Etude Discovery sur le coronavirus : 5 minutes pour comprendre un fiasco annoncé

Ces tests devaient évaluer l’effet de plusieurs traitements à l’échelle européenne. Les spécialistes sont désormais très pessimistes sur leur capacité à donner des résultats.

 Les essais Discovery doivent tester l’efficacité de quatre traitements, dont le fameux hydroxychloroquine.
Les essais Discovery doivent tester l’efficacité de quatre traitements, dont le fameux hydroxychloroquine. AFP/Narinder Nanu

    En début de semaine, Emmanuel Macron promettait encore des résultats d'ici « le 14 mai » pour l'étude Discovery. Mené en Europe sous l'égide de l'Inserm et du consortium REACTing, cet ensemble d'essais cliniques vise à tester quatre traitements potentiels contre le coronavirus, dont le fameux hydroxychloroquine, dans différents pays européens.

    Pourtant, près de deux mois après l'annonce de son lancement, plusieurs spécialistes semblent résignés, parlant d'« échec » ou même de « fiasco ». Accusant trop de retard, ce qui s'apparentait à la plus ambitieuse recherche de traitement en Europe pourrait ne jamais donner de résultats.

    Où en sont les tests ?

    En France, plus de 700 patients atteints de forme grave du Covid-19 ont été intégrés aux essais cliniques. Pas loin, donc, de l'objectif final de 800 patients. C'est à l'échelle européenne que les choses se compliquent. Car l'étude devait porter sur 3200 malades soignés dans différents pays partenaires. Or, à ce jour, seul le Luxembourg a apporté une contribution avec… un seul patient intégré aux essais.

    Comment expliquer ce décalage entre les différents pays ?

    Il semble que ce soit les lourdeurs administratives liées au lancement d'une telle étude qui soient à l'origine du retard pris par nos voisins. « Il faut un accord du comité d'éthique national, un accord du ministère de la Santé, et ensuite il faut que la logistique suive… », énumérait récemment Thérèse Staub, cheffe du service des maladies infectieuses du centre hospitalier du Luxembourg, sur France 5. Des discussions seraient ainsi toujours en cours Allemagne, en Autriche ou au Portugal.

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    D'autres pays ont par ailleurs décidé de faire faux bond à la France et de privilégier d'autres études, parfois moins coûteuses ou contraignantes. L'Espagne et l'Italie ont par exemple choisi de rejoindre l'essai Solidarity, lancé par l'Organisation mondiale de la santé. « Chaque pays a travaillé pour lui, et on a beaucoup de mal à coopérer », résume dans Le Monde l'infectiologue Yazdan Yazdanpanah, à la tête du consortium Reacting, constatant un « échec ».

    Pourquoi n'en tire-t-on pas tout de même de premières conclusions ?

    Les essais Discovery doivent tester quatre traitements : l'hydroxychloroquine, donc, mais aussi le remdesivir, développé contre le virus Ebola, le Kaletra et enfin l'association du Kaletra et de l'interféron bêta-1a, une protéine qui agit notamment sur la sclérose en plaques.

    Les malades intégrés à l'étude doivent donc être séparés en quatre groupes, auxquels il faut ajouter un groupe de contrôle, traité sans médicament, de manière classique avec de l'oxygène. « 740 patients vont être insuffisants, a priori, […] pour pouvoir montrer une différence significative entre ces différents bras de traitement », calculait vendredi Olivier Bouchaud, chef du service des maladies infectieuses à l'hôpital Avicenne (Seine-Saint-Denis), sur BFM TV.

    Ce retard est-il irrattrapable ?

    Avec la résorption de la pandémie liée aux mesures de confinement prononcées un peu partout en Europe, le nombre de patients hospitalisés dans les hôpitaux diminue drastiquement. Et, avec lui, le nombre de candidats potentiels pour les différentes études d'efficacité des traitements, dont Discovery.

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    « On n'a pas assez de patients », constatait, toujours sur France 5, Maya Hites, professeure du service des maladies infectieuses de l'hôpital Erasme, à Bruxelles.

    Seule une deuxième vague de l'épidémie, redoutée par certains professionnels de la santé en raison de la levée progressive du confinement, permettrait vraisemblablement de relancer des essais cliniques de grande ampleur. Et d'avancer enfin sur l'efficacité des quatre traitements testés par Discovery.