De Londres à Rome en passant par Berlin et Paris, les taxis protestent, mercredi 11 juin, contre la concurrence des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC), et en particulier celle faite par la société américaine Uber, qui cristallise toutes leurs craintes.
Le mouvement de protestation est parti du Royaume-Uni où les célèbres taxis noirs, qui travaillent pourtant à côté des VTC depuis des dizaines d'années, s'inquiètent du poids croissant pris par la société californienne. Leur crainte est partagée par leurs collègues d'autres pays, qui ont décidé de les suivre et de lancer un mouvement de grève européen, une première.
« Uber ne respecte pas de manière délibérée les réglementations en vigueur et il dispose en plus de moyens très importants » avec une valorisation de 17 milliards de dollars (12,6 milliards d'euros), résume Serge Metz, PDG de la centrale française de radio-taxi Taxi G7.
LES MOUVEMENTS EN EUROPE
En France : les fédérations patronales sont à la pointe de la contestation de mercredi. Une partie de leurs adhérents s'est rassemblée à partir de 6 heures aux abords des aéroports d'Orly et de Roissy, près de Paris, avant de converger en début de matinée vers la capitale. Le risque de pagaille routière dans la ville et sa périphérie est d'autant plus grand que la manifestation est concomitante d'un autre mouvement de grève, à la SNCF. Les autres villes les plus touchées devraient être Lyon, Marseille et Nice, selon les fédérations de taxis.
A Rome : les chauffeurs font une « grève à l'envers » en effectuant les courses au prix maximal de 10 euros, afin de s'aligner sur les tarifs de la concurrence. Ceux de Milan seront en grève de de 8 heures à 22 heures.
En Allemagne : des cortèges étaient prévus à Berlin et à Hambourg.
LES SYNDICATS FRANÇAIS DIVISÉS
Toutefois, la majorité des syndicats « se désolidarise de ce mouvement et n'appelle pas à manifester », a déclaré Karim Asnoun de la CGT. L'intersyndicale avait pourtant été à l'origine d'une série d'actions menées en début d'année pour protester contre le développement des VTC. « Nous n'appelons pas à cette grève, les centres radio veulent récupérer ce mouvement du 11 juin », fait valoir Nordine Dahmane, secrétaire général de FO-UNCP-Taxis, pour expliquer cette décision.
Un rapport commandé par le gouvernement et présenté fin avril devait permettre d'apaiser les relations entre taxis et VTC. Mais les tensions restent vives alors qu'une proposition de loi devrait être déposée la semaine prochaine. Ce rapport « va dans la bonne direction, mais il s'est arrêté en chemin », juge Yann Ricordel, directeur général de la société de radio-taxi Les Taxis bleus.
Pour lui, il faut veiller à « établir un niveau de charges équivalent entre les taxis et les VTC », ces derniers en payant moins, et régler la question du stationnement des VTC sur la voie publique dans l'attente de clients, ce qu'ils n'ont en théorie pas le droit de faire. Prendre des clients à la volée relève en effet du privilège des taxis, qui disposent pour cela d'une licence, quand les VTC ne peuvent travailler que sur réservation.
Yann Ricordel s'inquiète aussi de la volonté de permettre en temps réel la géolocalisation des taxis. Pour l'auteur du rapport, le député Thomas Thévenoud, il s'agit de permettre aux clients de localiser le taxi disponible le plus proche grâce à son smartphone. Mais les centrales de taxis voient cette mesure comme une menace.
De leur côté, les VTC s'agacent d'une nouvelle grève des taxis. « L'inquiétude des taxis est compréhensible », estime Yan Hascoet, PDG de la société Chauffeur privé, qui rejette toutefois tout amalgame entre « les nouvelles sociétés de VTC qui opèrent dans le plus parfait respect de la loi et celles qui s'en affranchissent librement ». Pour Dave Ashton, cofondateur de Snapcar, elle est d'autant plus incompréhensible au niveau français que « le rapport Thévenoud est favorable aux taxis ».
Lire le post de blog : Les douze choses que vous ne savez pas sur les taxis
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