TVA : 32 milliards partis en fumée !

Selon la Commission européenne, en France, le manque à gagner dans la perception de la TVA ne cesse d'augmenter. Un rapport contesté par Bercy.

De notre correspondant à Bruxelles,

Selon le rapport, une trop grande complexité, la fraude et l'optimisation fiscale expliquent le manque à gagner.
Selon le rapport, une trop grande complexité, la fraude et l'optimisation fiscale expliquent le manque à gagner. © Sipa

Temps de lecture : 3 min

32 milliards d'euros ! C'est l'ampleur du trou dans les recettes de la TVA en France. Une enveloppe qui représente un quart du montant que la TVA devrait rapporter à l'État, alors que cette taxe constitue le premier poste de recettes, loin devant l'impôt sur le revenu. L'information provient d'un rapport que la Commission européenne a commandé et qui sera publié en fin de semaine. Le chiffre a commencé à circuler à Bruxelles en début de semaine. Rapporté par Le Monde, précisant les informations du site EurActiv, il est confirmé de bonne source au Point.fr. Il fait de notre pays le vice-champion de cette spécialité, la première place du podium pour les principales économies de l'UE revenant à l'EurActiv.

La newsletter Économie

Tous les jeudis à 17h

Recevez le meilleur de l’actualité économique.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Le phénomène ne touche pas que la France, et le rapport de la Commission concerne l'ensemble des pays. Au total, dans l'Union, ces pertes sur les recettes de TVA atteindraient 193 milliards d'euros, soit 1,5 % du produit intérieur brut européen. Mais ce sont les plus grands pays qui sont les plus concernés : l'Allemagne (27 milliards d'euros), la France (32), le Royaume-Uni (19,5) et l'Italie (36) représentent à eux quatre la moitié du manque à gagner. Plus préoccupant, ces montants sont en hausse constante. Selon une première enquête de 2009, le trou pour la France se montait à 9 milliards. 11 milliards dans l'étude suivante parue en 2011. 32 milliards aujourd'hui.

Un rapport contesté

À Bruxelles, on explique cette aggravation du phénomène par plusieurs facteurs : la crise économique et les faillites d'entreprises qui ne peuvent plus payer leur TVA ou qui en profitent pour échapper à la TVA ; des "erreurs statistiques, entre les prévisions de rentrée de TVA du ministère des Finances et la réalité" ; il y a aussi la fameuse optimisation fiscale : une société délocalise son siège dans un pays où le taux de TVA est réduit, le Luxembourg par exemple ; enfin, il y a la fraude, simple ou organisée, qui consiste notamment à faire tourner fictivement des produits achetés hors taxes et revendus avec TVA dans plusieurs pays d'Europe. Un carrousel (c'est le nom de cette véritable arnaque) qui concernerait les secteurs de l'automobile, de l'électronique ou des matières premières. Le phénomène étant répandu en Europe, la Commission européenne a récemment lancé plusieurs initiatives pour améliorer la transparence sur la TVA et mieux lutter contre les carrousels. Elle a aussi demandé à plusieurs pays de renforcer leurs organes de contrôle. En France, c'est la douane judiciaire qui s'en occupe. Mais elle est en sous-effectif.

La France conteste ce rapport, notamment la méthodologie. Pourtant, un tel manque à gagner a bien été mesuré par la Cour des comptes, certes dans des proportions beaucoup moins importantes. Dans son rapport sur les perspectives des finances publiques en juin 2013, l'organe s'étonnait d'un trou de quatre milliards par rapport aux prévisions, non imputable à la seule crise économique. Il pourrait y avoir eu, selon elle, un report de la consommation sur des produits taxés aux taux intermédiaires de TVA. Sur ce point, la Cour des comptes rejoint une recommandation de la Commission rapportée par Le Monde : "Plutôt que des taux trop élevés, et de multiples exemptions, il vaut mieux élargir la base de prélèvement de la TVA", préconise Bruxelles. Les récentes mesures de relèvement du taux principal et du taux moyen, tandis que le taux minimum baisse légèrement, n'iraient donc pas dans le bon sens (20 au lieu de 19,6 %, 10 au lieu de 7 % et 5 au lieu de 5,5 %).

Prévisions trop optimistes

Quoi qu'il en soit, dans son avertissement, le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, mettait en garde contre les prévisions de recettes du gouvernement. En 2012, le gouvernement avait surestimé les entrées de TVA de quatre milliards et celles de l'impôt sur les sociétés d'un milliard. En 2013, il y a de nouveau très peu de chances que ses prévisions de rentrées fiscales soient tenues : "La Cour a identifié des risques sur le produit des recettes qui peuvent représenter, dans l'hypothèse élevée, jusqu'à six milliards d'euros, soit 0,3 point de PIB."

La semaine dernière, le gouvernement a d'ailleurs reconnu que ses objectifs de réduction du déficit ne seraient pas tenus, malgré une croissance conforme à ses prévisions ! Le trou budgétaire va déraper de 3,7 à 4,1 %, notamment à cause de ce manque à gagner.

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaires (39)

  • Mr. Michu

    Lisez donc Libération, dans sa livraison du 4 septembre qui titrait " Classement de Davos : la France à la traîne, et alors ? " et traitait de façon insignifiante le recul de notre pays de la 22ème à la 23ème place, alors que l'Allemagne trône à la 4ème.
    Ce classement, selon le journal, ne serait pas à prendre au sérieux car vicié dans son approche économique...
    Encore un peu et l'on entendra bientôt, comme naguère, de jeunes énarques distingués pour tenter de nous faire croire que l'importance de notre dette n'est qu'une notion relativement insignifiante dans le flux mondial des valeurs et que, somme toute, la France est et restera un pays riche parmi les riches...
    Décidément, le socialisme est impayable ! Enfin...

  • Edward60

    Il me semble étonnant que des spécialistes souvent hyper-diplômés ne sachent pas compter. Je subodore davantage des Enarques plus soucieux de faire de belles prévisions plutôt que des prévisions réalisables, ou alors il faut trouver un coupable : l'an dernier c'était à cause de SARKOZY, mais cette année ? Celle à pas de chance ?
    Et dire que tous les aspects et autres postes ministériels sont identiques, comment croire que des Français aient pu se laisser berner à ce point surtout après une expérience avec F. MITTERRAND !

  • atropos

    Ce n'était pas des professeurs qu'il fallait embaucher, mais des inspecteurs en tous genres pour traquer les tricheurs.
    La paresse et la veulerie de nos dirigeants qui connaissent la situation, font qu'ils préfèrent matraquer les petites gens que s'attaquer à des systèmes tel que le carrousel qui est connu et dénoncé depuis des années ;
    Si j'étais au pouvoir et asphyxié par les dettes, ces 5 milliards me feraient saliver... Et il n'y a pas que le carrousel puisque l'on nous parle ici de 32 milliards sans compter les petits malins qui savent légalement échapper à l'impôt, les tricheurs aux allocations sociales, à la carte vitale etc. Etc.
    Si l'état luttait véritabelment contre ces fléaux, il pourrait baisser les impôts et la dette...
    Pourquoi ne le fait-il pas ?
    Mystère et boule de gomme...