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Paris tient ses états généraux de la nuit

La Mairie de Paris organise, vendredi et samedi, ses premiers états généraux de la nuit parisienne. Son objectif : renouer le dialogue entre noctambules et riverains aspirant à plus de tranquillité.

Le Monde avec AFP et Reuters

Publié le 12 novembre 2010 à 11h28, modifié le 12 novembre 2010 à 20h17

Temps de Lecture 4 min.

La façade de l'Hôtel de Ville de Paris illuminée à l'occasion de la 2e Nuit blanche de Paris, en 2003.

La Ville lumière est-elle devenue une belle endormie ? Oui, selon un grand nombre de noctambules qui assurent que Paris est devenue la capitale du sommeil, loin de Londres, de Barcelone ou de Berlin, devenus le cœur européen de la fête et de la vie nocturne. Interpellée l'an dernier par le collectif Quand la nuit meurt en silence, la Mairie de Paris inaugure, vendredi et samedi, les premiers états généraux de la nuit. Ils réunissent, jusqu'à samedi à l'hôtel de ville, sociologues, élus, professionnels de la nuit et responsables de quartiers en tables rondes, en lien avec la préfecture de police et la région Ile-de-France. L'occasion d'engager le débat sur le fonctionnement en bonne intelligence d'une ville, la nuit.

"Paris est une ville pleine de contradictions où tout le monde est à la fois du jour et de la nuit. C'est une ville qui a des choses à dire et à faire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, a déclaré Bertrand Delanoë, à l'ouverture du rendez-vous. Les Parisiens sont exigeants et parfois capricieux : le soir où on ne sort pas, on ne veut plus de bruit en bas de chez soi à 20 heures, avec couvre-feu de préférence. Mais, le soir où on veut sortir, il faut qu'il puisse y avoir du bruit jusqu'à 5 heures du matin ! […] Il faut prendre prendre au sérieux l'ensemble des demandes : le besoin de tranquillité, mais aussi de fête."

ORGANISER LE "VIVRE-ENSEMBLE"

"Il ne s'agit pas d'opposer les légitimités les unes aux autres. Il s'agit d'organiser le 'vivre-ensemble' de ces différentes nuits", explique Mao Peninou, adjoint au maire de Paris, chargé du bureau des temps, et maître d'œuvre de ces premiers états généraux. "Longtemps, la nuit a été simplement le temps du repos social. Aujourd'hui, nous sommes dans la société du temps continu. Les conflits entre la ville qui dort, celle qui s'amuse et celle qui travaille, risquent de se multiplier si aucune véritable réflexion n'est menée pour penser la ville dans sa globalité", expose le géographe Luc Gwiazdzinski.

A Paris, plus de 45 % des Parisiens travaillent encore après 20 heures. 25 % d'entre eux travaillent toute la nuit, sans compter la clientèle des entreprises de nuit (théâtres, cinémas, bars, restaurants, discothèques...). La capitale compte environ 200 night-clubs et 850 établissements ouverts après 2 heures du matin. "Sur les cinquante dernières années, c'est une augmentation assez forte", reconnaît Mao Peninou, qui met aussi en avant les transformations liées aux mesures contre la voiture (trottoirs élargis, rues rendues aux piétons, aménagements de places, de berges, etc.). "Ça a des conséquences positives sur la vie de quartier mais négatives en termes de nuisances", note-t-il.

De Bastille à Oberkampf, des Champs-Elysées à Saint-Germain-des-Prés, de Pigalle à la Butte-aux-Cailles, la crispation se fait sentir dès la nuit tombée. Bars, clubs et restaurants vivent au rythme des plaintes déposées par les riverains excédés par le bruit de clients jetés sur le trottoir par l'interdiction de fumer dans les lieux publics, effective depuis janvier 2008. La préfecture note toutefois une baisse des infractions pour tapage nocturne dans les débits de boisson, dont le nombre est passé de 122 sur les huit premiers mois de 2008 à 115 sur la même période en 2009 et 95 en 2010.

DES CLOWNS SILENCIEUX SUR LES TROTTOIRS, ET DAVANTAGE D'ISOLATION PHONIQUE

Le réseau Vivre Paris, qui entend veiller au respect de la tranquillité des Parisiens, participera au débat. Selon ce regroupement d'associations, la qualité de vie des habitants de Paris ne doit être pas "sacrifiée au profit d'intérêts qui ne sont pas forcément d'utilité publique". L'opposition municipale s'est déclarée favorable à un accompagnement financier de la Ville de Paris en faveur des propriétaires d'établissement dans la mise en œuvre des travaux d'isolation phonique de leurs locaux.Une des premières mesures annoncées par Bertrand Delanoë à l'ouverture des états généraux va dans ce sens : Paris et la région subventionneront des travaux d'insonorisation dans les bars musicaux, très à la mode, "des petits établissements à l'économie fragile et qui ne peuvent investir seuls", selon le président de la Chambre syndicale des cabarets et discothèques.

Jean-François Lamour, président du groupe UMP au conseil de Paris, suggère également que "la Ville de Paris se dote d'espaces dévolus aux activités culturelles et festives nocturnes au sein de zones inhabitées". Il reste évidemment à trouver des zones inhabitées au sein de la capitale. L'exécutif parisien planche également sur la création de commissions de conciliation par arrondissement "de manière à avoir une sorte d'expertise permettant de rendre les choses plus objectives en cas de plainte", poursuit Mao Peninou.

Autre dispositif annoncé par Bertrand Delanoë, qui sera testé à partir du printemps : le recours à des mimes et des clowns pour exhorter les fêtards à baisser d'un ton aux abords des établissements de nuit. Une idée qui a déjà fait ses preuves à Barcelone, selon Mao Penino : "Il s'agira de performances artistiques silencieuses en faisant passer le message avec humour, […] une manière de faire de la médiation sans doute plus adaptée à des gens qui sont en train de faire la fête" ou de fumer sur les trottoirs des bars. L'adjoint au maire précise que le financement de l'expérimentation associera la Ville de Paris, les professionnels de la nuit et éventuellement la région Ile-de-France.

La mairie de Paris suggère enfin l'ouverture tardive d'un certain nombre de lieux publics : parcs, jardins, lieux d'expositions culturelles pourraient, sur le modèle de la Nuit blanche organisée chaque année, animer régulièrement les nuits parisiennes. "Certains lieux éphémères, lorsqu'ils sont en période d'inactivité, pourraient être provisoirement investis, imagine Mao Peninou. Ensuite, hors de la capitale, dans le cadre de Paris-métropole, nous encouragerons l'implantation de nouveaux lieux de fête." L'activité nocture crée "du lien social", rappelle l'adjoint au maire : "Un bar de nuit qui s'ouvre dans un quartier périphérique, c'est de la vie et de la sécurité pour les riverains."

Le Monde avec AFP et Reuters

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