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A la recherche d'économies, le gouvernement se penche sur les maladies chroniques

Les revues de dépenses lancées pour bâtir le budget 2025 s'intéressent, selon nos informations, aux dépenses en faveur de la jeunesse et aux affections de longue durée (ALD). Sur ce dernier chantier, potentiellement explosif, l'exécutif marche sur des oeufs.

Le diabète fait partie des principales affections de longue durée (ALD).
Le diabète fait partie des principales affections de longue durée (ALD). (Shutterstock)

Par Renaud Honoré, Solenn Poullennec

Publié le 5 févr. 2024 à 07:00Mis à jour le 5 févr. 2024 à 10:19

Sur les questions budgétaires, Gabriel Attal a fait le strict minimum lors de sa déclaration de politique générale mardi . Une petite minute quarante sur le sujet - quand le discours s'étirait sur une heure vingt - pour au final bien peu d'annonces. Tout juste le Premier ministre a-t-il réaffirmé « poursuivre et renforcer les revues de dépenses, auxquelles tous les ministères et tous les secteurs de l'action publique seront associés ».

Derrière ce sabir technique de « revue des dépenses » se cachent quelques chantiers sensibles politiquement. Parmi toutes les politiques publiques auscultées pour jauger l'efficience de la dépense, figure notamment la prise en charge des maladies chroniques - ou affections de longue durée (ALD). Dans le camp présidentiel, tout le monde marche sur des oeufs à l'évocation du dossier. « Un travail est engagé et il n'y a rien de décidé. Mais c'est un des sujets les plus délicats », reconnaît un ténor de la majorité.

12 milliards d'économies à trouver

En novembre dernier, Elisabeth Borne avait lancé six revues des dépenses , qui doivent contribuer à trouver les 12 milliards d'euros d'économies déjà nécessaires pour boucler le budget 2025. Sur ce total, 6 milliards d'euros d'économies sont censés être dégagés dans le camp de la Sécurité sociale, dont les comptes sont dans le rouge. Certaines cibles avaient été officiellement dévoilées : les dispositifs médicaux (comme les machines traitant l'apnée du sommeil), ou encore les aides aux entreprises .

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D'autres avaient été laissés volontairement dans l'ombre. Selon nos informations, l'exécutif a également demandé des rapports aux inspections générales des administrations sur « la prise en compte de la baisse du taux de chômage sur les dispositifs de soutien à l'emploi et d'accompagnement des demandeurs d'emploi », ainsi que sur « la formation professionnelle (CPF) ».

L'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) ont aussi pour mission de travailler sur un sujet à l'intitulé un tantinet abscons : « Objectivation, rationalisation et ajustement de l'ensemble des dispositifs en faveur de la jeunesse ». « Nous avons une démographie des jeunes qui amorce une baisse, mais cela n'a pour l'instant aucune conséquence sur toutes les dépenses que nous engageons en leur faveur, dans l'éducation et dans d'autres domaines. C'est logique de regarder le sujet », expliquait il y a quelques semaines un proche d'Elisabeth Borne.

Vieillissement de la population

Reste enfin la piste des affections de longue durée (ALD). Si l'exécutif a décidé de se pencher sur ces maladies chroniques, c'est que celles-ci se développent, sur fond de vieillissement de la population mais aussi de progrès médical. Celui-ci permet d'augmenter l'espérance de vie des personnes atteintes. Résultat : le nombre des bénéficiaires d'ALD augmente régulièrement, tout comme le poids des ALD dans la structure des dépenses de santé, qui représentent près de 66 % de celles-ci (en 2020).

Près de 20 % des Français assurés (12 millions de personnes) bénéficiaient en 2022 de la reconnaissance d'une affection longue durée par l'Assurance Maladie, car ils sont atteints d'une maladie grave, longue et coûteuse à soigner. Ce système garantit une prise en charge à 100 % des dépenses de soins par la Sécurité sociale (dans la limite des plafonds de remboursement, hors dépassements d'honoraires, franchises médicales, etc.). Parmi les ALD les plus répandues figurent le diabète, les cancers, les affections psychiatriques ou les problèmes d'insuffisance cardiaque.

Exercice difficile

Existant depuis le début de la Sécurité sociale, ce dispositif a été modifié en 2011, pour sortir l'hypertension artérielle de la liste des ALD, qui compte aujourd'hui une trentaine d'affections.

Si modifier de nouveau la liste des ALD promet d'être un exercice difficile, l'exécutif pourrait chercher à agir sur d'autres tableaux. Notamment en se penchant sur les soins qui ne sont pas liés à la pathologie éligible à l'ALD, et qui ne doivent pas donner lieu à la même prise en charge à 100 % depuis 1987. Les médecins sont censés différencier les prescriptions. Pas sûr cependant que cette distinction soit toujours bien faite. L'Assurance Maladie a d'ailleurs mis ce sujet sur la table dans le cadre des négociations en cours avec les médecins libéraux sur le tarif des consultations.

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Sur le papier, l'Assurance Maladie pourrait réduire le coût de la prise en charge des maladies chroniques sans que les patients soient forcément moins bien remboursés, si les mutuelles prennent le relais. Arguant justement du coût croissant des maladies chroniques, l'exécutif a déjà décidé l'an dernier de demander aux assureurs santé d'assumer une plus grande part des dépenses de santé dentaires .

Prudence des macronistes

Dans le camp présidentiel, l'heure est cependant à la prudence. Modifier la prise en charge des soins serait délicat, à l'heure où les Français sont confrontés aux déserts médicaux et à des hôpitaux en crise chronique. Déjà, lorsqu'il s'était agi de doubler les franchises sur les médicaments et les participations forfaitaires payées par les patients sur les consultations, le gouvernement d'Elisabeth Borne avait préféré tergiverser. Ce n'est qu'en début d'année - après qu'Emmanuel Macron a assumé publiquement cette mesure - que le gouvernement de Gabriel Attal a officialisé cette décision évoquée depuis des mois. Pour rassurer, l'exécutif s'est justement engagé à préserver les personnes en affection longue durée.

L'an dernier, les revues de dépenses avaient au final débouché sur très peu d'économies. Les besoins sont cette fois plus importants. Gabriel Attal a promis des premières mesures dans les prochaines semaines.

Renaud Honoré et Solenn Poullennec

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