Le Venezuela est décidément à la peine. Les gigantesques coupures de courant qui touchent le pays représentent un coup dur pour une économie déjà au bord du gouffre, paralysant son industrie pétrolière et entraînant des pertes de 200 millions de dollars par jour, selon des experts. Aucun secteur n'est épargné par les méga-pannes d'électricité qui ont frappé ces dernières semaines le pays, du 7 au 14 mars, puis à nouveau depuis lundi après-midi. "A chaque journée de panne généralisée (...) nous avons des pertes qui avoisinent les 200 millions de dollars", déclare à l'AFP Carlos Larrazabal, le président de la Fédération des chambres de commerce et de production (Fedecamaras).

Dans une économie dévastée par cinq années de récession, où l'inflation est hors de contrôle - 10 millions pour cent projetés par le FMI en 2019 -, les conséquences du manque de courant sont dévastatrices. Dans ce pays de 30 millions d'habitants, les entreprises alimentaires sont en première ligne. "Les plus grandes pertes concernent les secteurs qui dépendent de la chaîne du froid, depuis le commerce de détail, jusqu'aux fabricants et producteurs, en passant par les grossistes et les distributeurs", explique M. Larrazabal. Selon les représentants de différents secteurs et le Parlement, seule institution contrôlée par l'opposition, la panne de début mars a entraîné des pertes d'un milliard de dollars, soit plus de 1% du PIB de 2018.Plus de deux millions de kilos de viande et cinq millions de litres de lait ont été perdus, selon les producteurs, alors que les Vénézuéliens souffrent d'une pénurie de nourriture et de médicaments.

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"C'est vraiment inquiétant que l'on vive cette situation de façon régulière", met en garde Maria Carolina Uzcategui, présidente du Conseil national du commerce et des services (Consecomercio). L'absence de courant paralyse les terminaux de paiements et la population a le plus grand mal à effectuer la moindre opération et à se ravitailler. Au Venezuela, même le pain s'achète avec une carte bancaire, faute de liquidités. Seules les personnes en possession de dollars réussissent à se tirer d'affaire.

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Le pétrole menacé

L'industrie pétrolière, qui fournit 96% des revenus de l'Etat vénézuélien, est également fragilisée dans un pays qui possède les plus grandes réserves au monde. Selon l'expert Luis Oliveros, la production de brut vénézuélien est réduite à zéro au plus fort des coupures de courant. Ce peut être "le début d'un cycle de profondes détérioration" pour le secteur, déclare-t-il à l'AFP. PDVSA, l'entreprise publique pétrolière, n'a pas fourni de bilan après la première panne, mais, selon M. Oliveros, les conséquences pour certaines installations peuvent être "irréversibles". La production de brut vénézuélien a commencé sa descente aux enfers en février de l'année passée, stagnant juste au-dessus du million de barils par jour, selon des sources proches de l'OPEP. Il y a dix ans, les exportations atteignaient 3,2 millions de barils/jour.

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Le volume pourrait chuter à 500.000 cette année, selon un rapport de la banque britannique Barclays. A partir du 28 avril, les citoyens et entreprises nord-américains seront interdits de vendre ou d'acheter le brut vénézuélien : ceci représente 75% de la trésorerie de PDVSA, selon les experts. L'administration du président américain Donald Trump a gelé les fonds et les actifs de PDVSA aux Etats-Unis et ceux de CITGO, sa filiale, confiant leur contrôle au leader de l'opposition Juan Guaido, reconnu comme président intérimaire par une cinquantaine de pays. Dès la fin 2017, Washington avait interdit à ses ressortissants et à ses entreprises de négocier de nouvelles obligations de la dette du pays et de PDVSA, soit environ 150 milliards de dollars.

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Dans les villes plongées dans le noir, les risques de pillages augmentent, comme ce fut le cas à Maracaibo (nord-ouest) durant la première panne. Dans cette ville considérée comme la capitale pétrolière du Venezuela, pas mois de 500 commerces ont été mis à sac, selon Consecomercio. Ces craintes, conjuguées au problèmes de la chaîne du froid, font baisser les commandes de produits des commerçants : elles ont été divisées par deux pour ce qui est de la viande, du lait ou des légumes, d'après Fedecamaras.

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