Les états borgnes

Pour parvenir à perdurer, l’état doit toujours montrer qu’il est indispensable, ou, s’il ne peut démontrer ce caractère, au moins son immense utilité dans la vie de tous les jours. Une des techniques les plus courantes avait été clairement exposée par Bastiat en son temps : claironner ce qui se voit (les effets visibles de l’interventionnisme), tout en oubliant ce qui ne se voit pas. De nos jours, cette technique n’a guère varié. Et les états, pour asseoir leur hégémonie, l’utilisent traditionnellement : à force d’être borgnes, ils rendent leur population aveugle, et restent rois.

En ce début d’année, c’est la Tribune qui offre une brillante démonstration dans un petit article de son édition papier du 30/12/2005. En substance, et dès le titre (« La libéralisation nuit à l’emploi, admet Bruxelles »), l’article relate que la Commission Européenne – organisme d’état par excellence – reconnaît du bout des lèvres que la libéralisation de certains services publics détruit de l’emploi.

Encore une fois, on peut s’étonner de deux choses :

  • Premièrement, la Commission semble s’en tenir à un rapport qui mentionne que le nombre de personnes employées dans les industries de réseaux (télécom, transport, énergie, eau) a retrouvé en 2002 son niveau de 1980, et parvient donc à la conclusion que, ce nombre de personnes employées ayant diminué, la libéralisation détruit de l’emploi. En soi, ce n’est pas faux. L’analyse, on le verra, est un peu courte.
  • Deuxièmement, l’article semble lui aussi s’arrêter aux conclusions de la Commission. De la part d’un quotidien économique, on est en droit de se poser une question : l’analyse d’un fait économique (sous-entendu : l’analyse complète) n’est-elle pas l’essence même d’un quotidien économique ? Si moi, lecteur, je dois effectuer cette analyse par moi-même, sans pouvoir la confronter à celle du quotidien que je paye, quelle valeur ajoutée puis-je retirer de mon achat ? Autant récupérer le fil AFP ou Reuters…

Une fois l’étonnement passé – et un certain agacement à la vue répétée du manque chronique de mordant de certains journalistes -, on peut revenir sereinement sur cette analyse qui fait défaut. Comme souligné en préambule, Bastiat avait fort bien montré que le jeux des états consistait précisemment à montrer ce qu’ils voulaient qu’on voit (ici : la libéralisation entraîne une baisse du nombre d’employés dans les secteurs de réseaux) en oubliant ce qu’on ne voit pas.

Ici, ce qu’on ne voit pas, ou pas de façon directe, c’est que cette baisse s’est accompagnée de façon mathématique par une baisse des coûts de structure des opérateurs de ces réseaux, baisse qui sera au choix relayée au consommateur (anciennement contribuable quand il payait des fonctionnaires), soit en baissant la facture, soit en augmentant pour le même prix le niveau de qualité et de service rendu. De même, parce qu’il est fort difficile d’évaluer ce surcroît de pouvoir d’achat ou de qualité, il sera difficile d’évaluer précisemment le nombre d’emplois créés par ces libéralisations.

En outre, et ce que la Commission semble presque vouloir oublier avec un égarement pathétique, c’est que cette baisse du nombre de salariés ne s’est pas accompagné par une baisse du rendement. Ce qui montre, de façon éclatante :

  • que le nombre de salariés (fonctionnaires) dans les opérateurs de réseaux était trop élevé
  • que le service rendu était trop faible et plus coûteux que ce qu’il valait réellement,

…et ce, parce qu’actuellement, les réseaux en question, loin d’avoir périclité après une telle baisse de leur masse salariale, sont actuellement très bien placés pour affronter la concurrence.

Une question me vient à l’esprit : pourquoi, alors que l’article de la Tribune semble clairement montrer l’embarras de la Commission à annoncer un tel rapport, cette dernière n’a-t-elle pas utilisé les arguments que j’ai cités ci-dessus pour montrer, de façon claire, combien justement, la libéralisation avait permis d’optimiser ces réseaux et de rendre un service de meilleure qualité, à moindre coût, aux consommateurs ?

Le problème de fond du libéralisme est ici : même dans les cas les plus flagrants de sa réussite, les esprits semblent se focaliser sur ce qu’on voit, sur les aspects destructifs, en oubliant tous les bénéfices, les aspects constructifs, qui sont (et c’est facile à montrer) bien supérieurs aux désagréments.

Tant que ce biais de la représentation jouera, le libéralisme apparaîtra toujours, dans les médias, comme un moindre mal, au lieu d’un but sain à atteindre…

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