Contrat de génération : la "belle idée" n'a pas pris

Le principe de ce contrat : soutenir l'emploi des jeunes et des seniors, en favorisant la transmission entre les deux générations.

Source AFP

Peu utilisé, le contrat de génération a dû revoir ses ambitions à la baisse (photo d'illustration).
Peu utilisé, le contrat de génération a dû revoir ses ambitions à la baisse (photo d'illustration). © AFP

Temps de lecture : 3 min

C'était l'engagement numéro 33 du candidat Hollande, sa "belle idée" pour intégrer les jeunes dans l'entreprise tout en y maintenant les seniors : peu utilisé, le contrat de génération a dû revoir ses ambitions à la baisse. Le principe : soutenir l'emploi des jeunes et des seniors, en favorisant la transmission entre les deux générations.

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"L'idée était assez intéressante en théorie", estime Éric Heyer, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : "Jeunes et seniors ont un problème de taux d'emploi, c'était pas mal de lier les deux problèmes." Le contrat de génération est lancé en mars 2013, sous une forme bien plus complexe que le tutorat envisagé au départ. Pour les entreprises de moins de 300 salariés, il donne droit à une aide annuelle de 4 000 euros, pendant 3 ans maximum, pour l'embauche en CDI d'un jeune de moins de 26 ans et le maintien d'un senior de plus de 57 ans. L'aide est doublée si l'entreprise recrute à la fois un jeune et un senior.

"Relativiser les objectifs chiffrés"

Le contrat de génération impose, en outre, aux entreprises de plus de 50 salariés de signer des accords, négociés avec les syndicats, sur l'emploi des seniors et des jeunes. À l'heure des premiers bilans, le compte n'y est pas. Au 20 septembre, 51 768 aides avaient été attribuées en deux ans et demi, bien loin de l'objectif de 75 000 contrats pour la seule année 2013.

"La contrainte d'embaucher en CDI est trop forte. Les entreprises ne sont pas dans cette optique", analyse Eric Heyer. "Cela marche uniquement dans des entreprises qui, de toute manière, auraient embauché un jeune en CDI. On subventionne des emplois qui auraient été créés." Contre cet "effet d'aubaine", le Conseil d'analyse économique (CAE), placé auprès du Premier ministre, préconisait dès avril 2013 de cibler les jeunes embauchés avec un salaire inférieur à 1,6 smic. Il n'a pas été suivi.

Mais selon le ministère du Travail, qui n'envisage pas de remodeler son dispositif, il faut "relativiser les objectifs chiffrés". "Qualitativement, on a de bonnes retombées", fait-on valoir Rue de Grenelle. "Cela a permis de mettre en place dans les entreprises une réflexion sur la gestion des âges, la gestion prévisionnelle des emplois et compétences, les conditions de travail des seniors. De ce point de vue, on ne peut vraiment pas dire que c'est un échec." Ces aspects concernent principalement le volet "accords" du contrat de génération. Au 11 septembre, le ministère comptabilisait 31 accords de branches (3,2 millions de salariés couverts) et 14 907 accords d'entreprises (8,8 millions). Pour combien d'embauches ? La dernière estimation du ministère, qui remonte à juin 2014, comptabilisait 92 000 prévisions d'embauches de jeunes sur 3 ans.

"Sans aide, pas de CDI"

Au-delà des chiffres, "la démarche est positive", juge Jean-Paul Charlez, président de l'association nationale des DRH, qui a négocié un accord chez Etam en 2013 : "Nous avons dû faire un diagnostic sur la pyramide des âges. Cela nous a permis de négocier sur des bases solides et d'aboutir à du concret." Toutefois, le contrat de génération n'a pas bouleversé le marché du travail. Depuis l'élection de François Hollande, le chômage des seniors a grimpé de 28 % au sens de l'Insee, et de 45 % selon Pôle emploi. Quant aux jeunes, leur situation s'est stabilisée, mais le contrat de génération n'y est pour rien, selon Éric Heyer, qui attribue ce répit aux contrats aidés et aux emplois d'avenir.

Une analyse confortée par le service des statistiques du ministère (Dares), qui dessinait en mars le profil des jeunes embauchés en contrat de génération en 2013 : seulement 22 % étaient chômeurs, 48 % travaillaient déjà dans l'entreprise. Normal, selon le ministère. "L'objectif, c'est d'encourager les employeurs à garder des jeunes qu'ils ont pris en CDD, voire en apprentissage. Sans l'aide, ils ne leur auraient probablement pas proposé un CDI." Mais le ministère l'avoue : "On n'a jamais imaginé qu'avec une aide de 4 000 euros par an, on allait créer des nouveaux postes que les employeurs n'auraient pas créés sans l'aide."

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Commentaires (8)

  • Le sanglier de Génolhac

    Aucun mérite. 43 ans et 9 mois exactement dans le monde du travail (le vrai) m'ont appris certaines choses. En tout début de carrière on m'a embauché car les besoins étaient là. Ensuite, l'ancienneté et les responsabilités venues, j'ai embauché QUAND il y avait des besoins. Et des besoins dans le temps, pas une poussée d'activité. Pour ça, il y a les CDD ou l'intérim. Ca coûte plus cher mais c'est bcp + souple. C'est pourquoi quand j'ai lu leur affaire de "contrat de génération", j'ai tout d'abord cru à une blague !... Et pourtant ! Imaginer que des vieux (j'en ai été, à un certain niveau, mais vieux quand même) usés jusqu'à la corde allaient rempiler pour cornaquer des "mains à l'envers" qui n'ont pas plus envie de bosser que moi d'aller chez le dentiste (et pourtant, je ne crains pas le dentiste !). Celui qui a pondu ça peut aller au concours Lépine, il est sur de gagner !

  • hurlevon

    C'est pourtant trivial : toute entreprise (normale, pas étatique ou semi-etatique) répond à des besoins du marché (in fine, nous les consommateurs). Deux cas.
    1. / le marché est porteur, se développe et on embauche et on ne laisse pas partir les seniors (qui de plus adorent "transmettre").
    2. / le marché est en régression et là on gele les embauches de jeunes ou moins jeunes et on favorise le départ des anciens.
    Le cas numéro 3. / n'existe pratiquement pas. Bien évidemment avec les brochettes de conseillers techniques, FH candidat ne pouvait l'ignorer. Mais sa brochette de conseillers en com a su exploiter l'ignorance angélique des électeurs avec cette promesse administrative intellectuellement séduisante (maintenant on dit "élégante") et au premier rasbord rationnelle. Donc de gauche, puisque ces nuls de libéraux n'y avaient même pas pensé !

  • Domi42

    Vous avez tout dit : Qui a pu imaginer un jour que cette idée puisse débaucher sur une baisse du chômage, même Hollande qui l'a ressassé matin et soir au moment des primaires socialistes n'en parle plus, même si au début de son quinquennat elle était encore en première place dans la boite à outils, a coté de ces fameux emplois d'avenir (Qui eux ne coûtent rien puisque c'est l'état qui paie).
    MAis personne dans leurs conseillers leur dit qu'une entreprise, à fortiori une de plus de 300 personnes n'embauchera de CDD pour une petite prime en plus ou une taxe en moins ! Ce contrat n'a servi qu'à donner de l'argent à ceux qui auraient embauché de toute façon.
    Mais certains journalistes se sont émerveillés devant cette idée lumineuse (mais ou va-t-il chercher tout ça, quel génie) et le bon peuple de suivre comme un seul homme, l'essentiel etant de virer Sarko, quitte à couler la France pendant 5 ans