« Ca y est ! », semble-t-on chuchoter dans les couloirs gouvernementaux : les réformes sur les retraites et la protection sociale sont prêtes et peuvent être lancées sur la place publique, telles des morceaux de barbaque sanglante à une meute de chiens. Fillon, qui craignait une médiatite aigüe (maladie caractéristique des gens en mal de médiatisation dont la vedette est volée par d’autres), va pouvoir déserrer les sphincters à mesure que ceux des Français vont, eux, pouvoir se refermer bien vite quand le contenu de ces réformes sera totalement clair.
Et le brave ministre n’a pas ménagé ses efforts puisqu’il veut s’attaquer à deux gros morceaux : après le succès extraordinaire de la réforme des Universités – dont l’impact sera probablement comparable aux ondes de chocs titanesques de la rencontre inopinée d’une mouche sur un pare-brise de voiture à 120 km/h – les deux prochains domaines dans la ligne de mire gouvernementale constituent en effet un véritable plat de résistance d’un ministre et d’un président qui veulent à tout prix laisser une trace dans les livres d’Histoire.
Jugez plutôt : d’un côté, nous trouvons la sécurité sociale, institution devenue au fil des années un véritable Etat dans l’Etat tant par son budget que par son contingent d’employés, son mode de fonctionnement … truculent ou la place qui lui est accordée dans l’ensemble de la société française. De l’autre, Fillon, dont la cure de méthamphétamines ne fait que commencer, veut aussi s’attaquer aux retraites et plus particulièrement aux régimes spéciaux, dont la réforme est devenue le Graal des gouvernements passés tant il aura sauvagement déculotté de ministres qui s’étaient frottés au problème.
Donc oui, quoi qu’il arrive à présent, nos deux lascars laisseront une trace dans l’histoire en tentant l’attaque de ces deux pics par la face Nord. Reste à savoir s’il s’agira d’un chemin débroussaillé, nettoyé des pires engeances qui l’obstruent actuellement, laissé à leurs successeurs et aux générations futures, la tête haute et le coeur rempli de la joie du devoir accompli (trame sonore : Jésus Que Ma Joie Demeure, Bach), ou, plus probablement, la trace profonde d’un impact violent sur du granit, toutes dents devant (trame sonore : Looney Tunes) …
En tout cas, à n’en pas douter, le pays peut se préparer à vivre quelques instants épicés. Alors même que la rentrée laisse pour le moins songeur quant au plan communication du gouvernement devant les couacs répétés des uns et des autres, boutinades et ramayades s’enfilant comme perles sur un sautoir de Prisunic, il apparaît que tout aura été fait pour que ces deux énhaurmes sujets pêtent au museau des protagonistes dans l’odeur guerrière du napalm au petit matin des merguez sur les boulevards parisiens.
Le sujet de la protection sociale est, par exemple, particulièrement explosif : Sarkozy, fraîchement élu, se rappelle sans doute la polémique qui naquit entre les deux tours de la présidentielle et qui s’enkysta sur la TVA sociale, nouvelle chignole proctologique à placer dans les outils pratiques de l’homme politique en mal de sensations fortes. Pour le gâte-sauce Fillon, il s’agira sans doute de déplacer habilement le calendrier d’application des bouillons infâmes qu’il nous concocte dans les mois d’été de 2008, histoire de laisser passer les élections municipales dans la quiétude d’un pays sous tranquillisants. On voit mal en effet les intermittents du spectacle de Bercy nous ciseler une augmentation de la TVA de … cinq points (!) en ce début de rentrée, alors que partout les hommes du président répètent, tel un mantra de cascadeur avant un saut de l’ange qu’on devine fatal, qu’il faut redonner du pouvoir d’achat aux Français.
Pourtant, pour redonner des thunes aux Français, une méthode trèèèèès simple consiste précisément à … baisser la TVA (baisse financée par les emplois que certains secteurs de l’industrie rêvent de pouvoir financer par une TVA moindre, justement). Il y a fort à parier qu’en faisant exactement le contraire, on observe d’ailleurs le phénomène inverse de celui qu’on recherche, ce qui n’étonnera que les pathétiques alchimistes de pacotille qui bricolent des taux dans leurs arrières-cours nauséabondes au mépris de la réalité compacte et anxiogène de ce bas monde. D’autant qu’en plus, l’effet magique d’une hausse de TVA avec réaffectation partielle des recettes à la dette, on a déjà donné en France. C’était en 1995, et on connaît les résultats : miteux.
Quand on voit d’ailleurs que Besson (le transfuge, pas le cinéaste) en revient à cette idée gluante avec une bonne humeur presque gourmande, on se dit que l’imagination, dans ce pays, a décidément foutu le camp … pour aller se réfugier dans le cerveau malade de certain producteur altermondialeux, seul capable de voir dans le système français de protection sociale un modèle de vertus et d’équilibre financier. Finalement, la solution, c’est peut-être ça : un moral d’acier et une vision rosée complètement déconnectée des réalités de terrain, que seules des injections massives de moraline à haute concentration parviennent à faire durer. Et à bien y réfléchir, gouverner un peuple de camés représentera peut-être le seul espoir de faire encore fonctionner ce système tant les preuves de son inefficacité flagrante s’accumulent…
Mais il en faut plus pour faire plier un Fillon. A lui seul, il sera bientôt la nouvelle référence de matériau à haute résistance de charge, l’étalon de mesure du stress, à côté duquel l’acier, le titane, le carbure de tungstène ou le diamant feront figure de caoutchouc mousse pour nourrisson festif : notre premier ministre, ses muscles turgescents de réformateur bandés devant l’effort constant qu’il va fournir est en train de s’attaquer – aussi ! – au bastion bétonné des retraites spéciales.
Evidemment, il faudra au super-héros body-buildé de Matignon City bien plus que de la résistance à l’effort pour contrecarrer les plans machiavéliques du terrible docteur C. Géthé et de son acolyte lycanthrope à l’hypertrichose galopante, Fran Soichéreck. Ces deux lascars ne se laisseront évidemment pas faire et, forts de leur base d’hommes de mains habilement disséminés dans les rouages essentiels des administrations publiques et autres cocotiers de l’infrastructure étatique, ils feront tout pour entraver la marche irrésistible du porte-drapeaux héroïque de la Nouvelle Réforme, au slip d’acier et aux méthodes de ninja furtif éprouvées.
En réalité, il est plus que probable que le petit Fillon, à l’habitude des douze ou quinze gouvernements qui l’ont précédé sur cette douloureuse pente, se contentera de faire des réformettes parcellaires, ou de réduire la portée des changements qu’il tentera en les étalant, telle une confiture trop fine sur une tartine trop longue, sur les dix, vingt ou trente prochaines années. A ce titre, l’égalité de traitement entre le privé et le public devra se faire encore longtemps attendre, égalité qui devrait être la règle dans ce pays qui se gargarise de droitdelhommisme bon teint, d’égalitarisme version maousse et de solidarité inter-générationnelle gluante, mais égalité qui se contente d’être un petit paravent honteux à toutes les extorsions de richesses des classes les plus laborieuses au profit éhonté et presque médiatisé des classes dirigeantes…
Evidemment, l’apparente simplicité de la proposition (« On aligne tout, les enfants, zou ! ») ne doit pas faire croire en la naïveté de l’occupant de Matignon. Les soi-disant négociations risquent de tourner court, ou, plus probablement, se traduiront par une dilution de la réforme. Le but des syndicalistes n’étant rien d’autre que la conservation de leur parcelle de pouvoir, toute avancée pour le privé dans le domaine des retraites se traduira mécaniquement par une perte ailleurs, perte au moins aussi douloureuse, pour ces mêmes salariés du privés suivant l’adage logique « Ces salauds de riche paieront, je vous le dis ».
Concrêtement, la génération qui paye maintenant continuera de payer, de plus en plus, et pour recevoir de la génération suivante des clopinettes, lourdement taxées et de plus en plus courtes.
Le seul intérêt des manœuvres est l’aspect prévisible des agitations qui vont avoir lieu. La seule question qui méritera d’être posée sera de savoir combien de temps la petite paire de couilles raisins secs partagée par le président et le premier ministre restera chevillée aux corps des élus, question qui permettra de déterminer exactement de combien ceux qui bossent vraiment vont se faire enfler.
En attendant, je vous recommande de préparer votre petit portefeuille et du baume Kamol.
Rien à dire. C’est au poil.
La chute… le baume Kamol. Oui. Ou la vaseline. Parfait.
Toutefois… Sarko parlera le 18. Faut laisser sa chance au produit, n’est ce pas ?
😉
Oui, rien à dire,
c’est parfait.
Bravo !
Rahhh! Mais laisse nous un peu rêver h16!
Arf, j’ai trop peur pour pour Fillon, l’a pas la gueule d’un mec résistant, plutôt celle d’un mec qui va carboniser et qui va soigner ses blessures en s’exilant dans une fac canadienne pour enseigner les sciences politiques, pour tourner la page :p
Exellent. Bon taux de probabilité.
Un des possibles toutefois.
Attention toutefois aux répétitions dans les figures de style humoristiques et les images saturées d’adjectifs. A la longue ça pourrait lasser les grincheux. J’ai quand même bien ri.