Le gouvernement a abattu ses premières cartes au sujet de la « rénovation de notre modèle social ». Mercredi 28 juin, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a présenté en conseil des ministres puis, quelques heures après, à la presse, le projet de loi d’habilitation qui permettra au gouvernement de prendre des ordonnances afin de réécrire le code du travail.
Le texte recèle peu de différences par rapport à la version récemment révélée par Le Monde (nos éditions du 23 juin). La nouveauté réside principalement dans la place que l’exécutif souhaite donner à la négociation collective pour élaborer les normes sociales : ses intentions, en la matière, annoncent de gros chambardements puisque les accords d’entreprise l’emporteraient sur les conventions de branches dans un champ nettement plus étendu qu’aujourd’hui.
« Ce n’est pas définitif »
C’était l’affluence des grands jours, mercredi, au 127 rue de Grenelle, le siège historique du ministère du travail. Deux salles ont dû être mises à disposition pour accueillir les dizaines de journalistes, français et étrangers, venus écouter Mme Pénicaud. Son intervention a apporté des premiers éléments de réponse, en particulier à tous ceux qui accusaient le gouvernement d’avancer masqué sur le premier grand chantier social du quinquennat. On y voit désormais un peu plus clair sur les orientations de l’exécutif à propos d’une question centrale et ultrasensible : le rôle du dialogue social dans la construction des règles du jeu entre salariés et employeurs.
Soucieuse de ne pas braquer ses interlocuteurs patronaux et syndicaux, la ministre a d’abord insisté sur le fait que son propos n’exprimait pas des « décisions » : « C’est ce que nous retenons à ce stade (…) », a-t-elle souligné, en ajoutant qu’il s’agissait de « la copie du gouvernement proposée au débat démocratique et au débat social ». « Donc ce n’est pas définitif mais ça donne une idée de ce que l’on va discuter dans les semaines qui viennent », notamment lorsque les projets d’ordonnances seront soumis, « fin août, début septembre », à plusieurs instances dans lesquelles siègent les organisations d’employeurs et de salariés (Commission nationale de la négociation collective, Conseil supérieur de la prud’homie…).
Mais Mme Pénicaud a une vision extrêmement acérée de la réforme : pour elle, « il y a des choses qui ne peuvent pas être traitées dans la loi », notamment pour tout ce qui a trait à « l’organisation du travail ou (…) des congés » ; il faut, de surcroît, « renforcer l’accord d’entreprise mais aussi la négociation de branche », tout en clarifiant les « responsabilités » de ces deux échelons de dialogue. Un discours qui préfigure une petite révolution.
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