Vocifération primale

L’ Homo Grevans est un animal très particulier : doué de la parole, il ne s’en sert pourtant que pour des messages confus et disparates, dont l’objectif, comme le montre cette courte étude, est surtout de faire fuir ses prédateurs.

L’ Homo Grevans au départ est un Homo Sapiens standard qui aura progressivement sclérosé son cerveau avec l’abus de discours simplistes. Extrêmement grégaire, il ne se déplace qu’en masse de centaines d’individus, généralement bariolés, dont l’accoutrement est souvent amélioré de foulards et drapeaux rouges. Il s’agite dès qu’on touche à ses « acquis sociaux », qui ne sont que des privilèges statutaires que l’Ancien Régime n’aurait pas renié.

L’ Homo Grevans aime à chanter et à boire en réunions, et faire griller des merguez au milieu d’une place publique, exposant ainsi son régime alimentaire douteux à la vue du badaud. Car l’ Homo Grevans ne se nourrit que de merguez. Et de frites. Ce qui explique qu’il soit rapidement rond du bas, et hypercholestérique (hypercolérique, aussi) arrivé à 60 ans (s’il n’a pas claqué d’une maladie cardio-vasculaire avant cet âge canonique).

L’ Homo Grevans est parfois spécialisé. On parle alors d’ Homo Grevans Syndicalis. Ce dernier se recrute essentiellement dans la fonction publique (ailleurs, on n’a pas le temps pour ces gaudrioles improductives). Il est pétri de bonnes intentions et a le coeur sur la main tant qu’il s’agit d’augmenter son pouvoir, ses avantages et sa position sociale. Il est en revanche farrouchement opposé à toute modification de ses petites habitudes. Ainsi :

  • il veut distribuer des logements à ceux qui n’en ont pas, mais s’évapore quand il s’agit de partager le sien
  • il adore donner des subventions à ceux qui en demandent, mais ne veut jamais payer plus d’impôts
  • il aime l’Edulcoration Nationale, mais ses enfants ne s’y trouvent pas souvent
  • il ne veut pas entendre parler de magouilles phynancières (mains propres, tête haute, hein!) mais … [1]

Il ne se déplace que dans le sens de plus grande pente, ce qui lui évite effectivement de brûler des calories, qui seront mieux utilisées pour la caractéristique principale de cet étrange animal : la Vocifération Primale.

Par ce terme, nous recouvrons les braillements que cet étrange hominidé produit à chaque fois précisemment qu’il est en groupe. Il s’agit d’une vocifération dans son acceptation la plus large (pas seulement sa définition de base : paroles de colère accompagnées de cris) : éructation non contrôlée, dont le sens se perd très vite dans un brouhaha de cris et de percussions diverses.

Car en effet, si on tente l’analyse de ce qui est dit par l’ Homo Grevans, on se rend vite compte de la totale indigence intellectuelle de ses propos:

  • le terme novlangue pour grève est « journée d’action », bien qu’il s’agisse ici d’inaction totale pour la plupart des services publics concernés
  • le motif officiel de la journée d’action est pour l’emploi, l’amélioration du pouvoir d’achat et contre la précarité. Une fois l’analyse novlangue faite, et la traduction en français courant, cela donne : pour l’emploi d’encore plus de fonctionnaires, l’augmentation de leurs avantages, contre les sanctions.

Au delà de cette traduction, on peut s’interroger exactement sur la profondeur du message. Ainsi, « pour l’emploi » : comment pourrait-on faire une grève « pour le chômage » ? Et de même, est-ce que, tout comme la fête du travail, jour férié, faire la grève (arrêt du travail) « pour l’emploi » n’est pas quelque part contradictoire ? Cette grève va-t-elle changer quelque chose ? Si on pousse le raisonnement, ne devrait-on pas faire la grève beaucoup plus souvent pour résorber les 3.000.000 de chômeurs ?

La seconde assertion, « pour l’amélioration du pouvoir d’achat » est du même acabit. Vient s’ajouter à ça une caractéristique fondamentale de l’ Homo Grevans : il n’y entend pas grand’chose en économie, et ne veut sourtout pas essayer. Un pouvoir d’achat, ça ne se décrête pas. Le pouvoir politique ne peut pas agir directement sur cette donnée, d’autant plus qu’elle est très subjective. Une grève ne risque pas de l’améliorer, en tout état de cause : les « entreprises » concernées, ou les services impactés vont devoir, d’une façon ou d’une autre

  • rattraper la perte d’exploitation de cette journée
  • s’ils ne peuvent pas rattraper la production, les coûts vont augmenter, donc les prix à la revente, pour compenser la perte de vente correspondante.
  • s’ils ne peuvent augmenter les prix à la revente, ils vont créer de la dette qu’il faudra rembourser, en prenant sur leur pouvoir d’achat d’une façon ou d’une autre (par augmentation des prix ou des charges de l’entreprises).

Ce qui est vrai pour une entreprise privée l’est tout autant pour une entreprise publique. La différence essentielle étant ici que l’argent perdu le sera par le contribuable, qu’on va donc ponctionner d’autant plus. La doulourosité de l’action sera moins forte car mieux répartie en quantité et dans le temps. Mais le résultat sera le même…

Enfin, « contre la précarité » est tellement vague qu’ils auraient aussi bien pu mettre : « contre le cancer », « contre la pollution » …

la Vocifération Primale permet de relâcher la pression interne devant des atteintes à leur « bien-pensance » ; c’est une façon commode d’exprimer une frustration, sans en comprendre les causes profondes, et surtout, sans proposer de moyen de la surpasser.

Elle a par contre un effet direct : provoquant l’arrivée des médias comme les mouches sur des morceaux choisis, l’ampleur de la vocifération en est plus que doublée. A partir de là, les effets s’enchaînent : de 100.000 brailleurs, on fait rapidement 1.000.000 de grévistes. Et le million, c’est un chiffre symbolique. En euro, c’est le début de la fortune. En grévistes, celui de la fin pour un gouvernement.

Notes

[1] « 2003 – Le secrétaire général de Force ouvrière, Marc Blondel, est mis en examen pour « recel de détournement de fonds publics » dans l’enquête sur les chargés de mission de l’Hôtel de Ville à l’époque où Jacques Chirac était maire de Paris; il lui est reproché d’avoir bénéficié d’un garde du corps embauché et payé pendant plus de dix ans par la Ville de Paris. »

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