Marx peut-il nous aider à comprendre notre époque ?

Karl Marx, un penseur pour aujourd'hui ?  ©AFP - Patrik STOLLARZ
Karl Marx, un penseur pour aujourd'hui ? ©AFP - Patrik STOLLARZ
Karl Marx, un penseur pour aujourd'hui ? ©AFP - Patrik STOLLARZ
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Dans la revue de la semaine, il est question de transmission de mémoire en Nouvelle-Calédonie, 30 ans après les événements d'Ouvéa, des confessions de Régis Debray et de la postérité de la pensée de Karl Marx

En Nouvelle Calédonie on commémore aujourd'hui un anniversaire tragique.. 

Le journal Le Monde consacre dans son édition d’aujourd’hui deux pleines pages à la Nouvelle-Calédonie et aux résonances, 30 ans après, des « évènements » d’Ouvéa. Pour rappel donc l’assaut par l’armée et la gendarmerie de la grotte de Gossanah, ce 5 mai 1988. 19 indépendantistes et deux militaires y trouvèrent la mort. 

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Le journal nous raconte le long chemin de la réconciliation entrepris par les familles. En 1998 notamment une rencontre est organisée entre les gendarmes et les habitants de l’ile. Un processus qui va durer plusieurs années entre libération de la parole et cérémonies du pardon selon la coutume locale. 

Mediapart nous propose aussi un reportage à Ouvéa et nous raconte une autre cérémonie celle de la reconstitution, chaque année de l’assaut de la grotte, par des enfants. Une sorte de théâtre mémoriel. Le premier a eu lien en 1989 et certains des enfants avaient perdu leur père dans la grotte. « Nous ne créons pas de violence témoigne un habitant, nous ne faisons que transmettre la vérité, c’est un moyen pour nous d’évacuer le traumatisme ».

Mais cette façon de transmettre l’histoire ne fait pas consensus à Ouvéa. "J’ai peur que les jeunes puissent mal interpréter l’histoire témoigne une Maman. J’ai peur qu’on crée du ressentiment".

Les jeunes des tribus quant à eux raconte Mediapart, se tiennent à l’écart des commémorations. "On en a assez du passé et du traumatisme, disent-ils, on aimerait bien passer à autre chose". 

Dans la presse cette semaine vous avez relevé ces confessions d’un homme qui a renoncé à peser sur le destin du monde.. 

C’est homme c’est Régis Debray qui s’est confié à L'Expresscette semaine, à l'occasion de la parution de son dernier livre, Bilan de faillite (Gallimard). Réflexions d'un homme désabusé, certes, mais qui n'a rien perdu de de son acuité mordante et de son sens de la formule. 

Régis Debray se présente comme le témoin d'un changement de civilisation. "Le passage, je cite, de la France-République à la France-Entreprise. D'une nation tribunitienne et méditéranéenne à une province transatlantique et semi-anglophone". 

"Ce n'est pas un jugement de valeur" explique-t-il, c'est le constat d'une inaptitude personnelle à se rendre utile dans ce nouveau monde.

Dans ce livre qui est une adresse à son fils de 16 ans, il lui recommande de s'éloigner de l'idéologie comme de la politique. Et pourtant sur la politique la laïcité, l’Europe, la République, Régis Debray a encore des choses à dire.

Un regard sans concession sur le monde et sur lui-même qui fait réfléchir. 

On termine avec un homme qui n'a pas renoncé à changer le monde et dont la pensée continue de nous hanter..

Karl Marx peut-il nous aider à comprendre notre époque ? C’est l’une des questions posée par Alternatives Economiques dans un petit trimestriel publié à part. Ca s’appelle « Marx l’incontournable ». Une centaine de pages que je vous conseille si vous voulez vous rafraîchir la mémoire sur les notions de baisse tendancielle du taux de profit ou de matérialisme historique.

Et il y a surtout cette question de la postérité de Karl Marx, « déclaré plusieurs fois mort et toujours ressuscité » peut-on lire en préambule.

Théoricien des crises financières, penseur de l’inégalité des échanges dans la mondialisation et précurseur peut-être de l’écologie.. puisque Marx théorise un capitalisme voué à épuiser toutes les ressources. C’est ce que nous explique économiste Michel Husson dans l’une des contributions.

On trouve aussi dans ce dossier des analyses plus circonspectes. Jean-Marc Daniel, économiste libéral, rappelle que le capitalisme « ne meurt pas de ses crises » comme l’avait prédit Marx. "Il en profite au contraire pour se régénérer". 

L’ AFP propose aussi  une synthèse intéressante de ce débat sur l’utilité de Marx au XXIe siècle.. On peut y lire Thomas Piketty pour qui la réflexion de Marx a surtout un intérêt historique. L’erreur c’est de l’avoir considéré à un moment comme un prophète et sa théorie comme un modèle explique-t-il.

Pour Yanis Varoufakis, l'ancien premier ministre grec, au contraire, qui lit Marx sera surpris d’y découvrir l’image d’un monde qui ressemble beaucoup au notre. 

Pour terminer on peut lire encore dans Le Point un entretien avec le philosophe Etienne Balibar, qui se dit "surpris de voir à quel point Marx irrigue la pensée postcoloniale sur les interférences de la race, de la classe et de la culture. Mais aussi sur tout ce que l’on peut appeler le planétaire aujourd’hui un autre nom peut-être de l’internationalisme".

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