énergie finale) dans le monde.

    L’électricité représente 17,7% de l’énergie consommée dans le monde (chiffres pour 2011).
    11,7% de l’électricité dans le monde est produite par des centrales nucléaires.

    La part de l’électricité nucléaire dans l’énergie consommée dans le monde est inférieure au score d’Eva Joly à la présidentielle de 2012, 2,3%.

    Source
    Agence internationale de l’énergie.
    key world energy statistics 2013

  • Oui l’analyse est bonne mais il y a Ségolène qui a vu le pétrole baisser et en profite pour mettre une taxe invisible. Le Français moyen ne verra pas le pétrole augmenter à cause de la taxe, mais il ne verra pas non plus la baisse du pétrole.

  • Juste une précision concernant le pétrole de schiste, que nous appelons plutôt huile de schiste.
    Les États-Unis ne sont pas autosuffisants concernant le pétrole et aucun prévisionniste n’anticipe qu’ils ne le soient dans le futur.
    C’est dans le gaz de schiste que les États-Unis vont devenir indépendants dans les deux prochaines années.
    Selon les dernières prévisions de l’IEA (Agence américaine du pétrole) dans le World Energy outlook de septembre 2014, dans le cas de référence, les États Unis produiraient en 2019, 9,6 Mb/j de pétrole, soit 3,1 de plus qu’en 2012.
    Or les États-Unis consomment annuellement 19 Mb/j de pétrole !
    Pour revenir sur les causes de la baisse récente, il me semble, comme je l’expliquais dans un papier de la semaine dernière, que l’Arabie Saoudite, n’a pas envie de refaire les erreurs des années 80 où elle avait joué un rôle de « swing producer » face à la montée de la production du pétrole de la Mer du Nord, comme aujourd’hui, on voit la montée de l’huile de schiste américaine
    voir lien ci-dessous :
    http://aymericdevillaret.wordpress.com/2014/10/16/arabie-saoudite-ne-pas-refaire-les-erreurs-du-passe/

  • Bon, j ‘avais tout bien compris :

    Quand le prix du baril monte, l’essence « A la pompe » »augmente.

    Ca c’était bien imprimé et du reste quand, jadis, voire naguère, je l’oubliais il ne manquait pas d’industriels ou de « Politique » (Petits chiens) pour me (nous) le rappeler.

    Donc là le prix du pétrole baisse… de plus de 20% dites vous ?

    Ummmm bien sur il y a des frais fixes, raffinage, transport distribution, publicité, que sais-je.

    Mais quand même et alors…

    Pourquoi le prix de l’essence « A la pompe » ne baisse pas aussi ?

    Ummmm ?

    Ummmm ?

  • Dans l’article on dit : prix du petrole baisse -> coûts d’énergie diminuent -> coûts de production diminuent en Europe -> si cela se traduit par une diminution du prix de vente, les entreprises européennes gagneront en part de marché. mais la baisse du coût d’energie, et donc des coûts de production, ne profite t elle pas à tous les acteur, plutôt que seulement l’Europe ? je ne vois pas pourquoi l’Europe en bénéficierait en particulier.

  • le petrole chute correctement depuis 15 jours , sauf à la pompe…
    pourtant quand le baril de brut augmente, ça suit quasi directement à la pompe.

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