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Le Samu du Var s'équipe de gilets pare-balles par crainte d'être «une victime collatérale»

Pour chacune des équipes composées d'un médecin, d'un ambulancier et d'un infirmier, le Samu de Toulon a commandé un jeu de trois gilets. SAMU83

Zone d'attentat, règlement de compte, hospitalisation d'un patient psychiatrique armé. Afin de faire face à ce type d'interventions «sensibles», les personnels du Samu du Var se sont équipés de gilets pare-balles. Une initiative que le président du Samu-Urgences de France ne soutient pas.

Révélée par Var-Matin, l'arrivée de gilets pare-balles au Samu de Toulon a un premier mérite: braquer les projecteurs sur l'agglomération toulonnaise, en proie depuis des mois à des fusillades meurtrières. Dernière en date le 10 septembre, au cours de laquelle deux jeunes hommes sont morts, l'un de 19 ans, ex-footballeur de l'équipe réserve de Saint-Étienne, et l'autre d'à peine 14 ans, tués à la kalachnikov à La Seyne, cité populaire accolée à Toulon. Les enquêteurs ont retrouvé 24 étuis de deux calibres sur les lieux de ce probable règlement de comptes lié au trafic de drogue.

Au Samu de Toulon, on évoque justement «le contexte actuel» pour justifier la commande de ces gilets. «Il s'agit d'une demande des personnels devant la récurrence des situations sensibles», précise le docteur Laurent Bécé, chef de service du Samu du Var. Pour autant, pas question «de les porter au quotidien». «Les gilets sont dans un placard, les équipes les porteront uniquement lors de situations particulières», ajoute-t-il, évoquant les patients agités, violents ou psychiatriques, les interventions en milieu carcéral ou dans les cités. Trois équipes travaillant en journée, le Samu a commandé trois jeux de trois gilets (un pour le médecin, un pour l'ambulancier et un pour l'infirmier).

« Notre rôle n'est pas de soigner les blessés sous les balles, nous ne faisons pas de la médecine de guerre, nous intervenons après l'accord de la police »

Dr François Braun, président de Samu France

La décision, prise à l'unanimité du conseil de surveillance de l'hôpital Sainte-Musse, dont dépend le Samu 83, n'est cependant pas du goût du Dr François Braun, président de Samu France. Il évoque «un mélange des genres». «La sécurité est le travail de la police et non du Samu», conteste-t-il, avant d'enfoncer le clou: «Notre rôle n'est pas de soigner les blessés sous les balles, nous ne faisons pas de la médecine de guerre, nous intervenons après l'accord de la police.» Et dans ce cas, «les équipes du Samu n'ont pas besoin de ces gilets». Et d'estimer: «Ils [les personnels du Samu du Var, NDLR] ont probablement jugé que c'était utile chez eux, mais je pense que ce serait une erreur de le généraliser» ailleurs en France.

Un scénario à la marseillaise

À Toulon, le Dr Bécé admet que «le Samu intervient après les forces de l'ordre et avec leur accord», convenant aussi que, dans ce cas, «la situation est normalement stabilisée». Mais il arriverait toutefois, selon lui, qu'elle «soit encore instable ou qu'elle puisse dégénérer quand nous intervenons». Et de rappeler l'intervention de ses collègues, en 2015, lors d'une affaire qui avait vu, à Toulon, un suspect tuer un douanier, en blesser un autre et tirer dans sa fuite sur un policier. «Le Smur était intervenu alors qu'il y avait encore une fusillade en cours à proximité», plaide-t-il.

« Il faut créer les conditions pour que l'État se donne les moyens d'assumer ses fonctions régaliennes »

Marc Vuillemot, maire de La Seyne

Mélange des genres ou principe de précaution? Une certitude: la situation de l'agglomération s'aggrave et semble suivre un scénario à la marseillaise où les bandes rivales règlent leurs différends de manière expéditive. Au début de l'été, faisant le bilan du premier semestre, Jean-Luc Videlaine, préfet du Var, décomptait «27 usages d'armes à feu, avec deux morts et quatorze blessés», dans l'agglomération toulonnaise. Depuis, trois nouveaux homicides se sont ajoutés, tous à La Seyne dont le premier magistrat, Marc Vuillemot, a été reçu mardi dernier à Matignon. «Si la demande de gilets pare-balles relève des personnels du Samu qui veulent faire leur travail et ont peur, on peut les comprendre. Il y a chez nous des balles qui sifflent, mais ce n'est pas la réponse de fond à apporter. Il faut créer les conditions pour que l'État se donne les moyens d'assumer ses fonctions régaliennes», lance l'élu PS. Un sujet qu'il pourra évoquer avec le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, attendu prochainement dans la rade.

Pour chacune des équipes composées d'un médecin, d'un ambulancier et d'un infirmier, le Samu de Toulon a commandé un jeu de trois gilets.

Le Samu du Var s'équipe de gilets pare-balles par crainte d'être «une victime collatérale»

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185 commentaires
  • elmiguel

    le

    et les casques ? quand la réglementation sur les armes est passée dans les années 1990, les dirigeants politiques savaient que cela allait générer un trafic et un stock d'armes dans les cités pauvres...

  • S.Augustin

    le

    Les territoires perdus de la République s'étendent et cette population qui n'aime pas notre pays s'accroît. Elle s'attaquait aux policiers, encouragée en cela par d'irresponsables saltimbanques, elle agresse à présent pompiers et soignants, démontrant son refus de notre culture et de notre civilisation.

  • restin

    le

    Escalade de la délinquance et de l'insécurité,faillite d'un etat incapable de faire régner l'ordre et qui donne un sentiment d'impunité total dans ces zones de non droit.si quelqu'un du samu est tue on aura droit au "je condamne fermement",puis aux bougies et bouquets de fleurs, puis à la marche blanche puis que ça continue comme avant.

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