Climat : un tiers des villes hôtes des JO d'hiver ne pourraient plus les accueillir

Climat : un tiers des villes hôtes des JO d'hiver ne pourraient plus les accueillir
Pendant la cérémonie d'ouverture, à Pyeongchang. (JUNG YEON-JE / AFP)

L'avenir des jeux Olympiques d'hiver semble menacé par le climat et la baisse de la pratique des sports d'hiver dans de nombreux pays.

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De par leur nature, les jeux Olympiques d'hiver n'ont jamais vraiment pu prétendre au destin mondialisé de leurs homologues estivaux. Organisés dans 13 pays différents (contre 19 pour les JO d'été), ils n'ont jamais vu l'hémisphère sud (contre trois éditions en été). A Pyeongchang, ils n'accueillent cette année "que" 92 nations, contre 206 pour les derniers JO de Rio en 2016.

Logiquement, ce manque de représentativité influe aussi sur la réussite sportive : à l'exception de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, toutes les médailles depuis 1924 sont revenues à des athlètes nord-américains, européens ou nord-asiatiques. Par rapport à leur nombre d'habitants, des pays comme la Norvège (n°1), l'Autriche (n°6), la Suède (n°7), la Suisse (n°8) ou la Finlande (n°10) sont nettement surreprésentés au classement historique des médailles d'or. A fortiori, et malgré l'impact culturel d'une comédie comme "Rasta Rocket", aucun athlète issu d'un pays tropical n'a jamais remporté la moindre médaille à des JO d'hiver.

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Les pays ayant accueilli les JO d'hiver (en vert : une fois / en bleu : plusieurs fois) ( CC BY-SA 3.0)

Et le réchauffement climatique galopant, particulièrement dans les zones froides, pourrait encore aggraver la situation. Certes, ce n'est pas en Corée du Sud que le changement est pour l'heure le plus prégnant : on attend jusqu'à -12°C sur les pistes de Pyeongchang ce week-end - presque trop froid. Une situation qui masque la réalité des JO d'hiver de ces 20 dernières années : neige artificielle, réfrigération des patinoires et des pistes de bobsleigh... Les quatre dernières éditions (Salt Lake City, Turin, Vancouver et Sotchi) ont été disputées sous une température moyenne de... 7,8 degrés. 

Les 500 canons à neige des jeux de Sotchi en Russie, il y a quatre ans, en avaient été la piteuse illustration, rendant les conditions de certaines épreuves très inconfortables voire dangereuses pour les athlètes, avec un mercure grimpant jusqu'à 16°C. En 2010 déjà, face aux pistes largement fondues de Vancouver au Canada, le président du CIO Jacques Rogge reconnaissait que "le réchauffement climatique pourrait, sur le long terme, affecter l'organisation des Jeux d'hiver, et serait définitivement un facteur à prendre en compte dans la préparation des JO". 

Chamonix et Grenoble doivent oublier les JO

Notamment repérée par le site spécialisé "Francs Jeux", une étude canadienne récemment mise à jour, conduite à l'Université de Waterloo par le géographe Daniel Scott, souligne cette dramatique évolution : sur les 21 villes ayant été désignées pour accueillir les Jeux d'hiver, plus d'un tiers ne pourront bientôt plus connaître des températures assez basses pour voir des compétitions de ski en plein air.

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C'est le cas de Sotchi et de Vancouver, mais aussi de Garmisch-Partenkirchen en Allemagne. Pour deux des trois villes françaises à avoir déjà accueilli les JO d'hiver, Grenoble et Chamonix, la perspective de revoir un jour cette compétition s'éloigne à grands pas : dès 2050, les conditions climatiques la rendront "impossible". 

Possibilité d'accueillir une édition des JO à échéance 2050 et 2080 en fonction du réchauffement climatique pour les sites des précédents JO d'hiver (AFP).

A l'horizon 2080, et selon un scénario raisonnablement pessimiste, 13 des 21 villes concernées seraient considérées comme "à risques" pour la bonne tenue de jeux Olympiques d'hiver en extérieur. Faudra-t-il alors songer à des compétitions indoor, comme envisagé un temps, pour des raisons diamétralement opposées, pour la Coupe du monde de football 2022 au Qatar ?

Au-delà du grand spectacle olympique, c'est la culture des sports d'hiver elle-même qui semble menacée à moyen terme. La "Climate Coalition" britannique, qui rassemble plus de 130 ONG, a publié mercredi une étude sur les impacts du changement climatique sur les pratiques et compétitions sportives. Celle-ci rappelle que les températures hivernales moyennes dans les Alpes ont déjà augmenté de près de 2°C depuis 1900, soit près du double du réchauffement moyen observé au niveau mondial, et pourraient encore augmenter de 2 à 4°C d’ici la fin du siècle, avec à la clé un effondrement de la couverture neigeuse : entre 70% et 100% en dessous de 1.500 m d’altitude. Dans de nombreuses stations de sport d'hiver d'Europe et d'Amérique du Nord, la durée de la saison de ski pourrait être réduite de moitié d'ici à 2050. 

En février 2017, une étude comparable avait été menée par des chercheurs suisses de l’Institut de recherche sur la neige et les avalanches (SLF) et de l’école polytechnique de Lausanne. Elle montrait qu'à l'horizon de la fin du siècle, la pratique des sports d'hiver ne serait probablement plus garantie en dessous de 2.500 mètres d’altitude... soit au-dessus de la plus haute station de ski d'Europe, Val-Thorens (2.300 m).

T.V.

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