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Travailleurs indépendants : El Khomri veut faire payer les plate-formes Internet

La ministre du Travail veut que les sites collaboratifs participent à « la protection » des indépendants qu’ils font travailler, mais Bercy y est opposé. Elle veut « encadrer juridiquement » le statut de ces nouveaux types d’actifs.

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La ministre du travail, Myriam El Khomri veut plus de protection et un statut juridique sécurisé pour les travailleurs indépendants.

Par Marie Bellan, Derek Perrotte

Publié le 6 janv. 2016 à 19:16

Comment assurer et financer la protection des travailleurs indépendants à l’heure où la révolution numérique contribue à multiplier leur nombre tout en bouleversant l’organisation du travail et les modes de production ? En pleine « uberisation » de l’économie, la question est au cœur des réflexions gouvernementales, du ministère du Travail à celui des Affaires sociales en passant par Bercy. Dans l’attente, d’ici mi-février, du rapport dédié commandé au député socialiste Pascal Terrasse, le ministère du Travail peut nourrir ses réflexions des pistes avancées par un autre rapport, remis mercredi par le Conseil national du numérique (CNNum).

Eviter complexité et effets de seuils

Ce dernier juge urgent de « clarifier la situation » des indépendants travaillant via des plates-formes collaboratives (chauffeur Uber, livreur Deliveroo, etc.) en reliant la notion de salariat non plus à la seule aune de la subordination juridique mais à celle de « dépendance économique ». « On ne peut pas se contenter de leur donner le RSI, très peu protecteur, sinon on va produire une génération de précaires », estime Benoît Thieulin, président du CNNum. Celui-ci met en garde contre la création d’un nouveau statut de travailleur indépendant à côté de celui d’autoentrepreneur, ce qui créerait selon lui de la complexité et des effets de seuils.

Il ne livre pas de solution clef en main mais préconise de passer par des « évolutions du droit commun » et affirme aux « Echos » qu’ « à un moment, il faut obliger la plate-forme à contribuer à la protection de ces travailleurs. »

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Financer des formations

L’idée a retenu toute l'attention de la ministre du Travail, Myriam El Khomri. « Quand il y a un lien de dépendance économique des travailleurs indépendants, il est légitime de se demander si la plate-forme n’a pas la responsabilité sociale de participer à leur protection, par exemple en finançant des formations », a-t-elle réagi lors de la remise du rapport. C’est aussi une option défendue par le président de l'Union des autoentrepreneurs, François Hurel, qui milite pour une cotisation partagée entre travailleur et site collaboratif pour alimenter par exemple un fonds de garantie en cas de cessation brutale d’activité pour l’auto-entrepreneur.

A Bercy, la réflexion est déjà engagée depuis de nombreuses semaines sur les travailleurs indépendants et la façon de rendre ce statut plus souple. S’il y a bien un sujet de protection sociale qui se pose, les équipes de Bercy penchent, quant à elles, pour un système d’options qui induirait de nouvelles cotisations pour le travailleur lui-même, mais pas pour la plate-forme. La relation entre les deux acteurs étant d’ordre commercial, entre un sous-traitant et un donneur d’ordre, il n’y a pas lieu de réfléchir en termes de relations de travail, fait-on valoir au ministère de l’Economie.

« Encadrer juridiquement »

Pour cette même raison, Bercy écarte aussi la création d’un nouveau statut de travailleur indépendant qui serait dépendant économiquement. S’il faut corriger cette dépendance, argue-t-on à Bercy, c’est vers le Code de commerce qu’il faut se tourner, et pas vers le Code du travail. La jurisprudence commerciale qui prévoit des indemnisations en pareil cas est déjà bien établie et abondante.

Myriam El Khomri a en tout cas promis que le projet de loi qu’elle prépare pour mars s’attacherait à « encadrer juridiquement » le statut de ces travailleurs : « Je ne veux pas partir dans des années de contentieux juridiques pour savoir s’ils doivent être requalifiés en salariés. »

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