A l’Assemblée, le grand embouteillage des réformes

Après un ralentissement dû à la crise des Gilets jaunes et au débat national, le rythme des réformes examinées au parlement va fortement s’accélérer dans les prochains mois. L’exécutif va devoir faire des choix.

 Près d’une dizaine de textes, et pas des moindres, sont en gestation.
Près d’une dizaine de textes, et pas des moindres, sont en gestation. LP/Olivier Corsan

    Lors de la dernière réunion du groupe LREM à l'Assemblée, mardi dernier, le Premier ministre aurait presque jeté un froid. « En substance, il nous a dit qu'on allait beaucoup travailler cet été. Cela nous a fait rire jaune », rapporte un participant…

    La crise des Gilets jaunes, le grand débat national et la campagne des européennes avaient singulièrement ralenti le rythme des réformes. Mais les prochains mois s'annoncent particulièrement denses pour la majorité. « Il va y avoir un sacré embouteillage », s'inquiète déjà un collaborateur ministériel.

    Car l'exécutif y tient dur comme fer : l'acte II du quinquennat doit commencer sur les chapeaux de roues. Près d'une dizaine de textes, et pas des moindres, sont en gestation. Entre ceux déjà prévus comme la retraite, l'assurance chômage – qui pourrait toutefois passer sous forme réglementaire pour l'essentiel –, la bioéthique (qui contient le projet sur la PMA) ou la réforme institutionnelle, et les petits nouveaux nés à l'issue du grand débat comme la baisse de l'Impôt sur le revenu, le toilettage de la loi NOTre (avec à la clé le statut de l'élu, la décentralisation…), le texte climat énergie, sans compter d'autres gros morceaux comme le chantier de la dépendance. Bref, le programme est ultra-chargé.

    A finir d'abord, l'École, la Santé, la fonction publique...

    D'autant que le parlement affiche déjà complet jusqu'à la pause estivale : « C'est hyper-dense jusqu'à la fin de la session fin juillet. On doit encore terminer d'examiner l'École, la Santé, la fonction publique ou la loi mobilité… » constate-t-on au ministère des Relations avec le Parlement. À tel point que la feuille de route fixée par Matignon - mettre en œuvre toutes ces nouvelles réformes d'ici neuf mois, soit juste avant les municipales - paraît bien difficile à tenir. « Tout ce qu'on a mis sur la table représente 15 mois de travail », concède un proche du Premier ministre.

    Et la rentrée ne sera pas exactement dégagée à l'Assemblée : « Entre septembre et décembre, avec l'examen du budget, il n'y aura pas suffisamment de temps parlementaire pour examiner toutes les réformes. Nous pourrons en examiner une, voire deux peut-être. Et ce sont de très, très gros textes qui arrivent. Je ne vois pas comment on finira tout ça avant les municipales », anticipe un conseiller ministériel.

    Il va donc falloir faire des choix, et, comme le résume Matignon, « prioriser » les réformes. Édouard Philippe s'y est d'ores et déjà attelé avec le président de l'Assemblée, Richard Ferrand, et celui du Sénat, Gérard Larcher. Il devrait rendre son verdict, après avoir obtenu le feu vert d'Emmanuel Macron, lors de son discours de politique général le 12 juin.

    «On ne veut pas refaire une Manif pour Tous»

    Une certitude : « On rentre dans une séquence très écologique et sociale », précise l'entourage du Premier ministre. La loi climat énergie devrait donc rester en tête des priorités, tout comme la réforme constitutionnelle qui devrait passer en Conseil des ministres avant l'été.

    Certains au sein du gouvernement s'interrogent en revanche sur la nécessité de s'attaquer dès maintenant à la loi Bioéthique et son explosif volet sur la PMA. « On ne veut pas refaire une Manif pour Tous. Avec ce genre de texte, on peut vite devenir impopulaire. Est-ce qu'on ne prend pas un risque avec ça avant les municipales ? », s'alarme un collaborateur gouvernemental. À charge pour le Premier ministre d'évaluer la portée politique des réformes à venir… Pas si simple.