L’agacement

Bien que peu évoqué dans les médias traditionnels, et un peu plus sur internet, le président a donc passé de façon relativement discrète la moitié de son mandat, avec un débat très pastel sur un bilan pourtant … très mauvais. Et alors que l’opposition saute désespérément sur tout ce qui bouge pour tenter de trouver une unité qu’elle n’arrive pas à former ailleurs, on sent poindre comme … un agacement au sein de la majorité devant le déferlement maintenant continu de gaffes, bourdes,  bévues et boulettes de ses participants.

Pourtant,  si les membres du gouvernement, et, de façon plus générale, l’ “élite” qui nous dirige, faisaient un tantinet attention à ce qu’ils racontent, il n’y aurait pas matière à épiloguer.

Encore qu’à bien y réfléchir, les politiciens actuels n’étant finalement plus que des saltimbanques qui se chargent d’occuper un volume sonore et visuel de plus en plus important en pitreries ridicules, si ces derniers devaient s’arrêter, on se retrouverait à devoir contempler notre avenir lucidement, ce qui constituerait, pour ces politiciens, une horreur absolue puisqu’elle s’achèverait par leur mise en orbite à coup de pied au cul.

Je n’insisterai donc pas sur, par exemple, les amusants balbutiements d’Estrosi cherchant vainement le prix d’un timbre. La vidéo se suffit à elle-même.

Je ne reviendrais pas plus sur les affabulations de Sarkozy et de “son” Mur de Berlin, l’ampleur pris par l’affaire sur le net est amplement suffisante.

Et voilà donc la majorité forcée de composer avec les écarts de plus en plus pénibles des personnalités qui la composent. On comprend qu’elle finisse par perdre un peu son calme.

Et cette perte de sang-froid se traduit de façon parfaitement révélatrice d’une mentalité jacobine bien enracinée en France : puisqu’on se moque, puisqu’on entend grogner, puisqu’on fouine, puisqu’on se fait salement interroger, on va devoir trouver des moyens divers et variés pour faire taire les moqueurs, museler les grogneurs, écarter les fouineurs et enfumer les questionneurs.

Le dernier exemple en date, c’est la réaction lamentable d’Eric Raoult aux opinions de la récente gagnante Goncourt, qui exprimait son dégoût dans des mots assez fort de la politique sarkozienne.

Ni une, ni deux, Raoult a jugé nécessaire d’y aller d’un petit couplet offusqué expliquant qu’il serait nécessaire qu’une personne récipiendaire du célèbre prix littéraire s’abstienne de ce genre de commentaires, en appelant ainsi à un “devoir de réserve”. L’idée, derrière est simple : lorsqu’on devient médiatiquement significatif comme Marie Ndiaye, on entre, pour le député, dans le domaine public et on se doit d’encenser la France et son gouvernement, ou, si on ne le peut pas ou on ne le veut pas … de la boucler, en somme :

Une personnalité qui défend les couleurs littéraires de la France se doit de faire preuve d’un certain respect à l’égard de nos institutions.

Et le bouillant député d’y aller d’une question officielle à Frédéric Mitterrand pour lui demander ce qu’il comptait faire concernant les déclarations de la lauréate.

Comme je le disais en introduction, l’aspect comique des ébouriffantes conneries de nos politiciens s’émousse vite passé les trente ou quarante premières répétitions. Et c’est parce que je suis bon public… Après plusieurs années d’empilement laxatif de ce genre de saillies, on peut comprendre l’agacement du spectateur attentif de la vie politique française.

Sérieusement, ils prennent des vitamines spéciales en ce moment, les politiciens, pour sortir des bêtises à ce rythme ?

Toutes les semaines, c’est, au choix (cumul possible) :

  • une nouvelle taxe, parce que les impôts n’augmenteront pas, hein, mais tout le reste va enfler comme un panaris en fin de course,
  • une proposition de loi ahurissante d’un de nos sémillants ministres des courants d’air chaud et des vaguelettes dans de froids verres d’eau (ou de whisky, suivant le calibre du ministre),
  • une petite saillie d’un député en mal de sensation médiatique,
  • le rototo du petit dernier, Frédéric Lefebvre, régulier comme un coucou suisse,
  • et quand ce n’est pas Lefebvre, c’est Royal, qui n’en finit pas de rapetisser en couinant dans des aigus qui frisent maintenant les ultrasons.

Bref, un feu d’artificiels et d’effets spécieux dont le rythme cache mal la panique organisationnelle et la déconnexion croissante avec la réalité.

L’embarras est de plus en plus évident lorsqu’on se penche ensuite sur le Sondagate qui se profile ; je ne suis vraiment pas un admirateur de l’opposition en général, loin s’en faut, mais lorsque celle-ci réclame une enquête parlementaire pour obtenir des informations claires sur le lièvre qu’a soulevé la Cour de Comptes, concernant les sondages commandés par l’Elysées et qui ont coûté un pont aux contribuables, on ne peut que la soutenir : aux soupçons de manipulation de l’opinion que tout citoyen devrait naturellement avoir vis-à-vis du pouvoir, on doit aussi ajouter ceux liés à l’opacité des opérations qui ont entouré les factures du palais présidentiel sur ces enquêtes statistiques douteuses.

Et là, à nouveau, on sent poindre l’agacement dans les réponses de la majorité devant le problème : une telle commission d’enquête ne serait pas souhaitable, et puis bon, depuis quand le parlement lorgnerait sur l’exécutif ?, gna gna gna…

Je me demande cependant depuis quand l’exécutif peut se permettre une saine gestion de ses budgets ? La France serait-elle devenue à ce point corrompue que les actes présidentiels échapperaient à tout contrôle, et aux éventuelles sanctions qui accompagneraient des manquements ? Parce que bon, la Cour des Comptes restant purement consultative, on se demande qui, au final, peut bien faire rentrer dans les clous ceux qui font n’importe quoi …

Et, soyons honnête, comme il y a très très peu de chance que ce soit les députés (rappelez-vous, on trouve des pointures comme Raoult dans leurs rangs, hein), un seul constat surnage …

Ce pays est foutu.

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Commentaires28

  1. Criticus

    « on se doit d’encenser la France »

    Si un écrivain « gaulois » avait tenu les propos qu’elle tient sur un pays du Maghreb ou d’Afrique noire, il l’aurait perdu, son prix… Plus exactement, il n’aurait jamais pu l’obtenir.

    Qu’elle garde donc son prix et qu’elle reste en Allemagne, pays qui, comme chacun le sait, se porte à merveille…

    1. Peu importe : elle a bien le droit de dire ce qu’elle veut. Quant au prix Goncourt, ça n’est pas sensé être un prix de Bonne Représentation de la France à l’Etranger, mais un prix récompensant une œuvre littéraire. Non ?

  2. Higgins

    Personnellement, je n’ai jamais pu lire un prix Goncourt à l’exception de “Saint Germain ou la négociation” de Francis Walder (PG 1958, Folio n°2357) où la qualité de l’écriture le dispute à la profondeur du sujet. A lire donc. Quant à la version 2009, elle m’indiffère complètement comme l’avis de son auteur. Si cette dernière est heureuse en Allemagne, grand bien lui fasse. Pour autant, elle peut dire ce qu’elle veut mais je ne vois pas en quoi son avis présente un quelconque intérêt. Si elle souhaite déblatérer à tout va, qu’elle revienne à Paris, elle trouvera tout ce qu’il faut pour avoir des idées sur tout et surtout avoir des idées!!!
    Quant à Eric Raoult, les politiques français n’ont pas besoin de son aide pour paraître ridicule. Il peut donc s’abstenir de tenir de tels propos.

  3. Josick d’esprit agricole

    Il ne fait pas bon en France “de continuer de développer sur son blog les mêmes propos agressifs, dénigrants à l’égard de XXXX, de la justice, “, cela spécifié dans un jugement qui me limite alors à voir mes enfants de 12 et 14 ans seulement 22 heures par an, de plus en milieu médiatisé.

    De plus, à noter que XXXX n’est jamais nommée expressément sur mon blog mais à quand même en toute impunité violé mon droit d’accueil de mes enfants.

  4. Criticus

    @ H16 : si, j’ai d’ailleurs écrit « Qu’elle garde donc son prix », et suis d’accord avec toi pour dire que la réaction d’Éric Raoult est liberticide. S’il n’est donc pas question qu’elle perde son prix, donc, on peut, comme je le fais, s’interroger sur le fait que la francophobie soit devenue un pré-requis pour intégrer la prétendue intelligenstia parisienne. Car je ne trouve pas cela moins « lamentable »…

  5. laurett

    À propos de Marie N’Diaye encore… Je crois fermement que les récipiendaires de distinctions, étatiques ou non, ont bel et bien un devoir… de lucidité et d’esprit critique envers tous les gens qui leur accordent une importance. Et certainement le contraire.

  6. Flo

    C’est vrai qu’Estrosi se ridiculise sur cette vidéo, mais il faut reconnaître qu’il est bien aidé par Bourdin car sa première réponse est peu éloignée du bon prix.
    Il est compréhensible qu’un Ministre qui ne doit pas affranchir lui même son courier ne connaise le prix du timbre qu’à 10 % près. C’est certainement le ton méprisant et dubitatif de Bourdin qui l’a fait douter (genre :j’ai encore dû faire une gaffe et me trompper d’un rapport 10) et s’embourber dans des explications foireuses.
    S’il est bon qu’un présentateur/journaliste reprenne un politique qui se trompe sur un chiffre (et pourquoi pas le ridiculise en direct) il est regrettable qu’il ne le fasse presque jamais lorsque ce même politique émet une conternante bêtise sur un sujet mais en la présentant comme une opinion ou une idée.
    Par exemple écoutez l’interview par le même Bourdin de Ségolène ce matin.
    Il sait lui dire qu’elle a tort sur la nature des denrées volées dans les supermarchés (whishy, jeux vidéos…et non produits alimentaires comme elle le prétend pour étayer son propos sur les gens qui n’ont pas de quoi manger etc etc…)
    En revanche quelques minutes plus tard il la laisse sans réagir prononcer en peu de mots un nombre de bêtises affolant sur le travail des immigrés en situtation irrégulière…

    1. @Flo : excellente remarque. Mais ce qui m’enquiquine, dans le discours d’Estrosi, c’est a/ l’absence d’humilité (“je ne sais pas” suffit, ça arrive, ce n’est pas très grave), et b/ l’attitude qui consiste à noyer le poisson. On retrouve cette méthode dans absolument tous les interviews, chez tous les politiques. C’est usant.

  7. Flo

    Rien à redire sur votre remarque.
    Pour être tout à fait honnête il n’y a pas que chez les politiques que des gens qui ne savent pas cherchent à “noyer le poisson”…
    Je voulais juste souligner que les journalistes ne sont pas exempts de reproches (mais bon étant donnés vos billets à ce sujet j’enfonce une porte ouverte). Bourdin s’il n’était pas aveuglé par son propre mépris (trop visible à mon gout) aurait pu se contenter de faire remarquer à Estrosi qu’il n’était pas tout à fait à jour et qu’il s’était trompé de 10 % mais evidemment il l’aurait moins ridiculisé et n’aurait pas pu employer ce ton dégouté…
    Tout ça m’amène à une autre réflexion. Je suis assez impressionné, à l’heure où Internet permet de ne rien laisser passer et de ridiculiser en quelques clics pratiquement n’importe quel politique ou donneur de leçon, par la faculté de…(je cherche le mot) résistance morale? indifférence? récupération? absence de sens du ridicule? de toutes ces personnes qui continuent bravement comme si de rien n’était.
    La seule explication qui me vienne à l’esprit est que les places doivent être tellement bonnes à prendre et confortables qu’elles compensent ces quelques désagréments qui pousseraient tout individu “normalement constitué” à aller (au minimum) se cacher dans le trou le plus profond et le plus proche.

    1. @Monoi : je ne sais pas s’il s’agit d’un fake ou pas, mais c’est suffisamment drôle pour une nouvelle Demaerd 🙂 – c’est effectivement un fake, notamment l’adresse et le logo du consulat.

  8. Florian

    Si quand tu es “agacé”, tu considères que le pays est foutu, j’aimerai bien ne plus être dans les parages quand tu seras “énervé”. 😉

  9. bibi33

    Juste une remarque avec 52 il a presque bon Estrosi, car en fait c’est 51 en tarif lent (tarif économique aujourd’hui), et la lenteur c’est bien ce que La Poste maitrise aujourd’hui.

  10. maurice b.

    >Encore qu’à bien y réfléchir, les politiciens actuels >n’étant finalement plus que des saltimbanques qui se >chargent d’occuper un volume sonore et visuel de plus en >plus important en pitreries ridicules.

    Sarkozy a prononcé aujourd’hui un discours essentiel (et fortement applaudi) à La Chapelle en Vercors sur l’identité nationale.
    Beaucoup de passages du discours visent à remettre à leur place les liberaux mondialistes et on doit s’en réjouir.
    Sarkozy a en particulier insisté que se dire simplement citoyen du monde est insuffisant si on vaeut rester en France.

  11. Higgins

    Ran-tan-plan, respectez mieux celui qui est charge des intérêts de notre pays (et de la dette aussi). On ne dit pas Sarkozy (vous n’avez certainement pas gardé les vaches ensemble, même sur le plateau du Vercors) mais le président de la République, monsieur Nicolas Sarkozy. Il y a du laisser-aller au PS de droite. Ce n’est pas donc surprenant de voir les seconds couteaux révéler leur moi profond.

  12. Hesnoone

    “Quant au prix Goncourt, ça n’est pas sensé être un prix de Bonne Représentation de la France à l’Etranger, mais un prix récompensant une œuvre littéraire. Non ?”

    C’est malheureusement plus un prix récompensant une maison d’édition, le Goncourt fait vendre, qu’une œuvre littéraire. J’avais lu ou entendu quelqu’un en parler fort justement il y a quelques années… Il faut que je retrouve la source.

    1. @maurice : Mais qui diable vous parle de haine de son propre pays ? L’auteur primée n’aime pas Sarko. Faire Sarko = pays ou Sarko = les siens ou Sarko = soi, c’est du grand n’importe quoi à la maurice b. incorporated !

  13. maurice b.

    > elle a bien le droit de dire ce qu’elle veut.

    oui, comme Radio-Paris sous l’occupation.

    Ah, vous admettez donc enfin que la France est occupée !

  14. Gaël

    Pour une fois, Maurice tient des propos qui illustrent l’article, l’agacement de la “majorité” par rapport aux critiques. Bravo Maurice, il est rare que vous soyez pertinent 😀

  15. Flak

    “On ne bâtit rien sur la haine de soi, sur la haine des siens et sur la détestation de son propre pays », a déclaré le président de la République”

    ben tiens, c’est facile pour lui de la ramener.

  16. Flo

    Tiens au sujet de l’IDENTITE NATIONALE ce matin, encore chez Bourdin, l’invité était le Ministre de la Défense.
    Il en a parlé un peu, puis ils ont enchaîné sur l’Afganistan. Je ne devais pas être bien réveillé mais il y avait une forme de parallèlisme dans certaines parties du discours qui aurait pu conduire un auditeur peu attentif à se demander se quel pays il parlait exactement (droits des femmes, pays composite et métissé, économique et social à mettre en avant pour éviter les révoltes etc etc..).

  17. omer

    Notons au passage que notre nouveau ministre de la Culture a évité de se mouiller dans cette histoire…
    Vas-y Frédo ! Le métier commence à rentrer !

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