Selon la Commission européenne, le niveau des dépenses publiques a battu l’an dernier en France un nouveau record.
Vous vous souvenez, Patrick, qu’au moment même où François Hollande tenait sa conférence de presse, jeudi dernier, le commissaire européen Pierre Moscovici présentait à Bruxelles ses nouvelles prévisions économiques d’hiver pour l’Europe. Plutôt positives d’ailleurs. Eh bien, ce week-end, j’ai feuilleté (un peu par habitude) les annexes statistiques du gros document de la Commission...
Vous avez des loisirs bizarres au coin du feu, vous !
Oui, mais il faisait froid et on y trouve toujours quelque chose ... ! Toujours est-il qu’un tableau évalue le niveau des dépenses publiques en France à 57,7% du PIB l’an dernier. Jamais ce taux n’avait été aussi élevé ! Dans le débat public, on n’a jamais parlé de quasiment 58%. Cela veut dire que sur 100 euros de richesse produite, 57,7 euros sont redistribués sous une forme ou une autre, retraites, remboursements de sécu, dépenses des collectivités locales et de l’Etat, salaires des enseignants et des militaires etc. Ce chiffre devra être confirmé par l’Insee mais il y a dix ans, on tournait autour de 52%. Là, on est au-delà de tous les pronostics.
Comment la France se situe-t-elle en Europe ?
Elle est hors-normes. Si on prend les vingt-huit pays de l’Union, un seul est au-dessus de nous, du niveau français, c’est la Finlande ; même chose pour la zone euro. Quant à la zone euro, la moyenne est un peu au-dessus de 49%. Un sacré écart avec nous.
Mais ces comparaisons ont-elles un sens ? On entend souvent que non...
Et il y a du vrai : il faut connaître les limites des comparaisons. La France a des dépenses militaires publiques que n’ont pas un certain nombre d’autres pays. En Allemagne, les dépenses de retraites ne sont pas publiques, mais en partie privées, avec des fonds de pension. La prise en charge des soins de santé n’est pas aussi collective partout que chez nous. Il n’empêche : si on élimine ces différences de définition ou de choix sociaux, la France reste dans une situation atypique et l’écart s’est accentué ces dernières années avec nos voisins.
Quelle analyse politique peut-on faire de ce chiffre –donc – record ?
Il montre que les dépenses collectives ont continué ces dernières années à progresser plus vite que le PIB, la richesse produite. Il dit que parler d’austérité draconienne en France est une vaste plaisanterie. A partir de là, certains se félicitent : les dépenses publiques amortissent la crise, notamment socialement. Elles jouent un rôle que les économistes appellent contra-cyclique. C’est l’économie « pouf » : quand on tombe dans un pouf, on ne se fait pas mal. Mais on peut aussi penser que quand on tombe dans un pouf, on a vraiment du mal à se relever et qu’à partir d’un certain niveau de dépenses publiques, la part la plus directement productive de l’économie n’a plus la force d’entraîner l’économie dans son ensemble.
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