Electricité : vers une nouvelle hausse de 3,5 à 4 % des prix au 1er janvier 2020 ?

Contrairement aux promesses du gouvernement, les concurrents d’EDF ne pourront pas acheter plus d’électricité d’origine nucléaire. Au grand dam des consommateurs.

 Les 8 millions de clients des fournisseurs alternatifs, comme les 25 millions d’abonnés aux tarifs régulés d’EDF, sont concernés.
Les 8 millions de clients des fournisseurs alternatifs, comme les 25 millions d’abonnés aux tarifs régulés d’EDF, sont concernés. LP/Yann Foreix

    Entre + 3,5 et + 4 % ! Voici, selon des calculs validés par plusieurs sources, la hausse que les tarifs de l'électricité risquent de subir au 1er janvier 2020. Soit une soixantaine d'euros supplémentaires sur la facture d'un ménage se chauffant à l'électricité. Et une trentaine d'euros pour ceux qui utilisent un autre moyen de chauffage. Cette augmentation est le résultat d'une bataille entre l'Etat, la Commission européenne, EDF et les autres fournisseurs d'électricité. Explications.

    Le 10 septembre, nous dévoilions les dessous d'un accord confidentiel obtenu par la France auprès de la Commission européenne pour obtenir le feu vert sur la scission d'EDF. En échange de la séparation de ses activités de distribution (Enedis) et de production (le nucléaire), EDF verrait le prix de son électricité d'origine nucléaire (Arenh), qu'elle a obligation de vendre à ses concurrents, revalorisée à 45 euros le mégawattheure (MWh), au lieu des 42 euros actuellement. Une mauvaise nouvelle pour les consommateurs. En achetant leur électricité plus chère, les concurrents d'EDF seraient également obligés de relever leurs prix.

    Pour limiter cette hausse, le gouvernement avait promis en contrepartie aux concurrents d'EDF de relever le plafond de l'accès régulé à l'Arenh de 100 à 150 TWh. De quoi leur faire regagner par le volume ce qu'ils auraient perdu par le prix.

    Mais patatras ! L'exécutif a, selon nos informations, l'intention de faire machine arrière. Le prix de l'Arenh pourrait bien rester à son niveau d'aujourd'hui. Mais auquel cas, son plafond demeurera lui aussi identique. Or, dans ce cas, les concurrents d'EDF seront obligés de se rabattre pour leurs achats sur ce qu'on appelle le marché de gros, une sorte de bourse de l'électricité, où les prix sont généralement plus chers. Achetant leur électricité plus chère, ils seront également obligés de la revendre à leurs clients plus chère.

    Le groupe plombé par une dette de 37 milliards d'euros

    L'effet pervers est que les tarifs régulés d'EDF étant eux-mêmes corrélés à ces prix, tout le monde sera au final perdant. Les 8 millions de clients des fournisseurs alternatifs, comme les 25 millions d'abonnés aux tarifs régulés.

    Cette manœuvre permet à EDF d'être gagnante financièrement, en limitant à ses concurrents l'accès à son énergie nucléaire. Mais pourquoi le gouvernement favorise-t-il ainsi l'opérateur historique ? « Il faut absolument sauver le soldat EDF, confie une source proche du dossier. L'entreprise est plombée par une dette nette de 37 milliards d'euros. Et tant pis si ce sont les particuliers qui trinquent. » Après le 20 novembre, date limite pour que les alternatifs puissent déposer leurs demandes d'achats d'Arenh, il sera de toute façon trop tard. Le gouvernement ne sera plus en mesure de prendre l'arrêté lui autorisant à relever ce fameux plafond.

    Déjà 7,13 % de hausse en 2019

    « Le problème, c'est que cette nouvelle augmentation surviendra après déjà deux augmentations successives en 2019, déplore Naima Idir, présidente de l'Anode, une association regroupant des fournisseurs alternatifs. Une première de 5,9 % au mois de juin. Et une autre encore de 1,23 % au mois d'août. »

    Résultat : une augmentation globale de 7,13 %. Soit 180 euros en moyenne pour les ménages se chauffant à l'électricité. Et 90 euros pour les autres. « Compte tenu du climat social actuel, et des revendications autour du pouvoir d'achat, une telle décision serait vécue comme une injustice », estime encore Naima Idir.

    « Une injustice qui coûtera plus de 1,5 milliard d'euros en 2020, affirme Frank Roubanovitch, président de la Clee, association de consommateurs industriels et tertiaires d'électricité. Et qui touchera aussi bien les particuliers que les entreprises. »

    Contacté, Bercy renvoie au ministère de la Transition écologique. Lequel répond qu'aucune décision n'a pour le moment été prise. « Les arbitrages sont encore en cours », précise-t-on dans l'entourage d'Élisabeth Borne. De son côté, EDF n'a pas souhaité faire de commentaire.