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Portugal : la fin d'un eldorado fiscal ?

Nombre de retraités se sont expatriés au Portugal. Douceur du climat, pouvoir d'achat plus élevé, mais surtout perspective d'exonérations fiscales sont les atouts du pays. Pour combien de temps ?

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Les « résidents non habituels » bénéficient au Portugal d'un régime fiscal de faveur.

Par Nathalie Cheysson-Kaplan (Pigiste)

Publié le 17 sept. 2018 à 18:45

Institué en 2009, le régime des « résidents non habituels » (RNH) est réservé aux personnes qui s'installent au Portugal et qui n'y ont pas été résidentes au cours des cinq années précédentes. Son application n'est pas automatique. Il faut en faire la demande au plus tard le 31 mars de l'année suivant celle l'installation.

Pour y prétendre, il faut être considéré comme résident fiscal au sens de la loi portugaise, c'est-à-dire avoir séjourné au Portugal plus de 183 jours, d'affilée ou non, au cours de l'année d'installation ou, si cette condition n'est pas remplie, y avoir disposé d'un logement, loué ou acheté, à un moment quelconque de l'année. Cette inscription permet de bénéficier pendant une période de dix ans d'un régime fiscal avantageux.

Initialement, ce régime était destiné à attirer les actifs exerçant une activité « à forte valeur ajoutée » : ingénieurs, médecins, architectes, consultants fiscaux ! Il leur permettait de bénéficier d'un taux d'imposition réduit (20 %) pour les revenus de leur activité professionnelle et d'une exonération totale d'impôt pour les revenus d'activité et les revenus du patrimoine de source étrangère (dividendes, intérêts, plus-values…).

Ce régime a été étendu en 2013 aux pensions de retraite. En conséquence, les pensions de retraite de source étrangère - autres que celle versées par les régimes de la fonction publique - sont exonérées d'impôt au Portugal. Or, la convention fiscale franco-portugaise, conforme au modèle OCDE, prévoit que les pensions de retraite sont imposables dans l'Etat de résidence du retraité. Il en résulte une « double non-imposition », d'un côté la France n'ayant pas le droit de les imposer en vertu de la convention fiscale, tandis que de l'autre le Portugal prévoit leur exonération.

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Remise en cause via le Conseil d'Etat

L'objectif des conventions fiscales étant d'éviter les doubles impositions et non pas de créer des doubles exonérations, les choses pourraient changer suite à deux décisions récentes du Conseil d'Etat (décisions du 9 novembre 2015 n° 370054 et n° 371132). Elles ne concernaient pas spécifiquement le Portugal, mais elles ont vocation à s'appliquer à l'ensemble des cas où le pays de résidence n'exerce pas son droit d'imposer les revenus mondiaux (Italie, Israël et Portugal notamment).

Le Conseil d'Etat considère désormais que pour être résident fiscal d'un pays, il faut y être effectivement imposé. Dès lors, si on est exonéré d'impôt, on ne peut avoir cette qualité et se prévaloir des avantages prévus par la convention fiscale. Et si la convention fiscale n'est pas applicable, c'est le droit fiscal français qui s'applique.

Or, aux yeux de la France, il ne suffit pas de vivre plus de 183 jours par an au Portugal pour être considéré comme non-résident , ni a fortiori d'y avoir seulement disposé d'un logement. La jurisprudence considère qu'une personne qui vit à l'étranger et perçoit une pension de retraite versée par une caisse de retraite française doit être regardée comme ayant conservé le centre de ses intérêts économiques en France. En conséquence, elle doit être considérée comme étant fiscalement domiciliée en France, dès lors que cette pension est son unique source de revenus, et être soumise à l'impôt sur le revenu en France.

Des résidents fiscaux français ?

Les retraités établis au Portugal courent donc le risque d'être considérés comme des résidents fiscaux français et perdre les avantages liés au statut de « résident non habituel », non pas en raison d'une modification de la convention fiscale mais d'une évolution de son interprétation en droit interne français.

« Pour l'instant, l'administration fiscale ne s'est pas encore prononcée, mais pour éviter de voir ses retraites soumises à l'impôt en France, il faudrait non seulement avoir le centre de ses intérêts économiques au Portugal, mais aussi se ménager d'autres sources de revenus imposables au Portugal. Dans tous les cas, nous recommandons à nos clients de consulter un avocat fiscaliste français en binôme avec un avocat fiscaliste portugais », met en garde Benjamin Spivac, ingénieur patrimonial chez Amplegest.

Autrement dit, un retraité français touchant sa pension au Portugal pourrait se voir rattrapé par le fisc.

Nathalie Cheysson-Kaplan

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