Le dimanche est toujours l’occasion rêvée de se préparer un bon repas (aujourd’hui : coquelets et pommes sautées, fraises à la menthe au dessert) et de se moquer de l’administration française. Pourquoi ? Parce ce que d’une part, le dimanche, on a le temps de cuisiner et donc, de se faire de bons petits plats, et d’autre part parce qu’on ne doit jamais, jamais perdre une occasion de se moquer de la façon dont nos administrations aspergent l’argent qu’elles reçoivent du contribuables dans des projets plus ou moins pertinents. Et ça tombe bien, un récent exemple vient s’ajouter à un repas dominical qu’on devine déjà savoureux !
A l’opposé diamétral des coquelets qui sont une recette qu’on ne peut pas louper et qui est délicieuse, l’investissement de fonds publics dans des développements de technologies innovantes est une recette qu’on ne peut pas réussir et qui pue quasiment dès le départ.
Oh, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : oui, on peut cramer son coquelet, on peut fusiller sa sauce et niquer ses pommes de terres, et donc, là encore symétriquement, l’état peut parfois obtenir un résultat concret d’un investissement dans une technologie innovante. Le débat reste cependant ouvert sur l’utilité réelle au niveau du citoyen des développements obtenus ; la bombe A puis H sont d’excellents exemples de production étatique extrêmement coûteuse au bénéfice imparfaitement palpable dirons-nous.
Cette fois-ci, nous apprenons donc, en plaçant nos coquelets dans le four, préalablement chauffés autour de 200°C, et bien évidemment enduits délicatement d’un peu de beurre à l’ail qu’on aura confectionné préalablement, que l’état et des collectivités territoriales (PACA, Rhône-Alpes) vont injecter 7 millions d’euros dans un projet conjoint entre Gemalto, Archos et Wysips qui vise à créer un truc révolutionnaire : une sorte d’ordinateur super-portable, sans clavier, ni souris, très plat, qu’on peut trimbaler partout.
En gros, il s’agit de faire ça :
Mais mieux.
Et comme Gemalto (cartes SIM), Archos (baladeurs MP3) et Wysips (films photovoltaïques) sont des super-cadors des ordinateurs tout plat sans souris ni clavier, on est déjà certain qu’on se lance ici sur un terrain particulièrement bien maîtrisé, et que l’argent gratuit du public sera donc employé à réaliser une de ces performances que le monde nous envie, comme celle-ci par exemple :
L’idée brillante, derrière ce partenariat et ce cramage cet investissement de 7 millions d’euros est de proposer, enfin, une tablette très peu gourmande en énergie au point qu’elle se rechargera directement avec la lumière solaire. Et comme les performances globales sont liées à la consommation, comme on veut cette consommation aussi faible que possible, on part déjà sur une base tonique avec des performances de schtroumpf anémique.
D’ailleurs, devant cette tonicité, un compromis est envisagé : plutôt qu’amoindrir les performances, on pourra faire en sorte que la tablette consomme la même énergie que les autres en fonctionnement, mais absolument rien lorsqu’elle est en veille, ce qui permettrait peut-être d’étendre l’autonomie globale de moitié. Et le consortium, frétillant d’aise après avoir été arrosé d’aides publiques, se donne deux ans pour parvenir à un premier prototype fonctionnel.
Deux ans que la concurrence qui existe déjà n’aura pas mis à profit pour améliorer encore l’autonomie ou les performances ou les deux. Ce qui permettra à notre consortium d’être pile-poil au bon moment sur le marché avec son bidule innovation.
Oh. C’est le moment de retourner les coquelets. Miam, cela sent bon. On n’aura pas perdu de temps à éplucher le bilan des startups qui se sont lancées dans l’aventure, et on aura plutôt épluché quelques petites pommes de terre (selon votre appétit ou le nombre de convives à table), qu’on collera au four aussi vite que possible histoire qu’elles cuisent en s’imbibant des bonnes odeurs. Certains choisissent de mettre les pommes dès les départ. C’est un choix, ça marche aussi. Pas de haine, c’est le week-end.
Au fait, vous avez déjà entendu parler de Tabbee ? Non ? C’est normal. C’est une tablette développée en 2009 par Orange. Un succès commercial foudroyant, que le monde entier nous … Enfin bref.
Et pour ce qui est des idées géniales d’investissements de fonds publics dans des nouvelles technologies, vous avez certainement entendu parler de Quaero. Mais si, Quaero. Le moteur de recherche lancé en grandes pompes par Chirac courant 2005/2006 ! Voyons, Quaero, l’ex-moteur de recherche devenu parapluie de technologies multiples et reconnues un peu partout dans le monde avec plein de contrats juteux et beaucoup de pépettes qui rentrent à gros bouillon et que le monde … Bon.
Ce n’est pas, notez bien, que ça ne marche pas. Tabbee semble être vendue. Des gens en achètent et certains n’y ont pas été forcés. Il y a des trucs qui se passent sur l’écran, ça semble fonctionner. Et Quaero produit des machins qui permettent d’obtenir des résultats colorés, dans différents domaines. C’est … heu … disons … sympathique.
On avouera que le coté rock’n’roll de tout ça est un peu difficile à déceler. Et pour cette magnifique initiative à 7 millions d’euros, je vous fiche mon billet que ce sera exactement pareil : oui, il y aura bien une tablette au bout du compte. Ses performances seront moyennes. Son intérêt aussi. L’engouement déclenché, évidemment, sera totalement moyen. Les gens seront passés à autre chose, le marché sera déjà complètement verrouillé. La France, dans ce domaine et grâce aux impulsions saccadées du pouvoir politique, se complaît fort bien dans le moyen, le « pas complètement nul », le « dans la masse ».
Ah, les coquelets sont cuits, autant que les contribuables qui ont participé à ce don généreux sans retour sur investissement possible.
Je vous souhaite un bon dimanche et un bon appétit. Oubliez ces 7 millions. Ce n’est que 3500 SMIC chargés, après tout. La France, éternelle et impérieuse, en a vu d’autres.
Santé.
On se demande ce qu’Archos va faire dans cette galère?
Ils font déjà des tablettes d’entrée de gamme tout à fait honorables; la preuve, j’en ai moi même acquis une, sans incitation étatique, sans subvention, juste en comparant ce qui se fait et en en déduisant, selon mes critères, que leurs matos me convenait pour les usages auxquels je les destinait.
D’un autre coté, en consultant le lien que vous donnez sur cette initiative, je vois qu’il est question de ce fameux film plastique permettant de capter l’énergie solaire.
Je pense que cette invention à un avenir. Et sans subventions étatiques.
Enfin, en ce qui concerne les progrès de l’autonomie de tous ces petits engins, si il y a un endroit ou il faut mettre le paquet, c’est bien là, car en l’état actuel des choses, c’est vraiment limite.
Si on reprend l’exemple des tablettes, l’autonomie annoncée par tous les constructeurs est totalement pipeau.
Pour un usage normal, il faut prendre ces chiffres et les diviser par deux. Au mieux!
« On se demande ce qu’Archos va faire dans cette galère? »
Probablement récupérer du fric pour faire de la R&D. Pour une boite dont le CA représente quelques dizaines de millions d’euros avoir l’état qui vient et qui propose de claquer gentiment 7 millions pourquoi refuser après tout.
Le seul problème, à mon avis, c’est qu’ils vont avoir sur le dos une myriade de fonctionnaires pseudo spécialistes du « numérique citoyen et durable » qui vont vouloir fourrer leur nez de partout et prendre des décisions. Et ça effectivement ça risque d’être galère pour eux.
Bah 7 millions d’euros c’est peanuts. Et c’est peut-être encore ce qu’ils font de moins pire en terme de dépense publique…
J’entendais ce matin à Good Morning Week End Marc de Scitivaux expliquer que le ministère de l’industrie embauche 6000 fonctionnaires…
6000… Pour faire on ne sait trop quoi… Surement empêcher de travailler les gens qui les payent avec leurs impôts.
6 000 gusses * 20 000 euros par an tout compris, c’est du 120 millions d’euros par an rien que pour le ministère de l’industrie…
Oui, tout à fait. On pourrait regarder aussi le ministère des anciens combattants. Ou les fonctionnaires qui s’occupent des agriculteurs (il y en a plus que de paysans, pour sûr).
Mais la question de fond reste : si c’est un truc d’avenir, ça va marcher, pourquoi mettre de l’argent public dedans ? Et si ça ne va pas marcher, pourquoi mettre de l’argent public dedans ?
C’est certes peanuts. Mais multipliés par des centaines de projets du même acabit, on arrive vite aux milliards que l’Etat n’a pas.
en france on a d excellent chercheurs et des laboratoires non moins excellent, le seul probleme c est l etat qui a tout bout de champs se sent obliges de venir fourres ces gros doigts graisseux dans le moteur. de droite comme de gauche, les hommes politiques ont l impression d exister parce qu ils viennent fourrer leur nez dans tout un tas de sujet pour lesquels ils ont pas la moindre idee.
le cnrs par exemple est un gouffre a pognons qui produit pas grand chose, a part du sociologue qui etudie la societe!!!! en gros qui glande joyeusement au frais du contribuable.
quant aux tablettes, nous avons un specialiste francais : francois hollande qui a fait acheter par le conseil general de correze 6000 (six milles oui) ipad pour les eleves de 6ieme et les profs. conseil general de correze en passant qui vient de demander et de recevoir une aide d urgence de l etat avant d etre en cessation de paiement. un futur president de la republique francais qui croit pouvoir gerer l etat alors qu il est meme pas capable de gerer un departement gros comme une crotte de mouche, ca promet pour l avenir.
Et moi qui croyais que la Corrèze était un modèle en matière économique, les bras m’en tombent..
La fameuse aide de l’Etat dont tu parles:
http://www.lefigaro.fr/politique/2011/09/29/01002-20110929ARTFIG00695-l-etat-au-secours-de-la-correze-endettee.php
Nous avons été enrôlés, au boulot pour un projet industriel de ce type d’1 million d’euros (ok! ça fait petit joueur), qui a été accepté après 7 refus. ça va peut- être servir un jour à EADS (partie prenante du projet), mais si j’ai bien compris, les différents bureaux d’études (les meneurs) sont surtout là pour toucher le pognon.
Quant à la région PACA, cela fait de nombreuses années qu’elle équipe les élèves des collèges rentrant en 4ème, d’un ordinateur portable qu’il est interdit d’amener à l’école (suite à quelques dérives avec internet), mais qui reste la propriété de l’élève. Ca coute cher, mais les gamins sont ravis.
Dans le meme genre on a le depart d’auto lib la voiture electrique a la demande sur Paris. Bollore est suppose se payer uniquement avec les recettes, mais quand on regarde bien, autolib c’est un syndicat mixte intercommunal avec une douzaine d’employes, qui fait tout un tas d’appels d’offres annexes, et qui paie bollore 50 000 euros par station a l’installation.
Et ca demarre en fanfare avec 250 stations d’un coup, et hop on depasse deja les 10 millions d’euros d’argent public, sans savoir du tout si le projet est viable.
La voiturette electrique de location dans un Paris tres bien desservi en metros et bus, et farci d’embouteillages, tout ca pour la modique somme de 12 millions d’euros (et probablement bien plus), tout ca en pleine crise on ne pouvait pas s’en passer bien sur.
Tabee n’est pas un produit moyen. C’est un produit d’une nullité abyssale. Un design industriel qui ferait passer un tableau de contrôle de centrale nucléaire soviétique pour un monument d’esthétique et de modernité. l’interface graphique est laide à crever. Ça utilise un stylet, on croit rêver. Inutile de perdre son temps et sa salive pour un produit aussi parfaitement mauvais.
Quant aux produits Archos, bien que non subventionnés par l’état (quoique qu’ils ont bien du pomper du crédit d’impôts recherche et de la jeune entreprise innovante), il valent tout juste la moyenne.
Archos a surtout servit à faire baver nos politicard en quête du moindre exemple de la France qui gagne. Pendant ce temps là, il y a Samsung, HTC, Amazon, sans oublier Apple.
Ouh. Ce n’est pas tendre.
Bizarrement, je ne suis pas surpris 🙂
Et si l’Etat finançait ce genre de projet, pas uniquement pour dépenser nos impôts à tord et à travers, mais aussi pour essayer de nous faire échapper au monopole des grands groupes américains (google, microsoft, apple, …).
La manière de favoriser ces projets est peut-être contestable mais il est important de les aider.
La guerre va se faire de plus en plus maintenant sur le net (cybercriminalité, estonie en décembre 2009, google et la Chine …)
Il n’est pas pensable de continuer à être aussi dépendants, sans protection et sans maîtrise.
Mais c’est déjà raté. Le marché est déjà saturé de tablettes, diverses et variées.
Sinon, je repose simplement la question : si c’est un truc d’avenir, ça va marcher, pourquoi mettre de l’argent public dedans ? Après tout, partout dans le monde, des startups démarrent avec 0 argent public. Exemple au hasard : Apple, Google, Microsoft… Et si ça ne va pas marcher, pourquoi mettre de l’argent public dedans ?
En outre, pourquoi est-il important de mettre l’argent public dans ce machin-là et pas, par exemple, … dans l’emploi de 200 smicards pour faire des trous et les reboucher, pendant quelques années ? Après tout, ça crée de l’emploi, non ?
h16: « et pas, par exemple, … dans l’emploi de 200 smicards pour faire des trous et les reboucher »
Ben on a déjà: les fonctionnaires.
« La manière de favoriser ces projets est peut-être contestable mais il est important de les aider. »
Et voilà, encore une fois peu importe le résultat pourvu qu’on aie de bonnes intentions et qu’on fasse semblant de s’agiter. Ca ressemble aux cargo-cults apparus dans le Pacifique suite à l’arrivée des troupes américaines. On déblaie une bande de forêt et on attend que des avions se posent…
>>Au fait, vous avez déjà entendu parler de Tabbee ? Non ? C’est normal. C’est une tablette développée en 2009 par Orange. Un succès commercial foudroyant, que le monde entier nous … Enfin bref.
Ca date quand-meme d’un an avant l’iPad. C’est ce qu’on pouvait faire comme tablette a bas prix en 2009, en utilisant les technos disponibles. Un cadre-photo evolue quoi.