L'hémicyle de l'Assemblée nationale à Paris, le 6 octobre 2020

L'hémicyle de l'Assemblée nationale à Paris, le 6 octobre 2020

afp.com/Christophe ARCHAMBAULT

L'opposition crie au scandale, après la dissolution mercredi de la mission d'information parlementaire sur la crise du Covid-19. Comme souvent depuis le début de la pandémie, la majorité est accusé de tenir ses adversaires à l'écart des discussions, et l'interruption de cette commission, pourtant votée en conformité avec le règlement par les députés LREM et MoDem, vient relancer ce débat.

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Le patron des députés LR Damien Abad a parlé d'un "naufrage démocratique totalement surréaliste (...) irrespectueux des droits du Parlement", son collègue PS Boris Vallaud de "reniement". Eric Ciotti, le rapporteur LR de la mission, a dénoncé "un coup de force institutionnel et une dérive solitaire dans la gestion de la crise".

L'instance spéciale créée en mars 2020 disposait des mêmes prérogatives qu'une commission d'enquête. Dans ce cadre, 75 personnes ont été entendues, un premier rapport a été rendu en juin 2020 suivi de nouvelles conclusions le 2 décembre.

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"C'est scandaleux et donne à penser que le gouvernement a quelque chose à cacher, notamment sur la politique vaccinale", a réagi le socialiste David Habib. "Macron et ses ministres ont peur d'assumer publiquement leur politique hasardeuse", a écrit sur Twitter Jean-Luc Mélenchon, député et chef des Insoumis.

La majorité, elle, justifie cette disparition par le fait que les commissions permanentes de l'Assemblée suivent la gestion de la crise. "C'est le cinéma habituel des oppositions, qui ont souvent utilisé cette commission comme une scène politicienne. Les commissions d'enquête et missions d'information sont temporaires, c'est la vie parlementaire", a commenté le chef de file des députés LREM Christophe Castaner. "Nul doute qu'après 14 ans à l'Assemblée, Eric Ciotti le sache mieux que personne", a-t-il complété.

"Une mise en scène de la part des députés LR"

Début décembre en commission, le texte remis par le rapporteur LR avait provoqué une abstention de la majorité, les élus LREM et MoDem critiquant un rapport "partiel et partial" plus proche d'un "réquisitoire", et une "instrumentalisation politique" de la part de l'opposition. Depuis, les élus de droite ainsi que l'opposition de gauche demandaient la poursuite de cette mission d'information.

Mais les cries d'orfraie depuis mercredi et l'officialisation de sa dissolution agacent dans la majorité : "C'est une mise en scène de la part des députés LR. Si nous voulions museler l'opposition, nous aurions voté contre la publication du rapport d'Eric Ciotti (...) Les commissions permanentes de l'Assemblée comme la commission des affaires sociales ou celle des affaires économiques peuvent aussi bien se saisir du sujet et c'est ce qui se passe actuellement", balaye dans Le Monde le député LREM de la Loire Julien Borowczyk, président de la mission d'information.

La forme laisse néanmoins à désirer, même pour certains dans la majorité. Selon Mediapart, les élus Agnès Firmin Le Bodo d'Agir et Philippe Vigier du MoDem ont exprimé leurs désaccords auprès de Julien Borowczyk : "Je comprends les arguments du président : une mission, ça a un début et une fin. À partir du moment où un rapport a été rendu, je peux entendre que la mission soit arrêtée. Ce qui me gêne, c'est que rien ne la remplace. J'aurais voulu que le président s'engage à cela", a indiqué la députée Agir.

L'opposition à l'Assemblée a bien l'intention de relancer la mission d'information. C'est Richard Ferrand, le président de l'Assemblée nationale, qui l'avait mise en place au printemps 2020. Les groupes LR et PS à la chambre basse comptent le saisir pour permettre sa poursuite, sous la forme d'une mission d'information à nouveau, ou d'une commission d'enquête. Dans tous les cas, le contrôle des mesures de l'exécutif sera repris au moins partiellement au Sénat, qui a acté mardi la création d'une mission d'information "destinée à évaluer les effets des mesures prises ou envisagées en matière de confinement ou de restrictions d'activités".

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