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Les multiples rebondissements de l'affaire Ferrand

Richard Ferrand le 23 janvier 2018. PHILIPPE LOPEZ/AFP

Le candidat à la présidence de l'Assemblée est toujours visé par une enquête sur le bien immobilier acquis par sa compagne et loué aux Mutuelles de Bretagne, dont il était alors le directeur général. Le Figaro fait le point sur l'affaire.

Non, «l'affaire Ferrand», aussi appelée «affaire des Mutuelles de Bretagne», n'est pas terminée. Après être passé entre les mains du parquet de Brest, puis par le pôle financier de Paris, le dossier va finalement atterrir sur le bureau d'un juge d'instruction de Lille, selon un arrêt de la Cour de cassation en date du 25 juillet dont France Inter se fait l'écho et que Le Figaro a pu consulter. À l'origine de ce nouveau rebondissement? Une demande des avocats de Richard Ferrand et de sa compagne, tous deux visés par une plainte d'Anticor.

Pour comprendre ce nouvel épisode, retour sur une affaire aux multiples rebondissements.

Épisode 1: Le début l'affaire Ferrand

Tout commence le 24 mai 2017, lorsque le Canard Enchaîné met en cause celui qui est alors ministre de la Cohésion des territoires pour des tractations immobilières datant de 2011. L'hebdomadaire satirique explique que les Mutuelles de Bretagne, dirigées par Richard Ferrand à l'époque, recherchaient des locaux commerciaux à Brest pour ouvrir un centre de soins et que l'organisme sans but lucratif a opté parmi trois propositions pour une société civile immobilière (SCI) appartenant à la compagne de Richard Ferrand, Sandrine Doucen.

La promesse de location avait permis à cette avocate de profession d'obtenir un prêt bancaire équivalent à la totalité du prix de ces locaux en mauvais état. Outre une rénovation complète des locaux pour 184.000 euros à la charge de la mutuelle, la valeur des parts de la SCI «a été multipliée par 3.000» en six ans, révélait alors Le Canard enchaîné. En clair, Richard Ferrand est soupçonné d'avoir favorisé sa compagne pour que celle-ci puisse acheter un bien immobilier grâce aux loyers versés par les Mutuelles de Bretagne, dont il assurait la direction.

Épisode 2: Ouverture d'une enquête préliminaire, première plainte d'Anticor

Accusé de mélange des genres, le ministre fraîchement nommé se retrouve sous le feu des critiques. À gauche comme à droite, on réclame sa démission. Lui se défend, assure être «un homme honnête» et refuse de quitter son poste. Dans un premier temps, la justice n'ouvre aucune enquête. L'association Anticor, elle, dépose une plainte pour abus de confiance et finalement, le procureur de la République de Brest ouvre une enquête préliminaire le 31 mai. Le 19 juin, Richard Ferrand qui vient d'être réélu député du Finistère quitte le gouvernement et devient dans la foulée patron du groupe LREM à l'Assemblée.

Épisode 3: Le parquet de Brest classe l'affaire

Après trois mois d'enquête, le 13 octobre 2017, le parquet de Brest classe l'enquête sans suite. Dans son communiqué, le procureur n'écarte pas la possibilité qu'il y ait eu prise illégale d'intérêt mais indique que les faits - qui datent de 2010-2012 - sont prescrits. De plus, «les infractions d'abus de confiance et d'escroquerie» ne sont, elles, «pas constituées, faute d'un préjudice avéré», justifiait le procureur Jean-Philippe Récappé.

Épisode 4: Une seconde plainte déposée par Anticor

De son côté, l'association Anticor n'est pas d'accord avec cette analyse. Notamment sur la prescription des faits, qui, selon elle, ne doit courir qu'à partir du 24 mai 2017, date de la révélation de l'affaire par Le Canard enchaîné. Elle décide donc de déposer une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du pôle financier de Paris, Renaud Van Ruymbeke, pour prise illégale d'intérêt et recel. L'objectif: obtenir la désignation - quasi-automatique - d'un magistrat pour enquêter sur l'affaire.

Épisode 5: Le pôle financier de Paris s'empare du dossier

À la suite de la plainte d'Anticor, le juge d'instruction du pôle financier de Paris, Renaud Van Ruymbeke, ouvre le 12 janvier 2018 une information judiciaire pour «prise illégale d'intérêts», recel et complicité de ce délit. Une décision qui satisfait l'association de lutte contre la corruption. «C'est une bonne nouvelle pour deux raisons: d'abord, car le parquet national financier (PNF) a rendu des conclusions différentes du parquet de Brest, et ensuite, car l'enquête sera pilotée par un magistrat indépendant».

Épisode 6: La défense réclame le dépaysement de l'affaire

En mars, les avocats de Richard Ferrand et de sa compagne, Me Philippe Bazire, Me Georges Holleaux et Me Frédéric Thiriez écrivent à la procureure générale de la cour d'appel pour l'avertir d'un possible «conflit d'intérêts judiciaire» de la part de l'association Anticor. La défense s'inquiète de la présence dans le dossier d'Éric Alt, vice-président d'Anticor et auditionné en tant que partie civile fin février, car ce dernier est aussi magistrat au tribunal de grande instance de Paris. Dès lors, pense la défense, il pourrait user de sa position professionnelle pour peser dans la procédure, ce qui constituerait un conflit d'intérêts.

Épisode 7: La cour d'appel de Paris donne raison à la défense, l'affaire part à Lille

La procureure générale est d'accord pour que le pôle financier soit dessaisi et saisit la Cour de cassation le 30 mars, selon France Inter. Le 25 juillet, la plus haute juridiction confirme le dépaysement de l'affaire, à Lille, «dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice». L'avocat d'Anticor y voit une «manœuvre» de la défense: «c'est M. Van Ruymbeke, particulièrement diligent et vigilant sur ce type d'affaire, qui allait instruire ce dossier, et on a trouvé assez simple de faire dépayser pour un motif à mon sens totalement infondé», a réagi Me Jérôme Karsenti auprès de France Inter. C'est donc à Lille que le dossier des «Mutuelles de Bretagne» sera désormais instruit.

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260 commentaires
  • CLAUDE FERRIER 1

    le

    Quel Que soit les décisions de la justice, il est condamnable sur le plan de la morale et de l’honnêteté : lorsque l’on dirige une entreprise on veille à ce que l’entreprise ne passe aucun contrat avec sa famille.
    Dommage que les députés du nouveau monde le désigne comme président de l’assemblée

  • JJ37

    le

    Ce serait une grave erreur !
    Erreur pour l'image de la France, l'image du Président et l'image de l'Assemblée Nationale.
    Pourquoi prendre un tel risque ?
    Pourquoi favoriser un éventuel tricheur ?

  • Marie21520

    le

    Si Ferrand va au perchoir , ce sera une preuve de plus de la façon qu’a Macron de placer ses copains. ah la république en marche irréprochable !!!!!

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