Reportage

A Lille, Gérard Collomb promet une «police sur mesure»

En visite dans le Nord, le ministre de l'Intérieur, accompagné de Nicole Belloubet et Gérald Darmanin a abordé la question de la «reconquête républicaine» des quartiers confrontés au trafic de stupéfiants et la réforme de la procédure pénale.
par Sheerazad Chekaik-Chaila, intérim à Lille et Aimée Thirion, photo
publié le 26 septembre 2018 à 19h11

«Pour un ministre, ils déplacent la terre entière ?» lance un passant, un sac de courses à la main, devant les dizaines de policiers présents sous les fenêtres de l'hôtel de police de Lille. Pas un mais trois ministres. Ce mercredi, Gérard Collomb, ministre de l'Intérieur, Nicole Belloubet, garde des Sceaux et Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des Comptes publics étaient à Lille et Tourcoing. Au programme, la «reconquête républicaine» des quartiers avec la lutte du trafic de stupéfiants et les grandes lignes de la future réforme de la procédure pénale, présentée dans les prochains jours au Sénat par la ministre de la Justice.

Moins de paperasse

«Nous voulons faciliter le travail de l'ensemble de la chaîne pénale, des enquêteurs jusqu'aux juges», résume la garde des Sceaux, Nicole Belloubet. Comment ? En facilitant les perquisitions et en permettant aux juges de placer en résidence surveillée des suspects, pour deux mois maximum, le temps d'obtenir tous les éléments de l'enquête, par exemple. La création de tribunaux criminels départementaux est aussi envisagée pour désengorger les cours d'assises et éviter de voir des crimes requalifiés pour être jugés par les tribunaux correctionnels (ce qui arrive notamment à des viols finalement jugés pour agressions sexuelles).

Un policier de la BAC, présenté à Gérard Collomb pour son «courage» lors de l'interpellation d'un braqueur de banque présumé, espère des mesures «constructives». Moins de paperasse et plus de temps sur le terrain. «Il y a beaucoup d'attente chez les policiers», affirme Luc-Didier Mazoyer, le directeur de la sécurité publique du Nord.

Place Degeyter, à Fives, dans un quartier populaire de Lille, en début d'après-midi. «Garde à vous !» intime un gradé à ses collègues. Gérard Collomb, le patron des forces de l'ordre, déambule dans les rues, rit avec des enfants, fait des selfies. Ici, vient d'être mis en place une Force de réponse immédiate (FRI), une unité antidrogue. Bientôt, les policiers pourront verbaliser les majeurs pris avec de l'herbe dans les poches d'une amende de 300 euros, sans passer par la garde à vue. Les forces de l'ordre sont ravies.

Sujets sécuritaires

«Il y a du trafic mais franchement ici c'est de la gnognotte», rit Nacéra, 47 ans, qui vient de quitter la banlieue parisienne pour s'installer à Lille. Avec le lancement des quartiers de «reconquête républicaine», trente nouveaux fonctionnaires sont affectés à Lille depuis début septembre. «Une police de sécurité du quotidien», déroule Gérard Collomb, certain que «voir des policiers dans la rue rassure les habitants et dissuade les trafiquants». Dans la rue Pierre-Legrand qui sert de décor à la sortie ministérielle, quelques habitants se mêlent à l'attroupement pour glisser un mot au ministre de l'Intérieur. Darmanin et Belloubet se tiennent en retrait. C'est Collomb la star du jour. Jamais, au cours de la journée, le ministre, très critique ces derniers jours vis-à-vis du président Macron, ne s'est écarté des sujets sécuritaires.

Un employé de supérette lui tend la main. «Non, il ne faut pas aller là. Lui, on l'a fait fermer quinze jours pour deal», l'alerte Martine Aubry, la maire PS de Lille l'entraînant vers de «vrais commerçants». Parmi eux, il y a Samir, gérant depuis huit ans d'un snack qui «souffre du manque de sécurité» et Djamel, le fleuriste du trottoir d'en face. «On se bat tous les jours», souffle-t-il devant le ministre. Gérard Collomb promet à ceux qui l'interpellent une «police du sur-mesure», dont les effectifs vont monter en puissance. Dix mille recrutements de fonctionnaires sont prévus entre 2018 et 2021. A cette échéance, Gérard Collomb, candidat déclaré à la mairie de Lyon pour les municipales 2020, ne devrait déjà plus être le «premier flic de France».

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