Présidentielle 2017 : le FN veut draguer petits patrons et ouvriers

Face aux doutes persistant sur sa capacité à gérer le pays, Marine Le Pen s'active : son programme économique, cocktail de patriotisme et de libéralisme, est prêt.

Marine Le Pen a planché sur un programme économique crédible et fédérateur, ménageant la ligne étatiste de son numéro deux au FN, Florian Philippot, et les courants plus libéraux du parti.
Marine Le Pen a planché sur un programme économique crédible et fédérateur, ménageant la ligne étatiste de son numéro deux au FN, Florian Philippot, et les courants plus libéraux du parti. (Abaca/Khanh Renaud.)

    Si Marine le Pen a (presque) disparu des radars médiatiques, elle planche en coulisses sur son programme présidentiel. Et particulièrement sur ses mesures économiques, sujet ô combien sensible pour le FN. Selon nos informations, le CAP Eco (commission économique du parti) lui remettra ses nouvelles préconisations demain. Inventaire.

    Une sortie de l'euro, version soft. Attention, la candidate FN version 2017 n'a pas l'intention de faire sa révolution. Les débats qui ont animé le parti après les régionales de décembre — entre les tenants de la ligne étatiste de Florian Philipot et les libéraux à la sauce Marion Maréchal-Le Pen — n'y ont rien changé. « La doctrine reste la même. On s'est juste adaptés aux énormes évolutions depuis cinq ans », explique un de ses lieutenants. Sujet clivant par excellence, la sortie de l'euro reste donc au programme, mais n'en est pas l'alpha et l'oméga.

    La patronne du FN a tiré les enseignements de 2012 et veut rendre cette proposition moins anxiogène en parlant de sortie « concertée », sans « dévaluation » ni grand bouleversement : la nouvelle monnaie nationale coexisterait avec « l'écu », qui serait utilisé pour les échanges intra-européens. Ce retour au franc et à la souveraineté de la Banque de France permettrait selon elle de faire fonctionner à plein la planche à billets. C'est, à ses yeux, la solution miracle : créer de la monnaie, à hauteur de 100 Mds€ par an, pour désendetter la France.

    Les petits patrons, sa nouvelle cible. Lors des dernières campagnes, le Front s'est éloigné de ses fondamentaux pour se poser en défenseur des travailleurs. Stratégie payante, puisque le FN réalise de très bons scores auprès des ouvriers. Marine Le Pen veut désormais s'ouvrir à d'autres horizons électoraux, à commencer par les patrons de PME et TPE. Cajolés dans son programme, ils bénéficieraient d'allégements fiscaux conséquents et d'une priorité donnée aux entreprises locales dans les marchés publics.

    Des propositions sur mesure pour attirer cet électorat traditionnellement de droite, dont elle a besoin dans sa conquête de l'Elysée. Le FN adopte d'ailleurs dans l'ensemble une posture plutôt libérale, très en vogue à droite. A une nuance près : « Nous avons toujours dénoncé l'ultralibéralisme, mais nous sommes de vrais libéraux », décrypte une de ses têtes chercheuses.

    Les banques dans le viseur. Le FN entend décréter « l'état d'urgence bancaire » : les établissements devraient sortir de l'Union bancaire européenne (qui fixe des règles communes aux banques de l'UE) et retrouver leur souveraineté. Comme François Hollande en 2012, Marine Le Pen veut les obliger à séparer leurs activités de détail (pour les particuliers) et d'affaires.

    Travailler plus pour gagner plus. Sur le volet social, elle s'inspire fortement du slogan de Nicolas Sarkozy en 2007. A la différence qu'elle ne fait pas du maintien des 35 heures un incontournable. Les entreprises seraient libres de choisir leur temps de travail. Mais si elles souhaitent revenir aux 39 heures, leurs salariés seront payés en conséquence.

    Pour ne pas grignoter leur compétitivité, ces heures sup seraient intégralement financées par... l'Etat. Comment financer une mesure aussi coûteuse ? « Grâce aux nouvelles recettes générées par des droits de douane restaurés et des économies sur l'immigration », assure un cadre. Autre nouveauté, tous les ménages devraient acquitter l'impôt sur le revenu, même symbolique. « Même à 15 €, on considère que payer l'impôt est une fierté », explique un membre du bureau politique.

    Marine Le Pen va potasser et ajuster ce programme durant l'été. Elle se sait très attendue sur l'économie, elle qui jure que son parti est « en capacité de gérer la France ». Pour que le message passe bien auprès de sa base, une note interne à destination des fédérations et élus est en cours de rédaction. Une sorte, sourit un cadre, de « programme économique de Marine Le Pen pour les nuls ».

    L'Etat pourrait-il financer le retour de certaines entreprises aux 39 heures ?