Loyers encadrés à Paris : les locataires peu nombreux à contester

 

Loyers encadrés à Paris : les locataires peu nombreux à contester

    Le 1er août 2015, l'encadrement des loyers entrait en vigueur dans la capitale. Six mois plus tard, difficile de dire si la mesure a eu un réel effet sur le prix au m2. Mais force est de constater que très peu de locataires contestent les baux de leurs propriétaires. L'inverse, également possible pour obtenir une réévaluation à la hausse refusée, est encore plus rare. Instance gratuite de recours paritaire, et étape obligatoire avant le tribunal d'instance, la commission départementale de conciliation (CDC) des loyers n'avait été saisie que 28 fois à fin janvier. « C'est plutôt maigre, reconnaît Alex Maudet, représentant de la Confédération nationale du logement 75 à la CDC. Cela s'explique sûrement par la peur des locataires de se voir mettre à la porte à la fin du bail, 3 ou 6 ans plus tard ».

    Même constat à la commission de conciliation où l'on rapporte ce chiffre aux 1 200 saisines qu'elle a enregistré tous objets confondus la commission sur la seule année 2014. « Cela peut vouloir dire aussi que le dispositif de recours n'est pas assez connu » souligne une de ses porte-parole. « Ce qui est frappant, note-t-elle, c'est que la moyenne d'âge de ceux qui nous saisissent est de 25 ans, et on en a observé beaucoup en octobre ou début novembre, après la rentrée universitaire ». Autre constat : la grande majorité des avis rendus l'ont été au bénéfice des locataires.

    Beaucoup contestent les « compléments de loyer » que les propriétaires réclament au nom de « caractéristiques particulières » du logement. Une notion floue prévue par la loi mais pas difficile à définir. « Pour justifier des dépassements, certains propriétaires font valoir la présence d'une cuisine américaine moderne, d'une mezzanine, d'une terrasse ou d'une grande hauteur sous plafond » détaille Jean-Claude Hamelin, représentant de l'association de défense des consommateurs CLCV à la commission.

    Encore rares, les contestations pourraient se multiplier lorsque l'encadrement sera mieux connu. Depuis la fin juin, l'Adil 75 (Association d'information sur le logement) a enregistré plus de 2 500 consultations (aux trois quarts téléphoniques) sur ce sujet et 92 000 connexions sur son site Internet qui y consacre 9 pages. « Il y a un gros besoin d'information, reconnaît sa directrice générale Hélène Le Gall. Et depuis la rentrée, on commence à avoir des appels de locataires sur des litiges ». Alex Maudet est plus dubitatif : « Vu le déséquilibre de l'offre et de la demande à Paris, les locataires retenus se sentent privilégiés, comme s'ils avaient gagné un concours. Il est donc peu probable qu'ils se retournent contre leur propriétaire ».

    Quand un propriétaire veut 550 â?¬ en plus pour une terrasse

    L'encadrement des loyers prévoit qu'en cas de renouvellement de bail, les propriétaires sont tenus de fixer un prix mensuel en fonction d'un loyer de référence, défini quartier par quartier, qu'ils peuvent majorer jusqu'à 20 %. Mais ce plafond peut-être dépassé lorsque le logement présente des « caractéristiques particulières ». Voici deux exemples examinés par la commission de conciliation dernièrement.

    Dans le Marais (IIIe). C'est un bel appartement de 33 m2 meublé avec goût et agrémenté d'une mezzanine pouvant servir de bureau, au cinquième et dernier étage sans ascenseur. Mais son propriétaire n'a pas lésiné sur le loyer qu'il a fixé à 1 990â?¬ soit 555 â?¬ de plus que le plafond autorisé. Motif : dans le prolongement du séjour, une magnifique terrasse de 17 m2 plein sud offre une vue imprenable sur les toits de Paris. La commission de conciliation a tranché en faveur du locataire qui demandait le remboursement du trop perçu depuis août.

    Dans le quartier Faidherbe (XIe). Situé au cinquième étage, ce deux pièces 50 m2 recouvert entièrement d'un beau parquet est orné d'une belle cheminée décorative et d'un balcon filant sur toute la longueur. Deux particularités qui justifient selon son propriétaire un complément de loyer de 145 â?¬ qui porte le loyer à 1 539â?¬. Là encore, la commission de conciliation a tranché en faveur du locataire.

    J.D.