Mettre son enfant dans le privé déséquilibre la mixité sociale des collèges publics

Publié le 20 septembre 2018 à 18h09
Mettre son enfant dans le privé déséquilibre la mixité sociale des collèges publics

INÉGALITÉS - Selon une étude de l’INSEE publiée ce jeudi, la ségrégation sociale qui existe entre les collèges de France est le reflet des inégalités entre les différents quartiers. Mais elle est nettement amplifiée par le recours de parents à l’enseignement privé.

A Paris, le choix d’un collège privé contribue pour 45% à la ségrégation sociale. C’est en tout cas ce que dévoile l’INSEE ce jeudi 20 septembre. Dans cette étude, l’Institut a repéré deux causes pour expliquer les inégalités entre les établissements secondaires. D’une part la carte scolaire, qui tend à copier les disparités sur le territoire, et de l’autre le choix des parents, qui mettent leurs enfants dans un établissement privé. 

L’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) a étudié en 2015 les entrées en sixième dans trois villes: les métropoles de Bordeaux, de Clermont-Ferrand et Paris. L’institut a tout d’abord observé que les inégalités dans la représentation des classes sociales entre les collèges de ces villes reflètent en partie la ségrégation résidentielle du fait de la carte scolaire. Ainsi, puisque les quartiers des grandes villes sont très différenciés socialement, il en va de même pour les établissements scolaires.  Mais les résultats montrent également que ces inégalités sont amplifiées par le choix des familles. Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas la décision des parents de mettre leurs enfants dans un collège public, en dehors du secteur assigné par la carte scolaire, qui accroît la ségrégation, mais bien la volonté de se tourner vers le privé. Ainsi, dans les trois villes étudiées, l’INSEE a pu observer que si tous les élèves étaient scolarisés dans les écoles publiques, la ségrégation serait diminuée de la moitié. 

"Une école qui n’a rien de républicaine"

Ainsi, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Si on prend l’exemple de Paris, où le nombre d'élèves dans le privé atteint 30%, l'Insee montre que les enfants issus de milieux très favorisés socialement constituent près de trois quarts des effectifs du privé, alors qu’ils ne sont que la moitié de tous les élèves parisiens. Ils sont donc surreprésentés dans ces établissements. Au contraire, les élèves les plus défavorisés y sont largement sous-représentés. Alors qu'ils sont près de 20% de la totalité des élèves parisiens, le nombre tombe à 4% dans les écoles privées. 

Des chiffres qui ne surprennent pas Bruno Lamour, secrétaire général de la CFDT-FEP (Formation et Enseignement Privé). Il indique que : "Il y a un manque de mixité sociale dans l’enseignement privé catholique notamment." Ce type de formation représente   85% des établissements privés des niveaux primaires et secondaires. Bruno Lamour explique que ces inégalités ont toujours existé, le privé échappant à la carte scolaire. Mais aussi à cause de certaines pratiques "évidemment non assumées, de la part de chefs d’établissements, entre autres, et consistant à trier les élèves".

Rapport de l'INSEE numéro 40 - Septembre 2018
Rapport de l'INSEE numéro 40 - Septembre 2018 - Insee Analyses n°40

Des questions préoccupantes selon l’INSEE qui voit dans le manque de mixité sociale dans les écoles  "un manque pour la cohésion nationale et l’inculcation d’une culture civique commune". Une problématique que soulève également Bruno Lamour.  Il considère que ce modèle produit "une école qui n’a rien de républicaine, c’est-à-dire qui ne prépare pas à la vie réelle". 

Mais cette étude tend à montrer que les inégalités entre collèges sont multipliées par l’existence du privé, le secrétaire général se veut tout de même rassurant : l’enseignement catholique est conscient de l'existence de ce phénomène. "Ce qui n’a pas toujours été le cas" ajoute-t-il. Une prise de conscience qui devrait permettre de multiplier les efforts déjà mis en place par l’Enseignement catholique selon M. Lamour. Il conclut  : "Des débuts prometteurs mais pour l’heure modestes, c’est certain." 


Felicia SIDERIS

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