V for Villepin

Pendant qu’un quasi-super héros, au prix de sa vie, libère une Angleterre futuriste au prise avec un tyran totalitaire, en se lançant dans un combat pour la liberté, la France, encore une fois à la ramasse, doit se contenter d’une brochette d’anti-héros qui pataugent dans la vendetta à fonds publics…

Avec l’affaire Clearstream, on assiste en effet à ce que la vie politique française a de plus croustillant. Tous les ingrédients d’un roman de gare efficace sont réunis dans ce scandale choc pour politicien chic en mal de chèques :
– de l’argent, beaucoup. On parle de millions d’euros. De comptes au Luxembourg. De transferts, de banques discrètes…
– des acronymes aguicheurs (DGSE, DST), des institutions importantes (ministère de l’Intérieur, cabinet du Premier, l’Elysée)
– des taupes, des espions, des généraux dans le renseignement, de l’informatique haute-voltige
– des juges incorruptibles, des policiers qui perquisitionnent
– de l’aventure, du suspense, de l’action, des traîtrises, des coups de théâtre.

Franchement, de loin, on croirait lire un James Bond (évidemment, de plus près, on est plus proche des Infusions Saveur Du Soir, mais l’important, c’est le packaging, hein)…

Maintenant, si on fait le bilan réel de cette fumisterie, qu’a-t-on ? Galouzeau reçoit un papier indiquant qu’un de ses ennemis personnels fricote de l’argent sur des comptes à l’étranger ; il décide de lancer une enquête. Finalement, c’est bidon. Que peut-on reprocher à ce pauvre diable ? D’avoir utilisé des fonds publics pour mener une vendetta personnelle ? Bof, cela est monnaie courante, partout, à tous les échelons. En soi, cela n’est pas pire que les (nombreuses) affaires Pasqua, les (foultitudes d’) affaires financières liées à des financements occultes, à des emplois fictifs, … Rien que du banal.

En fait, au lieu d’un V For Vendetta, on se retrouve avec un M Pour Merdouillage : Villepin est assez mauvais, et il patauge parce qu’il a choisit de nier l’évidence, alors qu’au fond, même sans son agenda personnel chargé contre Sarko, il lui aurait fallu, en tant que ministre soucieux de son travail, approfondir l’enquête et savoir si le président de l’UMP était ou non mouillé. Non parce qu’il ne peut l’encadrer, mais bien parce que Galouzeau est un homme consciencieux, non ?

Mais non. Plutôt que choisir cette stratégie de défense, il tente le mensonge évident et éhonté ; en effet, il sait pertinemment qu’il a lancé cette enquête parce qu’il est retors (comme tout bon politique franchouillard). Et il sait que tout le monde le sait.

Finalement, rien de nouveau sous le soleil, cette affaire Clearstream… Cependant…

Cependant, elle provoque une fièvre sans précédent dans les couloirs de la République. La presse, à peine sortie des agitations sociales anti-CPE, semble s’émouvoir à grands bruits. Et cette agitation, assez disproportionnée, ressemble à s’y méprendre aux agitations précédentes, celles qui agitèrent le pays en Novembre pendant les émeutes, et en Avril pendant le front anti-CPE.

Encore une fois, cette remarque illustre combien le pouvoir des média est important et probablement sous-estimé. Le CPE, bricolage en mode mineur du CNE, bricolage en mode majeur du CDI, n’aurait même pas dû faire parler de lui plus qu’un entrefilet dans les journaux spécialisés. Mais l’usage par les syndicats (étudiants, puis lycéens, de salariés enfin) des média pour semer le vent leur a permis de récolter une tempête. Pour les émeutes de Novembre, l’usage auto-catalytique des images dans l’incitation à la surenchère avait quand même été noté lorsqu’une véritable course au nombre de voitures brûlées avait été engagée entre les différentes cités.

Ici, les média manipulent clairement l’opinion pour obtenir une tête ; car enfin, qui se fiche réellement, à part les présidentiables et les quelques politiciens habituels gravitant autour, des tenants & aboutissants de cette affaire, qui, rappelons-le, est totalement bidon ? Qui veut réellement savoir si une enquête fut diligenté sur Sarko ? Vous ? Moi ? Honnêtement, je n’ai que foutre des petites turpitudes de ces gens là. Beaucoup, je pense, regardent se dérouler cette affaire, l’air mi-goguenard, mi-incrédule, comme devant un Interville aux vachettes effervescentes, attendant de voir qui va chuter ; mais en réalité, tout le monde se fiche du quidam qui se prend les coups de cornes, personne n’accorde d’attention à la vachette. Seule la chute compte.

Un an à attendre, avant les élections présidentielles, semble trop long. On doit pouvoir insérer un changement de gouvernement, là, maintenant. Il va sans dire qu’un remplacement ne changerait absolument rien à l’état catastrophique du pays, mais fournirait aux média une excellente occupation jusqu’en juin.

La question devient alors : qui manipule les média pour que ceux-ci manipulent l’opinion ? Ne serait-ce pas, en application du bon vieux principe “Diviser pour mieux régner” … les politiques eux-mêmes ? Car finalement, tout le monde, à très peu d’exceptions, trouve son compte dans cette affaire :
– les adversaires de Chirac et son dauphin (ils sont nombreux), puisqu’ils sont tous deux mouillés jusqu’au cou.
– les complices de Sarko (puisqu’il en ressortira plus fort, victimisé).
– les socialistes puisqu’ils trouvent là un boulevard pour leurs critiques et peuvent espérer la mise en place d’un gouvernement Sparadrap dont l’inaction sera patente et bétonnée en douze mois tout rond.
– les extrêmes puisqu’ils peuvent fustiger les magouilles, les coups bas et la “politique politicienne”.
– les média pour tout le papier et l’audience que cela leur procure.

Par contre, les vrais perdants sont nombreux. Ce sont les Français.

Au contraire de Chirac et Villepin qui sont entrés volontairement dans l’arène pour jouer, nous allons tous perdre, et perdre gros, avec cette histoire, et le tout sans avoir jamais voulu jouer.

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Commentaires12

  1. chris

    Vous allez un peu vite en besogne…

    Etait-il préférable de taire l’affaire ? Vous dites : business as usual.
    Certes. Cette dernière fumisterie est l’héritière d’une très longue lignée.

    Ce qui a changé en revanche, c’est que le niveau de merde (M) approche dangereusement les bords de la coupe (C), eh bientôt débordera franchement (2).
    Or nous le savons E=MC2.
    "E" comme "explosion".

    Marre des tocards, des séniles, des minables (chalumeau avec ses sorties poético-cahiers de l’histoire-journal tintin-rigolotes, et tout à "lavement"), aussi trop c’est vraiment too much.

    Que les médias se déchaînent, que les socialos rameutent le ban et l’arrière-arrière-ban… eh bien je dois avouer qu’à présent -perso- j’y prends plaisir.

    Oui, la tête de Villepin doit tomber.

    Ca ne fera en rien avancer le schmilblick… nous sommes bien d’accord… mais ça nous fera du bien.

  2. Business as usual, certes, mais taire l’affaire, certes non. Je m’interroge simplement sur les motivations qui font que les média poussent tant à la roue pour obtenir la démission de Galouzeau… Qu’il tombe ou pas, finalement, n’est pas essentiel. Mais j’en conviens, “ça nous fera du bien” :).

  3. Rocou

    Il convient de préciser ce qui est "bidon" dans cette affaire car je trouve que le flou est soigneusement entretenu: Est-ce l’enquête? Est-ce le nom des personnes en cause ou est-ce la réalité des comptes à l’étranger?

    Prions pour que ces derniers soient bien réels parce que tant que les politiques grugent le fisc, ça nous laisse la possibilité technique d’en faire autant.

  4. Je pense qu’il s’agit du listing ; les comptes existent peut-être, des politiques sont très probablement mouillés, mais ce ne sont pas ces comptes là, ou pas sur ce listing là… Le flou a ceci de pratique qu’il bénéficie autant à l’accusation qu’à la défense.

  5. pierrem

    Vous allez voire qu’"ils" vont nous concocter une petite loi d’amnistie générale et on n’en parlera plus. Ca c’est déjà vu…

  6. Laurent

    "(…) tant que les politiques grugent le fisc, ça nous laisse la possibilité technique d’en faire autant."

    La possibilite technique, peut-etre, mais ne revez pas, Rocou. Les risques encourus n’ont rien a voir : connaissez-vous beaucoup de politiciens ayant fait de la taule ou ayant ete conduits a la ruine pour avoir gruge le fisc?

  7. Ash

    Comme d’hab, encore une affaire que je découvre via un commentaire sur le net, et non les médias que je ne lis/regarde/écoute plus. Et du coup, l’agitation parait toujours plus ridicule.

  8. @Ash : petit à petit, j’en viens moi aussi à la conclusion que le monde réel est de mieux en mieux représenté par les blogs, internet, et les moyens de communication du XXIe. Le monde politique s’apparente de plus en plus à un monde factice, virtuel, déconnecté de la vraie vie, et sa présentation par le monde paillette de la télé, de la radio, le vieillit au point de le rejetter dans un XXe qui semble déjà loin…

    Tout un sujet de billet !

  9. alphomega

    Affaire ou bien affaire désignée pour masquer une autre bien plus incroyable. Il se pourrait bien que tout ceci ne soit en fait que vengeance du milieu "entreprises subventionnées" (par commande étatique sur facturée et sur payée) pour maintenir le périmètre d’emplois abrités (déconnection du monde économique). L’Etat ruiné ne peut plus accepter ces transferts de complaisance, acheter 2 ce qui vaut 1 et que l’objet en question soit déphasé technologiquement! C’est qui se jouerait en fait en cette période de retour au réel. Il y aurait donc du chômage déguisé dans ces entreprises dites de technologie. Certains ex cassiques de ministères arrivés à des postes clé en ces entreprises jusqu’à maintenant assuraient le lien. Par ailleurs ces entreprises ont exporté ces mêmes biens avec des rétrocessions de commissions qui ont financé la politique, voire des politiques. Tous se tiendraient par leurs barbichettes. Mais l’Etat ruiné ne peut plus continuer. Ce serait le message envoyé par des politiques à ces brillants industriels! En retour cette affaire serait leur réponse!

  10. @alphomega : théorie intéressante. Si vous avez des liens ou des données concrêtes, je serai intéressé…

  11. alphomega

    @h16 : vous avez trés bien compris où regarder! En fait tout serait dans la presse ou presque, mais sans que les liens soient établis, simplement ils seraient en filigranes. Le mécanisme est connu, les entreprises en question sont connues… Mais les pointer revient à désigner le "parrain et la maffia". Le problème de tout ceci est la conséquence en endettement du pays tout entier, sans relever l’économie et sans relever le niveau technologique, et même en accélérzant en fait le "larguage" en voulant le réduire, arrivant simplement à maintenir les postes et avantages attachés, et en cercles concentriques jusqu’au bas des pyramides! Mais tout ceci est une hypothése, une théorie ou bien une fable, un hypothétique watergate gaulois, personne de sérieux n’oserait monter un tel scenario digne de la série IMF (Impossible Mission Force).

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