Pendant que la droite tapine, Sapin pipeaute

Pendant que la droite organise ses primaires et occupe donc complètement la scène médiatique, Sapin en profite pour bidonner un budget 2017 fantaisiste.
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Michel Sapin (Crédits : Parti Socialiste, licence Creative Commons)

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Pendant que la droite tapine, Sapin pipeaute

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 25 novembre 2016
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La tempête de la Primaire de la Droite (et du Centre Gauche ?) peut bien arriver, le pays, lui, continue d’être dirigé de main de maître par la fine équipe de jongleurs, cracheurs de feu et autres bateleurs colorés aux multiples talents qui s’empressent de s’assurer que si on doit un jour rencontrer un écueil, cela se fera avec une onctuosité moelleuse qui permettra à tout le monde de garder son calme. C’est d’ailleurs ce que fait le Sapin de Bercy.

Michel est calme, posé. Pondéré, même, si l’on s’en tient à la rotondité de son ample personne et des arguments qu’il déploie lorsqu’il s’agit d’annoncer une triste nouvelle.

Oh, cela ne lui arrive guère souvent, la France est si bien gérée qu’il serait impensable qu’une décision économique d’importance échappe à sa surveillance et lance le pays sur les mauvais rails. Mais parfois, l’automne et ses feuilles mortes aidant peut-être et à l’instar de certaines locomotives de certaine entreprise publique de transports collectifs ferrés, la France patine quelque peu en côte. Et voilà notre bonhomme Michel, la mine sérieuse et les sourcils froncés, nous annoncer un petit incident de parcours.

À l’instar d’un Brejnev de Prisunic (Alain Juppé powa !), le Sapin de Bercy n’hésite pas à manier la litote et le sens de l’ironie en expliquant que « tout va bien » ou quasiment. En effet, on apprend de lui il y a quelques jours que la croissance française, au départ prévue, que dis-je, planifiée à 1,5% par l’intelligentsia en charge de notre économie ne pourra que s’approcher de cet objectif en frôlant gentiment les 1,4%. Dans la bouche du rond Michel, cela donne même ceci :

« La croissance sera quelque part entre 1,3 et 1,5% »

… Oui, quelque part entre un chiffre et un autre, avec une précision pas trop diabolique, et voilà qui devrait le faire. Et en plus, cet abaissement de la croissance sera même neutre sur le reste de l’économie française, puisque, toujours selon le conifère économiste, la baisse du chômage continuera, d’autant « qu’on n’a jamais créé autant d’emplois, d’emplois nets (..) depuis la crise ». Quant à 2017, même pas mal, on obtiendra les mêmes chiffres roses et joyeux avec toujours 1,5% de croissance prévue, et youplaboum.

Puis, son annonce faite, le Commissaire au Plan Quinquennal ministre de l’Économie est reparti dans les hautes sphères étatiques attendre la fin du match Juppé – Fillon.Le peuple a été informé, il n’est plus nécessaire de rien faire d’autre.

Tout ceci serait drôle s’il n’y avait pas cet entêtant parfum de statistiques bidonnées et de gestion de l’économie à la soviétique dans les meilleures années de guerre froide.

on appelle cela du foutage de gueule

Eh oui, les petits jeux de jambe de Sapin n’arrivent pas à camoufler la réalité, toujours aussi catastrophique, des comptes publics français. D’une part, il devient difficile au locataire de Bercy de faire oublier que le consensus des différentes institutions financières internationales à l’égard de la France situe la croissance du pays autour de 1,2% plutôt que les 1,4% (et à plus forte raison, 1,5%) du minustre financier.

Dans les milieux économiques, même vaguement lucides, on est obligé de constater que la timide reprise observée pendant l’automne n’est qu’un phénomène très passager, qui n’a pas été concrétisé plus que ça pour cause d’un manque de plus en plus évident de confiance des acteurs économiques dans le futur français et, afférent à ce manque de confiance, le manque d’investissement.

Bizarrement, le matraquage fiscal permanent que s’emploient à faire pleuvoir Hollande et son équipe semble décourager les entrepreneurs à investir dans notre beau pays.

Étonnamment, un nombre croissant de ménages français diminue sa consommation courante et prépare des noisettes pour des périodes rudes à venir, sentant bien qu’il vaudra mieux en avoir sous le coude que, au contraire de nos élites, derrière la musette.

Curieusement, l’absence presque parfaite de tout programme crédible ou de tout candidat solide dans le camp socialiste (même en comptant Juppé) ne semble pas gêner le gouvernement dont on imagine alors qu’il prend les décisions avec une sérénité d’airain pour les prochaines années.

Tout ceci sent extrêmement bon.

Et le pompon est même atteint lorsqu’on apprend qu’en plus et pour la première fois depuis le début de la Vème République, le Sénat a refusé d’examiner le projet de loi de Finances (PLF) pour 2017 au motif que « son insincérité prive de tout intérêt réel et sérieux le travail » de la Haute-Assemblée : la majorité sénatoriale refuse ainsi de valider une vision économique dont le taux de croissance affiché semble bidon et n’est là que pour permettre de tabler sur des recettes fiscales dont tout indique qu’elles seront bien moindres, même en tenant compte de l’averse drue d’impôts et de vexations taxatoires. Quant au déficit, on le voit mal se réduire (même de loin) dans ces conditions.

this-will-not-end-well-crocodile

Rassurez-vous, nous ne découvrirons ces petits nuggets de plaisirs fiscaux à venir qu’une fois l’élection présidentielle passée, et ce, pour deux raisons.

D’une part, parce que les lois de finance prennent du temps à être concrétisées et que les votes n’interviendront qu’une fois l’Assemblée nationale renouvelée. On peut imaginer beaucoup de choses, mais difficilement que le rythme va s’accélérer… Au contraire, il n’est pas idiot de penser qu’on va découvrir — avec effroi ? — la catastrophe budgétaire alors que nous serons bien dans l’été 2017.

D’autre part, parce qu’encore une fois, la presse est copieusement en dessous de tout. À l’exception de quelques opuscules spécialisés et du nécessaire entrefilet dans l’un ou l’autre journal, histoire de justifier le coût de l’abonnement à l’AFP, le fait que la croissance française calanche, que le budget est complètement bidonné et que les prévisions de déficit sont parfaitement grotesques ne semble pas du tout atteindre les milieux jacassants. Totalement obnubilés par une campagne présidentielle dont les programmes économiques ont été pour ainsi dire escamotés au profit de frites, de pains au chocolat, de l’avortement, du catholicisme de l’un et surtout pas du casier judiciaire de l’autre, les médias ne s’occupent absolument plus de ce qui peut bien se passer sur le territoire (il aura fallu attendre mercredi pour qu’on commence à voir en Une des informations sur le projet d’attentat, déjoué dimanche).

Dans un monde normal, la presse ne devrait passer qu’un temps fort modéré sur la désignation d’un candidat à la présidentielle par un parti qui n’a, pour le moment, jamais réussir à produire autre chose que des semi-conservateurs mous, des sociaux-démocrates pénibles et des tombereaux de promesses non tenues. Cette même presse devrait en revanche se déchaîner sur l’incurie de l’actuel gouvernement tant en matière de sécurité qu’en matière d’économie.

Dans un monde enfumé par une presse sur-subventionnée, évidemment, c’est un peu une autre musique.

Cette musique qui autorise des présidents graves.

attention-subventionner-la-presse-peut-provoquer-des-presidents-graves
—-
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  • Et oui, Hollande et Sapin, c’est la politiquede la terre brulée: leur outrecuidance ne les inoculant (j’ai bien écrit inoculant!) pas suffisamment contre la myopie congénitale qui les caractérisent, conscients de leur incompétence, mais nullement découragés de pouvoire faire encore mieux, ils font tout ce qu’ils peuvent pour laisser l’ardoise la plus calamiteuse possible à leurs successeurs, afin de revenir presque blancs comme neige un quinquennat plus tard, en accusant ledits d’avoir tout bousillé, car, comme vous le dites fort bien, le pot aux roses ne sera découvert qu’après leur départ.
    Et quand on pense que les taux commencent doucement à se resserrer (sic), les contribuables français vont se « marrer » un bon moment encore (à condition d’avoir de quoi faire chauffer la marmite).

  • Et vu la « baisse » de 0.3% du chômage en catégorie A, le capitaine de pédalo tentera de se représenter puisque « ça va mieux ».

    Un peu HS, mais une bonne marade :

    https://therealstrategy.com/saudi-prince-putin-negotiate-ill-finance-israel-isis-invade-russia/#.WDcxlaJsGZU.twitter

    Ça plane pour eux, même grave :mrgreen:

  • Merci H16. Vif et percutant, comme d’hab.

  • vous décrivez une « mauvaise foi » caractérisée, amenant à des prises de décisions « volontairement » néfaste pour la France et un certain nombre de français, dans un autre article de contrepoint on parle de « bombe à retardement », à droite on parle de mesure électoralistes à court terme ruineuse des 2017 à 2018…bref peut on imaginerune mise en accusation, une punition juridique…dans l’optique d’un procés pour « haute trahison »

    • Je crois que l’expression « haute trahison » me parait tout à fait adaptée pour ces sinistres personnages qui nous gouvernent. Ils mettent tout en place pour mettre leurs successeurs en difficulté…actant de facto leur défaite. Oui mais ! Qui dit que face à Fillon (on peut sans crainte le donner gagnant de la primaire), plus clivant, qui va se mettre un max. d’électeurs peu éclairés (je ne cite personne, suivez mon regard) sur la situation économique et financière de notre pays, l’arroseur socialiste ne soit pas arrosé…en étant réélu, héritant ainsi de ses propres conneries.

      Aujourd’hui il n’y a que Fillon pour tenter (utilisé à dessein) de nous sauver du bourbier socialiste.

  • Pauvre Voltaire, regarde les crimes qu’ils ont commis en ton nom.

    Callas était peut-être innocent ; mais Cahuzac, Thevenoud, Arif, le fils de Fabius, le Fils de Touraine (pour s’arrêter là) eux sont coupables et ne seront probablement jamais inquiétés à la mesure de leurs méfaits.

  • Je rêve ….
    Je rêve d’un jour béni où nous serons délivrés de tous ces génies transcendants de la politique de haut vol si imbus de leur science, de leur expertise alors qu’ils ne sont que des marionnettes manipulées par la finance: fonds de pension, banques, multinationales Soros et consorts
    Et, les bougres, ils font semblant d’y croire à leur génie politique ou peut être pire ils y croient alors qu’ils ne font qu’obéir servilement aux injonctions.
    Le seul luxe que je me suis offert c’est d’avoir investi 2 euros afin de virer l’agité du bocal et j’ai réussi avec quelques autres.
    Maintenant inch Allah mourir de la peste ou du choléra est-ce un choix ???

  • Les commentaires sont fermés.

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