Brighelli - Programmes du collège : en histoire, une machine à décérébrer

Il n'y a pas de hasard : c'est sur le site de l'officine la plus idéologique, le Café pédagogique, que la fuite a eu lieu. On attendait les programmes, qui circulaient sous le manteau depuis quelques jours, sur un site officiel comme Eduscol. Mais diffuser ces abominations via la plateforme de tous les pédagogismes sonne comme un cocorico : nous sommes au pouvoir et nous faisons ce que nous voulons.

Une histoire pleine de trous

On savait que les apprentis sorciers vomissaient les "programmes Darcos", écrits entre 2007 et 2008, et toujours en place. On n'imaginait pas cependant jusqu'où ils oseraient aller dans la déconstruction des savoirs, et, plus insidieusement, dans la mise en place d'une histoire qui non seulement n'est plus celle de la France, mais instille aussi sournoisement une image du monde qui sert des intérêts partisans. Le vrai choc culturel commencera donc en sixième et cinquième. Qu'on en juge.

Pour que l'on comprenne bien ce qui se trame, il faut regarder de près ce qui est désormais obligatoire (l'étude de l'Islam, par exemple) et ce qui ne l'est plus, laissé à la seule appréciation de l'enseignant, dont personne ne doute qu'après des années de formation dans les défunts IUFM ou les nouveaux Espe, il ne soit d'une objectivité à toute épreuve : en vrac, le haut Moyen Âge, Charles Martel, Clovis ou Charlemagne, la chrétienté médiévale, les guerres de religion et l'humanisme. En sixième, fini, l'Égypte, fini, la Mésopotamie, les royaumes assyriens, Ninive et Babylone. Fini, pyramides et ziggourats. La sixième fait désormais partie d'un cycle commencé à l'école primaire - elle n'est plus du collège proprement dit, c'est du primaire supérieur, l'obsession de certains pédagogues et d'un syndicat, le SE-Unsa, qui rêve d'un corps unique d'enseignants de la maternelle à l'université. Alors, au lieu de fantasmer sur les pharaons, les enfants reverront une fois de plus les hommes préhistoriques. Lucy, les revoilà !

Une pédagogie par objectifs et compétences

Que recherche-t-on dans ce meilleur des mondes ? Que doivent savoir les élèves ? Mauvaises questions : les élèves ne doivent pas savoir, mais savoir faire. Par exemple :

"Produire des messages à l'oral et à l'écrit :

- en respectant les conventions des deux modes ;

- en montrant un raisonnement construit ;

- en utilisant un vocabulaire spécifique, voire des mots et/ou des concepts dans leur langue d'origine, en changeant éventuellement de langage (du texte au croquis, etc.).

Questionner des documents, les présenter et les exploiter."

Sans oublier, évidemment, la panacée informatique : "Identifier les ressources numériques utilisées et vérifier leur pertinence et leur crédibilité. Trouver et sélectionner des informations dans des ressources numériques."

En clair, savoir faire des copiés-collés sur Wikipédia. C'est bien suffisant, n'est-ce pas ? Ah, et quand nous n'aurons plus Wikipédia sous la main ? Eh bien, vous ne saurez rien.

On vient d'interdire la dissection des grenouilles en cours de SVT. C'était effectivement inutile : les batraciens décérébrés seront assis désormais sur les bancs de l'école.

C'est cela, et pas autre chose, le collège voulu par Najat Vallaud-Belkacem. Ah, vous trouviez que vos enfants ne savaient plus situer la bataille de Marignan sur une continuité historique ! Ou qu'ils croyaient que 1515 était la date de la première pierre de l'aéroport de Marignane...