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Athènes organise sa faillite

Si le pays évite la sortie de route incontrôlée, il n'est pas à l'abri de nouveaux soubresauts.

Par , et Clément Lacombe et Alain Salles (à Athènes)

Publié le 09 mars 2012 à 10h56, modifié le 13 mars 2012 à 11h50

Temps de Lecture 4 min.

Evangélos Vénizélos a démissionné lundi pour diriger les troupes socialistes dans la campagne électorale.

La Grèce est en train d'achever la plus grande restructuration de dette de l'histoire d'un pays. Elle évite la sortie de route incontrôlée mais doit néanmoins finir d'organiser sa propre faillite. Certes, 83,5 % des créanciers privés de la Grèce ont accepté d'abandonner 53,5 % de leurs titres, a indiqué Athènes, vendredi 9 mars au matin. Mais le gouvernement grec a décidé d'utiliser la force – et de contraindre les prêteurs récalcitrants à prendre leurs pertes.

L'opération doit permettre d'effacer la moitié des 206 milliards d'euros d'emprunts du pays souscrits par les banques, assureurs et autres fonds. Et contribuer à ramener à 120,5 % du produit intérieur brut la dette hellène en 2020, contre 160 % aujourd'hui. Un niveau très élevé, qui ne met pas le pays à l'abri.

Le spectre d'une faillite désordonnée de la Grèce est ainsi écarté. Mais le gouvernement n'en a pas moins décidé de demander le déclenchement des clauses d'actions collectives (CAC), des mesures assorties aux obligations de droit grec – la très grande majorité des emprunts d'Athènes – et contraignant les créanciers récalcitrants à se joindre à la restructuration.

Ces mesures devraient permettre de porter à 95,7 % le taux de participation et d'effacer environ 105 milliards d'euros de la dette hellène, aujourd'hui de 360 milliards d'euros. Vendredi après-midi, le ministre des finances Evangelos Venizélos devait présenter ces résultats lors d'une téléconférence des ministres des finances de la zone euro.

"On a évité le principal risque, un défaut désordonné de la Grèce, juge Christian Parisot, économiste chez Aurel BGC. Le vrai succès aurait toutefois été de ne pas passer par l'activation des CAC. Avec elles, c'est un vrai défaut officiel." "Les CAC sont une nécessité politique et économique, estime de son côté Gilles Moec, chez Deutsche Bank. Il fallait aller au bout de ce qui était possible en termes de soulagement sur le niveau global de la dette grecque."

L'ISDA, l'association des utilisateurs de produits financiers dérivés, devait se réunir vendredi après-midi pour décider si cette procédure constitue, selon le jargon des financiers, un "événement de crédit". Si elle répondait oui, comme la plupart des observateurs s'y attendent, cela déclencherait le paiement des CDS (Credit Default Swap), ces produits financiers permettant de s'assurer contre la faillite d'un créancier, et constituerait un précédent dans la zone euro.Une issue que la Grèce et les Européens ont cherché pendant des mois à éviter avant d'en minorer les risques ces derniers temps.

"RÉFORMES STRUCTURELLES"

"En août dernier, quand la tension était extrême, un événement de crédit aurait eu un lourd impact sur les marchés. On a gagné du temps, c'est ce qui compte sur les marchés, où l'événement de crédit était désormais anticipé", explique M.Parisot.

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Quoi qu'il en soit, l'opération est un succès pour le gouvernement grec, dont le niveau de confiance parmi les Européens était tombé au plus bas. Le gouvernement a conduit avec efficacité ces négociations, ce qui lui permettra de corriger en partie les jugements sur les promesses non tenues, qui ont conduit la "troïka" des bailleurs de fonds – Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international – à durcir ses exigences.

M. Venizélos a expliqué que le gouvernement n'entendait pas relâcher ses efforts et qu'il voulait "mettre en œuvre les mesures nécessaires pour réussir les ajustements budgétaires et les réformes structurelles, auxquelles il s'était engagé". C'est un succès personnel pour M. Venizélos qui a porté les négociations depuis plusieurs mois, au moment où il s'apprête à briguer la tête du parti socialiste grec, le Pasok.

Malgré tout, la Grèce n'est pas sortie d'affaire. La restructuration de la dette et le second plan d'aide de 130 milliards d'euros des bailleurs de fonds internationaux du pays doit en théorie lui permettre de ramener sa dette publique de 160 % du produit intérieur brut aujourd'hui à 120,5 % à l'horizon 2015. Mais certains doutent que cette trajectoire soit tenue.

"Le cas grec est loin d'être terminé. Le retour du pays à la croissance, le contrôle des déficits publics et les réformes du pays sont encore devant nous, notent les analystes de CM-CIC Securities. Nous considérons toujours qu'en l'état, la Grèce n'est pas en mesure de tenir ses objectifs et de ramener son niveau d'endettement à 120 % d'ici 2020. Il sera très difficile d'éviter un nouveau plan d'aide pour la Grèce." L'hebdomadaire allemand Der Spiegel rapportait dernièrement que la "troïka" estime que la Grèce pourrait avoir besoin d'un troisième plan d'aide de 50 milliards d'euros en 2015, faute de pouvoir revenir sur les marchés.

La voie est d'autant plus étroite que le peuple grec ne cesse d'afficher un désarroi de plus en plus profond face aux mesures d'austérité à répétition. M. Venizélos a d'ailleurs remercié vendredi les créanciers privés d'"avoir partagé les sacrifices du peuple grec dans cet effort historique". La veille de nouveaux chiffres du chômage étaient tombés : en décembre 2011, 21 % de la population était sans emploi, contre 10,2 % deux ans plus tôt, un taux qui grimpe à 51,1 % chez les moins de 24 ans.

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