Trésorerie des entreprises et délais de paiement : Bercy veut mettre le paquet
La trésorerie des entreprises est « un des éléments clé de la reprise » pour le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron. Mais les délais de paiement (50 jours en moyenne) restent une plaie : 15 milliards d’euros à la charge des entreprises. Les contrôles vont s’intensifier, un projet de décret doit améliorer la transparence sur le sujet, le projet de loi pour la croissance et l’activité doit obliger les grandes entreprises à accepter la réception des factures électroniques à partir de 2017.
Bénédicte Rallu
La reprise serait pour bientôt. « Cela frémit », selon plusieurs intervenants d’un colloque organisé le 26 mars à Bercy sur la trésorerie des entreprises. Le ministre de l’Economie Emmanuel Macron veut y croire, le contexte économique le permettrait (baisse du prix du pétrole, réformes…). « L’un des éléments clé de la reprise est la trésorerie des entreprises », a-t-il avancé.
Seulement, celle-ci est mal en point depuis des années. Les délais de paiement constituent toujours l’une des plaies principales. Pour les PME, leur impact serait de 15 milliards d’euros ! Sur ces 15 milliards, 9 milliards seraient le fait des collectivités publiques… 41% des entreprises contrôlées par les services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) présentent une anomalie en matière de délais de paiement. Le délai moyen de paiement serait de 50 jours. Le retard moyen de paiement a très peu évolué depuis la loi de modernisation de l’économie (dite loi « LME ») : 12 jours. Contre 6 en Allemagne. Il y a 62 000 défaillances d’entreprises par an. Un quart des entreprises qui meurent basculent parce que leurs factures ne sont pas payées… Quant au crédit interentreprises, il représente 635 milliards d’euros. Le gouvernement voit donc les délais de paiement comme « la mère des batailles », selon les mots du secrétaire d’Etat chargé du Budget, Christian Eckert.
2 500 contrôles de la DGCCRF prévus en 2015
« Le CICE [crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi] a amélioré la trésorerie des entreprises de 60% », a annoncé Christian Eckert. Il a été renforcé en début d’année (en passant de 4% à 6 % de la masse salariale éligible). Mais le gouvernement souhaite aller plus loin. Non en imposant un nouveau délai de paiement minoré en raison des difficultés déjà existantes sur les délais légaux actuels, mais tout simplement « en faisant respecter la loi, a annoncé Emmanuel Macron. Nous serons intraitables ».
Depuis l’automne, les services de la DGCCRF mènent des contrôles renforcés dans le nouveau cadre tissé par la loi consommation du 17 mars 2014, dite loi « Hamon » (70 procédures sont en cours). Emmanuel Macron a demandé 2 500 contrôles pour 2015, dont 70 dans les grands groupes. Les sanctions énoncées seront de plus en plus rendues publiques, mais pas systématiquement. Selon Stanislas Martin, chef du service de la protection du consommateur et de la régulation des marchés à la DGCCRF, il y aura publicité des sanctions lorsque le cas sera « grave, ou à vertu pédagogique, ou s’il y a eu réitération » malgré des injonctions. Il y aura sanction quand les problèmes de retard de paiement seront issus d’une « pratique délibérée. En cas de problème de trésorerie, nous donnerons un avertissement. Et quand il s’agira d’un problème d’organisation comme par exemple un logiciel mal paramétré, il y aura injonction » d’y remédier.
Un décret à l’été et des factures obligatoires dans les grandes entreprises en 2017
Cet été, devrait être publié un décret pris en application de la loi « Hamon » sur la transparence en matière de délais de paiement. L’état des délais de paiement d’une entreprise devrait être inscrit dans le rapport de gestion des entreprises qui ont recours à un commissaire aux comptes. Son contenu été un peu modifié en raison du projet de loi « Macron », en cours d’examen au Sénat. Pour plus d’exactitude, l’approche choisie sera une approche des délais de paiement pratiqués par l’entreprise en flux et non plus en stock. Mais surtout cette mesure doit être liée avec une disposition du projet de loi sur la croissance et l'activité (projet de loi « Macron ») : à partir de 2017, toutes les grandes entreprises devront accepter de recevoir les factures électroniques. La mesure s’appliquera ensuite progressivement à toutes les entreprises. Le gain de la numérisation de l’économie (facture et traitement de la facture électronique) par facture est de « 10 euros », a justifié Emmanuel Macron.
Etat et collectivités aussi visés
L’Etat et les collectivités ont aussi une « immense responsabilité », a prévenu le ministre de l'Economie. Son projet de loi prévoit donc d’étendre les pouvoirs de contrôle de la DGCCRF en matière de délais de paiement aux entreprises publiques. Un dialogue doit être engagé avec les associations représentatives des collectivités pour définir des bonnes pratiques.
Par ailleurs, le ministre de l’Economie a assuré les entreprises de la vigilance de l’Etat sur les garanties de crédits apportées par Bpifrance aux PME/TPE : 6 milliards d’euros ont été mobilisés pour faciliter l’accès des entreprises au crédit en 2014, 7 milliards d’euros le seront en 2015. Emmanuel Macron et Christian Eckert ont insisté sur l’exemplarité que doit montrer l’Etat. L’objectif d’un délai de paiement en 20 jours en 2017 a été réaffirmé. L’Ugap (Union des groupements d’achats publics) propose à partir de ce printemps une solution d’affacturage collaboratif à ses fournisseurs. Toutes les saisines Codefi (Comité départemental d’examen des difficultés de financement des entreprises) pour les entreprises de moins de 400 salariés devront donner lieu à une réponse, a ordonné Christian Eckert. Le secrétaire d’Etat au Budget a aussi annoncé qu’une circulaire avait été envoyée pour améliorer les services de l’Etat mais a encouragé les entreprises à saisir, et « le plus en amont possible », les directions des finances publiques, la médiation du crédit et autres organismes pour obtenir des réponses.
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