"La neutralité du Net aux États-Unis pourrait influencer l’Europe", avance Jérémie Zimmermann de la Quadrature du Net

Le cofondateur de la Quadrature du Net se réjouit de la décision de la FCC en faveur de la neutralité du Net, qu’il qualifie de victoire citoyenne. Pour lui, elle pourrait influencer l’Europe, même si la situation est plus complexe sur le Vieux Continent, où les services gérés des opérateurs sont déjà des discriminations qui ne disent pas leur nom.

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La Federal Communications Commission (FCC) qui régule les télécommunications aux États-Unis va désormais interdire aux opérateurs de bloquer ou de ralentir le trafic ou de conclure des contrats accordant des accès prioritaires à certains fournisseurs de contenus. Pour Jérémie Zimmermann, cofondateur du collectif citoyen la Quadrature du Net qui décrypte toutes les régulations concernant Internet qui ont un impact sur les citoyens européens, cette décision en faveur d’une stricte neutralité du Net est une véritable bonne nouvelle. D’abord parce que c’est, selon lui, une victoire citoyenne face aux lobbies des télécoms, ensuite parce que cela pourrait influencer le Parlement européen qui lui aussi doit s’exprimer sur le sujet en mai prochain dans le cadre du règlement sur un marché numérique européen unique.

Une victoire des citoyens américains

Jérémie Zimmermann insiste ainsi sur le fait que la décision de la FCC est une victoire citoyenne gagnée de haute lutte, après de longs mois. "Même Barack Obama est intervenu en nommant le lobbyiste en chef de Comcast (câblo-opérateur américain, NDLR) à la tête de la commission. Mais c’est un mouvement citoyen lourd qui les a fait plier. " Jusqu’au point d’orgue qu’il évoque : le présentateur vedette du Last week tonight show de la chaîne HBO, John Oliver a raillé le gouvernement et expliqué avec force plaisanteries le danger contre la neutralité que cette nomination représentait. Puis, il a lancé un appel aux trolls, qui a résulté dans l’envoi de plus 45 000 messages à la FCC et a provoqué le blocage du système de commentaires de cette dernière. Pour le cofondateur de la Quadrature du Net, la décision du 26 février pourrait ainsi influencer l’Europe en faveur d’une neutralité du net aussi stricte.

Les services gérés, des discriminations qui ne disent pas leur nom

Même si, sur le Vieux Continent, la situation est un peu plus complexe. "Aux États-Unis, précise Jérémie Zimmermann, l’accès à internet est moins en avance qu’en Europe dans le sens où les utilisateurs ont plutôt à faire à un seul opérateur, cher, et pas très bon. Ils sont très loin de nos accès triple ou quadruple play, avec un point central d’accès pour différents services que nous avons." Les utilisateurs français, habitués de ces services, distinguent ainsi difficilement l’accès au téléphone, à la télévision ou à Internet. " Et favoriser Google ou Netflix quand on parle d’un simple accès Internet, c’est de la discrimination, point. Quand on est dans un triple ou quadruple play, c’est moins évident. "

Selon Jérémie Zimmermann, le débat européen qui partait de la stricte notion de ne pas restreindre l’accès des utilisateurs à Internet, s’est ainsi désormais déplacé. "Les opérateurs ont fait évoluer leur tactique. Aujourd’hui, leur but c’est d’essayer de faire payer un Google pour la part de bande passante dont il a besoin. Ces priorisations d’un service, y compris sous le nom de services gérés que les opérateurs appellent de leurs vœux, sont simplement des discriminations qui taisent leur nom." Dans un document adressé au parlement fin 2014, la Quadrature du Net rappelait d’ailleurs ce qu’elle entend par neutralité : "Nous avons besoin de règles européennes claires qui interdisent tout type de discrimination du réseau comme le blocage, le ralentissement ou la discrimination par le prix."

La définition européenne de la Neutralité du net remise en cause

Jérémie Zimmermann déplore une situation qu’il juge plutôt ironique. "Car en Europe, nous sommes déjà allés plus loin dans la définition de la neutralité dans le paquet télécom que ce que viennent de faire les États-Unis. Mais on en a l’habitude, quand un vote est ainsi favorable aux citoyens, on entre dans une négociation totalement opaque. Et aujourd’hui, on voit déjà apparaître des brouillons de positions, notamment en Grande-Bretagne et en Allemagne, qui feraient faire disparaître cette définition de la neutralité du net."

Emmanuelle Delsol

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