Logement : la loi Alur n'a plus fière allure !

La loi Duflot a paralysé le marché de l'immobilier neuf. Elle a abouti à l'opposé de ses objectifs. Le gouvernement semble résigné à la supprimer.

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Au lieu d'intensifier la construction de logements et de tendre à l'objectif de 500 000 logements mis sur le marché chaque année, les deux années de gestion de Cécile Duflot ont eu l'effet inverse.
Au lieu d'intensifier la construction de logements et de tendre à l'objectif de 500 000 logements mis sur le marché chaque année, les deux années de gestion de Cécile Duflot ont eu l'effet inverse. © JOEL SAGET / AFP

Temps de lecture : 4 min

Plongeon d'un tiers des mises en vente de logements neufs au premier trimestre, disparition de la moitié des investisseurs, destruction de 7 000 emplois du bâtiment attendue en 2014 après les 40 000 déjà perdus... La loi Alur de Cécile Duflot a bel et bien aggravé le retournement du marché de l'immobilier dans l'Hexagone. À tel point qu'avant même sa mise en oeuvre, faute de décret d'application, le gouvernement envisage de la détricoter. Loin d'enrayer la hausse des prix, l'encadrement des loyers, mesure-phare de la loi, a, dès son annonce, suscité un mouvement d'attentisme des acquéreurs, ne sachant pas à quelle sauce ils seraient mangés et à quel niveau de loyer ils pourraient proposer leur bien.

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L'ex-ministre du Logement Cécile Duflot s'était vantée de ne pas être la énième ministre à attacher son nom à une réforme du logement. Puis la passionaria d'Europe Écologie-Les Verts a tout d'abord décidé de confier aux préfets de région la possibilité de diminuer jusqu'à 20 % le plafond de loyer autorisé pour tous les propriétaires désireux de bénéficier de la réduction d'impôt (18 % dans la limite de 300 000 euros répartis sur 9 ans). Mal lui en a pris, les préfets n'avaient pas les observatoires leur permettant de déterminer un prix de référence. La grande majorité n'a pris aucune décision, entretenant ainsi l'incertitude. Prenant tardivement conscience du temps perdu, la ministre a dû prendre ensuite un décret précisant que les plafonds ne bougeraient pas avant 2016. Premier déboire.

Une usine à gaz incompréhensible !

Second acte. Ne renonçant pas à son idée d'enrayer la hausse des loyers, Cécile Duflot crée ensuite une véritable usine à gaz. Le loyer ne pourra dépasser le loyer médian (50 % sont au-dessus, 50 % en dessous) diminué de 20 %. A contrario, les loyers inférieurs de 30 % au loyer de référence pourront être relevés. Un blocage ubuesque qui revient à diminuer les loyers les plus hauts et à augmenter les plus faibles. Le Conseil constitutionnel a même aggravé les choses en refusant la dérogation accordée aux biens exceptionnels (présence d'un jardin, vue sur un monument...) au motif que la notion d'exceptionnel telle que définie par la loi était discriminatoire.

Mais dans un contexte économique plus difficile, où la croissance des loyers ralentit et les charges augmentent, où le délai de vacance s'accroît (neuf semaines en moyenne), les impôts augmentent et l'espoir de plus-values à la revente faiblit, les Français jettent l'éponge. Lorsqu'elle succède à Cécile Duflot, Sylvia Pinel est dans un état d'esprit similaire. Quand elle était ministre déléguée aux PME, au Commerce et à l'Artisanat - son précédent poste -, elle avait proposé d'encadrer les loyers commerciaux. Mais la réalité la rattrape. Finies les expérimentations. Pas question d'amplifier la hausse du chômage en tuant le bâtiment, pourvoyeur d'emplois. Le gouvernement envisage de cantonner l'encadrement à la seule région parisienne et à certaines catégories de biens. Exit donc les grandes métropoles régionales.

La garantie universelle sur les loyers mort-née

Ce n'est pas le premier couac. Cécile Duflot avait dû renoncer à instaurer une garantie universelle sur les loyers (GUL) obligatoire, dont le coût aurait été supporté à parité par le bailleur et le locataire. Et pour la gestion de laquelle la ministre avait un temps envisagé de créer une administration qui, si elle avait été actée, aurait pu coûter à l'État jusqu'à deux milliards d'euros. Devenue facultative, la GUL n'apporte plus rien ou presque par rapport à ce qui existe déjà.

Enfin, la loi Alur, en renforçant encore un peu plus les droits des locataires au détriment de ceux des propriétaires, a effrayé de nombreux bailleurs, qui ont préféré vendre plutôt que de continuer à louer, asséchant ainsi le marché.

Résultat, au lieu d'intensifier la construction de logements et de tendre à l'objectif de 500 000 logements mis sur le marché chaque année, les deux années de gestion de Cécile Duflot ont eu l'effet inverse. Elles ont accru la pénurie. Or, tous les économistes en conviennent : c'est par une politique de l'offre ciblée sur le logement intermédiaire que l'on peut résoudre le déficit chronique de logements en France et peser durablement sur les prix.

Pas si simple

Quatre ans auront été perdus, car, à ces deux ans, il faudra ajouter les dix-huit mois nécessaires pour relancer la construction. Dommage !

Le mal est fait. Il ne suffit pas de décréter que l'on s'est trompé et que l'on ne prendra pas les décrets d'application pour renverser la vapeur. La loi existe. Elle a été votée. Quiconque peut s'en prévaloir. Des associations de locataires, par exemple, peuvent demander au gouvernement de prendre ces décrets et attaquer son refus. Et le Conseil d'État donner l'ordre de les sortir. Le gouvernement n'aurait alors d'autre solution que de faire voter une nouvelle loi.

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Commentaires (170)

  • loooping

    Aujourd’hui la loi ALUR a eu droit a un enterrement de première classe cela après 7 mois de délire kafkaïen.

    il faut noté que cette loi avait augmenté la consommation de papier en effet le président de Century 21, Laurent Vimont, avait calculé que la loi avait ajouté en moyenne 650 grammes de paperasse à chaque promesse de vente, l'équivalent de 30 hectares de forêts par an !

    Finalement les dégâts fait par cette loi absurde, voulue par une ministre irresponsable et jusqu’au-boutiste, seront visible encore pas mal de temps. Pour ma part jamais, plus jamais je n'investirai dans l'immobilier en France.
    Les écologistes et les socialistes aussi pathétiques que stupides, ont détruit le marché de l'immobilier neuf et aussi de la constructions.

    "la" Duflot est triste a voir, la pauvre est " désolée" aprés avoir pavanée en s'étranglant de suffisance en février...
    Monsieur Hollande n'est pas en reste en inventant la girouette républicaine, assurément a ce jeux il est champion du monde !

  • blublu85

    Il y a aussi les propriétaires qui louent des appartements plus que limites puis qui gardent le montant de la caution sous des prétextes fallacieux. Je pouvais payer largement le loyer, mais j'ai perdu 1200€ sans pouvoir me défendre eu égard à mon nouveau domicile éloigné de l’appartement précédent. L'avocat et les procédures m'auraient coûter plus cher que la caution, sans parler des déplacements sur Paris. Le propriétaire le savait bien. Maintenant, il pourra faire "améliorer" son appartement avec ma caution ! Bien joué !

  • Mainecoon

    Une critique tous azimut de l'ancien gouvernement quand ils étaient dans l'opposition, une promesse de campagne d'augmenter la construction de logements de 50%, et un résultat de -38% au bout de 2 ans. Difficile de faire pire. Mais "on continue le redressement". Il n'y a pas d'exemple aussi calamiteux en Europe, c'est donc pour une fois difficile de faire porter le chapeau à Bruxelles.