Darmanin, Abad, Zacharopoulou… Ces ministres qui ont des démêlés avec la justice

Les ministres Damien Abad (en haut à gauche), Eric Dupond-Moretti (en haut à droite), Catherine Colonna (en bas à gauche) et Gérald Darmanin (en bas à droite).

Les ministres Damien Abad (en haut à gauche), Eric Dupond-Moretti (en haut à droite), Catherine Colonna (en bas à gauche) et Gérald Darmanin (en bas à droite). (MONTAGE « OBS » : MICHEL SPINGLER/AP/SIPA-JACQUES WITT/SIPA)

Viols, harcèlement, prise illégale d’intérêts… Huit ministres du gouvernement d’Elisabeth Borne ont été épinglés ou sont mis en cause par la justice.

Durant la campagne présidentielle de 2017, Emmanuel Macron promettait une « République exemplaire » en cas d’élection. Cinq ans plus tard, en plus des candidats investis par la majorité aux législatives malgré leurs problèmes judiciaires, le gouvernement d’Elisabeth Borne ne compte pas moins de huit ministres et secrétaires d’Etat (sur 27, soit près de 30 % du gouvernement) épinglés, mis en cause ou poursuivis par la justice. Dernières en date : la secrétaire d’Etat à la Francophonie Chrysoula Zacharopoulou, visée par une enquête après deux plaintes pour viol, et la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, nommée malgré plusieurs signalements pour son management.

A lire aussi

Cela reflète la position d’Emmanuel Macron qui, quelques semaines après son élection en mai 2017, avait appelé à « en finir avec le viol permanent de la présomption d’innocence ». Pour le chef de l’Etat : pas de condamnation, donc pas coupable. En 2017, François Bayrou et Marielle de Sarnez, alors ministre de la Justice et ministre des Affaires européennes, avaient pourtant dû démissionner un mois après leurs nominations, car visés par une enquête préliminaire pour des soupçons d’emplois fictifs. « L’Obs » fait le point sur l’activité judiciaire de l’actuel gouvernement.

Publicité

  • Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’Etat à la Francophonie, visée par une enquête pour viol

Nommée en mai secrétaire d’Etat chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux, Chrysoula Zacharopoulou est visée par une enquête après le dépôt de deux plaintes pour viol. Selon les informations de « Marianne », les faits reprochés auraient été commis dans le cadre de sa profession de gynécologue.

A lire aussi

La première plainte dénonçant des faits de viol a été déposée le 25 mai et l’enquête ouverte deux jours plus tard, a précisé le parquet. Concernant la deuxième plainte, les faits imputés se seraient déroulés « dans un cadre médical » en 2016 et concerneraient une femme majeure. L’enquête a été confiée à la Brigade de Répression de la Délinquance contre la Personne (BRDP).

  • Catherine Colonna, ministre des Affaires étrangères, visée par plusieurs signalements pour harcèlement

La nomination de Catherine Colonna au Quai d’Orsay a été actée malgré plusieurs signalements pour harcèlement, selon les informations de Mediapart. Alors ambassadrice de France au Royaume-Uni, Catherine Colonna a été visée par plusieurs signalements adressés à la cellule « tolérance zéro » du Quai d’Orsay au début de l’année 2022. Des témoignages qui devaient donner lieu à une inspection générale, suspendue après sa nomination au gouvernement.

Publicité

A lire aussi

Selon le média d’investigation, un signalement avait même déjà été effectué à la suite d’une inspection menée à l’ambassade d’Italie à Rome à l’époque où Catherine Colonna y était, entre 2014 et 2017. Les témoignages décrivent des faits s’apparentant à du harcèlement moral. « Il est connu que Mme Colonna a des pratiques consistant à briser les gens », rapporte un diplomate à « Libération ». D’après lui, « Emmanuel Macron a nommé ministre la diplomate la plus détestée du réseau diplomatique ».

  • Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, accusé de viol

Plusieurs ministres sont accusés de violences sexuelles, à l’instar du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, visé par une accusation de viol et de trafic d’influence qui émanent de deux femmes différentes.

Il est accusé d’avoir promis un « service » à une femme en échange de faveurs sexuelles en 2009. Deux plaintes simples déposées en juin 2017 et janvier 2018 avaient été classées sans suite. Une troisième plainte déposée en mars 2018 par la même plaignante avec constitution de partie civile avait été classée sans suite dans un premier temps, puis relancée par la cour d’appel de Paris en juin 2020. Le parquet de Paris a requis un non-lieu début 2022.

A lire aussi

Une autre femme avait porté plainte en février 2018, disant s’être « sentie obligée » d’avoir des relations sexuelles avec le ministre, alors maire de Tourcoing, pour obtenir logement et emploi. L’enquête préliminaire pour « abus de faiblesse » avait été classée sans suite en mai de la même année.

Publicité

  • Damien Abad, ministre des Solidarités, accusé de viol

Au lendemain de sa nomination au gouvernement, le ministre des Solidarités Damien Abad a été accusé de viol par deux femmes. Selon les informations de Mediapart, les faits présumés remontent à 2010 et 2011 : la première femme, âgée de 41 ans, a adressé une lettre à l’Observatoire des Violences sexistes et sexuelles en Politique le 13 mai, dans laquelle elle « souhaite témoigner des faits de viol concernant Damien Abad », alors pressenti pour entrer au gouvernement. La seconde femme a pour sa part porté plainte pour « viol » en 2017, classée sans suite.

A lire aussi

Le site d’investigation avait publié le 14 juin de nouvelles accusations de la part d’une « élue centriste » qui dit avoir subi une tentative de viol en 2010. Le parquet de Paris avait finalement indiqué le 25 mai qu’il n’ouvrait pas d’enquête préliminaire « en l’état », estimant ne pas disposer « d’élément permettant d’identifier la victime des faits dénoncés ».

  • Eric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, soupçonné de « prise illégale d’intérêts »

Elle est connue comme étant « l’affaire Dupond-Moretti » et remonte à janvier 2021 quand la commission d’instruction de la Cour de justice de la République (CJR) ouvre une information judiciaire pour « prise illégale d’intérêts » dans deux dossiers. Le garde des Sceaux, mis en examen en juillet 2021, est soupçonné d’avoir profité de sa fonction gouvernementale pour régler des comptes avec trois magistrats du Parquet national financier (PNF) qui avaient fait éplucher ses relevés téléphoniques détaillés (fadettes) quand il était encore avocat.

A lire aussi

Le ministre est également accusé d’avoir diligenté des poursuites administratives contre un ancien juge d’instruction qui avait mis en examen un de ses ex-clients. Le 10 mai, le ministère public de la CJR a jugé qu’il existait des « charges suffisantes » contre le ministre pour le renvoyer en procès devant la Cour. La commission d’instruction de la CJR a ensuite rejeté la demande d’annulation de la mise en examen formulée par les avocats du ministre.

Publicité

  • Sébastien Lecornu, ministre des Armées, visé par une enquête pour « prise illégale d’intérêts »

Promu dans le nouveau gouvernement, l’ex-ministre des Outre-mer est visé depuis mars 2019 par une enquête pour « prise illégale d’intérêts » et « omission de déclaration à la HATVP », la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie publique. Dans sa déclaration, Sébastien Lecornue mentionnait avoir touché 7 874 euros brut de « jetons de présence » en tant qu’administrateur de la Société des Autoroutes Paris Normandie (SAPN) entre 2016 et 2017. Le problème : il présidait alors le département de l’Eure et a approuvé plusieurs délibérations en lien avec la SAPN, dont l’une d’elles concernerait un projet pour lequel le département de l’Eure a déboursé un million d’euros, selon « le Canard Enchaîné ». Il a été entendu en avril par la police anticorruption lors d’une audition libre et l’enquête suit son cours.

  • Olivier Dussopt, ministre du Travail, visé par une enquête pour « prise illégale d’intérêts » et « corruption »

Autre promu du gouvernement Borne, Olivier Dussopt est visé par une enquête préliminaire du Parquet national financier pour « prise illégale d’intérêts » et « corruption », selon les informations de Mediapart en juin 2020. Alors qu’il était député et maire d’Annonay (Ardèche) en janvier 2017, il avait accepté deux lithographies en cadeau par la société de traitement de l’eau Saur. Six mois après la réception des œuvres, l’ex-ministre de l’Action et des Comptes publics avait signé un contrat entre l’entreprise et sa commune. Après une perquisition au domicile du ministre par l’Office central de Lutte contre la Corruption et les Infractions financières et fiscales en août 2020, l’enquête est toujours en cours.

  • Justine Benin, secrétaire d’Etat chargée de la Mer, accusée de clientélisme

Défaite lors des législatives, Justine Benin devrait quitter prochainement le gouvernement. Pour autant, elle est accusée par Mediapart d’avoir, en tant que députée, utilisé l’argent du MoDem pour arroser les associations de sa commune du Moule en Guadeloupe, alors qu’elle était candidate à la mairie.

Publicité

A lire aussi

Dans les comptes du parti centriste des années 2019 et 2020, le média d’investigation a repéré pas moins de 37 000 euros qui ont été versés à 14 organisations locales. L’argent ayant été versé en pleine période électorale, certaines dépenses auraient dû apparaître sur le compte de campagne du MoDem. Pour Mediapart, « la visée électorale est transparente ». Traduction : il s’agit de « clientélisme ».

Sur le sujet Justice

Sujets associés à l'article

Annuler