Le plan chaudière du gouvernement, lancé en début d’année, serait-il déjà victime de son succès ? On peut décemment le penser, alors que l’Agence nationale de l’habitat (Anah) vient d’annoncer l’abaissement des plafonds de dépenses subventionnables au titre du programme Habiter Mieux Agilité, qui accompagne les ménages modestes dans la rénovation énergétique de leur logement. Jusqu’ici fixé à 20.000 euros, pour un taux de subvention maximal de 50%, le seuil des dépenses qu’il est possible de financer avec cette aide est passé ce jeudi 10 octobre à 8.000 euros, conformément à une décision du conseil d’administration de l’agence publique. Un second plafond a également été créé pour les installations de chaudières à gaz, fixé celui-ci à 2.400 euros.

Le seuil de 8.000 euros correspond au plafond de dépenses prévu dans la réforme du crédit d'impôt de transition énergétique (Cite), qui fusionnera justement avec les aides du programme Habiter Mieux Agilité, en janvier 2020. Si elle reconnaît que cette décision a en partie été prise pour anticiper cette refonte des aides, Valérie Mancret-Taylor, la directrice générale de l’Anah, avance toutefois une autre raison à ce coup de rabot. “Début 2019, nous avons été sollicités pour le montage du Plan chaudière, via la mobilisation des aides de l’Anah, afin de compléter les coups de pouces économies énergie des CEE (les Certificats d’Économie d’Énergie, ndlr) et ainsi réduire au maximum le reste à charge des ménages, dans le cadre d’un remplacement de chaudière, explique-t-elle à Capital. A la suite de quoi nous avons constaté une inflation des prix sur certains équipements, du fait de l’augmentation des aides publiques. C’est pourquoi nous avons décidé d’abaisser les plafonds de dépenses subventionnables”.

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Contenir l’envolée des prix

En abaissant ce seuil, l’Anah réduit mécaniquement le montant des aides qu’elle versera jusqu’à la fin de l’année, avant la refonte du Cite. De fait, il est désormais possible d’obtenir une aide maximale de 4.000 euros pour ses travaux (1.200 euros pour une chaudière gaz), contre 10.000 euros par le passé. Mais l’agence avance que cette modification lui permettra surtout de contenir l’envolée des prix des équipements qui, selon ses services, ont dans certains cas bondi de près de 20%, depuis le deuxième semestre. “Les aides étant calculée sur un taux de remboursement du coût des travaux, lorsqu’un équipement prend 20%, le montant des subventions augmente d’autant, tonne la directrice de l’Anah. Or, les aides publiques n’ont pas vocation à suivre l’inflation des prix du privé”. L’Anah assure aujourd’hui que si le prix des équipements redevient “raisonnable”, cette décision permettra de maintenir les offres packagées de chaudière à 1 euro.

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D’aucun parmi les délégataires de CEE s’inquiètent pourtant de l’abaissement des plafonds de l’Anah. “Le Plan chaudière a visiblement été victime de son succès, analyse Audrey Zermati, directrice de la stratégie du groupe Effy. Cette décision va permettre à l’Anah de limiter le coût de ses aides face à l’inflation des prix. Mais elle va contraindre les acteurs privés à augmenter leurs primes CEE, pour maintenir un reste à charge minimum pour les ménages”.

110 millions d’euros d’engagement supplémentaire

Preuve supplémentaire que le succès du dispositif n’avait peut-être pas suffisamment été anticipé, le conseil d’administration de l’Anah a autorisé mercredi un engagement supplémentaire de 110 millions d’euros d’ici la fin de l’année. Si Valérie Mancret-Taylor précise que ces crédits additionnels ne seront pas uniquement alloués au Plan chaudière, elle reconnaît que 95% de la dynamique du programme Habiter Mieux Agilité se concentre sur des remplacements de chaudières. Difficile, dans ces conditions, de ne pas faire le parallèle avec la prime à la conversion automobile... elle aussi victime de son succès, en 2018. Boostée en cours d’année, la prime n’avait pu être versée à des milliers de ménages, le nombre de demandes ayant largement dépassé les prévisions du gouvernement. Ce dernier avait donc dû débloquer des crédits supplémentaires en fin d'année, afin de solder les arriérés de primes non versées.

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