Tribune. Punir la criminalité environnementale n’est pas une idée nouvelle. Il existe déjà diverses incriminations pour le délinquant qui déverse dans l’eau des substances nuisibles, dépose en plein champ ses déchets dangereux ou les exporte sous des cieux juridiquement plus cléments. Mais face à l’urgence environnementale, la criminalité locale ou organisée en réseaux internationaux, illustrant par son ampleur l’échec des normes pénales existantes, n’est plus acceptable.
Si la délinquance prospère en matière environnementale, c’est que la règle est inefficace, inappliquée, inexistante. Réagir en développant un droit visant à vraiment punir la criminalité environnementale n’est ni socialement risqué, ni techniquement complexe. Le travail de réflexion et de conception a été fait : en 2015, un groupe de juristes, sous la direction de Laurent Neyret, a publié 35 propositions pour mieux sanctionner les crimes contre l’environnement (Des Ecocrimes à l’écocide. Le droit pénal au secours de l’environnement, Bruylant, 2015). Il suffit au pouvoir politique d’y puiser l’inspiration.
A l’échelon international, c’est l’écocide qu’il faut inscrire dans le droit et punir. L’écocide est un crime grave, portant atteinte à la sûreté de la planète : une catastrophe majeure engendrant une pollution massive, des prélèvements de spécimens sauvages entraînant la disparition d’une espèce. La France pourrait proposer à ses partenaires internationaux l’élaboration d’un traité fixant le cadre nécessaire pour la répression du crime d’écocide : définir ces agissements, imposer une responsabilité pénale, donner les critères de détermination des peines, organiser la coopération des Etats.
Les autorités françaises pourraient aussi s’engager en faveur d’une réforme du statut de la Cour pénale internationale, convaincre d’inscrire l’écocide au côté des autres crimes pouvant être poursuivis. Plusieurs actions citoyennes comme End Ecocide militent à cette fin. L’avis rendu le 18 avril 2017 par le Tribunal international Monsanto (tribunal citoyen) est aussi favorable à cette consécration internationale du crime d’écocide : s’il existait, les activités de cette entreprise pourraient relever de cette infraction.
Technicité et méconnaissance
Au sein de l’Union européenne, l’action française porterait sur une réforme de la directive de 2008 sur la protection de l’environnement. A l’époque, cette directive n’a pu que définir des actes à incriminer, renvoyant aux Etats membres le soin de les inscrire dans leur droit pénal et de fixer les sanctions. Désormais, le Parlement européen et le Conseil peuvent établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière.
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