Progressivement, alors que le choc du Non de mai 2005 s’estompe et que nos joyeux hommes politiques sentent se rapprocher l’échéance de 2007, les rangs, distendus et clairsemés, devraient se reforment pour préparer les offensives électorales. Mais non !
En effet, alors que le pays est en proie à des spasmes de plus en plus violents, nos soutiers du Modele Français ™, au contraire, ont de plus en plus tendance à se tirer dans les pattes, au point que les clivages droite-gauche, qu’on dépeignait jadis comme presque caricaturaux, ne sont plus maintenant qu’un lointain souvenir.
Progressivement, chacun s’active à ne pas se rassembler, et à fourbir ses armes avec la plus grande mauvaise foi, en prétendant officiellement écrire un programme, proposer une motion, lancer des idées (en l’air, généralement, en comptant celles qui retombent).
D’idées, que nenni : on fera dans le réchauffé. Les imbéciles qui votent n’ont de toute façon pas suffisamment de cerveau pour en comprendre le début d’une, alors un programme entier, pensez donc !
Par contre, il faudra occuper, chacun dans son coin puisque nulle entente n’est possible, le plus possible les médias pour faire parler de soi. Dès lors, chaque petit orfèvre de l’Etat Tout Puissant se fera un plaisir de montrer tel ou tel paille dans l’oeil de ses voisins, en oubliant la proverbiale poutre qu’il risque de se prendre violemment dans l’occulaire en mai 2007.
A droite (ou ce qu’il en reste), plusieurs camps se dessinent : nous avons des sarkozystes, des villepinistes (ou villepinois, ou villepinceurs, au choix), des lepénistes et des villieristes. Au milieu[1], on pourrait dire qu’il y a des bayrouxiens ou des bockelisants.
A gauche, il y a eu explosion.
C’est une explosion lente, comme au ralenti dans un film américain à grand spectacle, en bullet-time. Mais elle a lieu tous les jours un peu plus, un peu plus vite…
A very long time ago (il me semble), le PC a été satellisé dans une galaxie far far away. Ses agitations pathétiques n’en donnent que plus de forces aux mercenaires du Facteur Fou. Nous ne nous éterniserons pas : la cause est entendue tant les solutions prônées sont en phase avec la réalité.
De son côté, le PS semble partir en plusieurs bouts distincts avec des morceaux de politique cohérente dedans. Comme le yahourt avec des morceaux de fruits dedans, on sent nettement que des idées floculent, mais on n’identifie que rarement lesquelles, sauf celles avec le goût le plus prononcé.
A la suite du Trafalgar que constitua mai 2005, le secrétaire général, François Hollande décida de lancer une consultation. Ceci provoqua la production de quelques motions, avec des courants internes pour chacune d’elles, et des dissensions de plus en plus graves au fur et à mesure que le détachement palpable des militants d’avec leurs leaders se faisait sentir.
Nous avons donc des hollandais, des fabiusiens, des monterbourgeois, des mélanchonillons, etc… à ne plus rien y comprendre. Bientôt, il faudra le nuancier Pantone(r) pour s’y reconnaître dans les différentes teintes du rouge au rose en passant par le gris, l’indéterminé ou le transparent que le PS exploite.
Je passerai rapidement sur les péripéties hilarantes du vote qui renvoya la contribution de Fabius au rang qu’elle n’a jamais réellement quitté (une faible minorité) et qui permit à ce dernier de s’offusquer de la régularité du scrutin (étape standard : quand le résultat n’est pas bon, dénoncez les irrégularités, puis le mode de scrutin, puis les votants mais jamais vous-même).
Maintenant, dans tout cette quincaillerie, quelles seront les vis et les boulons qui nous serviront, en mai 2007, pour construire une France qui gagne ?
Sérieusement ?
Prendriez-vous le risque de confier l’édification de votre maison à une entreprise de maçonnerie, sachant qu’aucun ouvrier pour le moment n’est fichu de s’organiser pour simplement aller chercher les matériaux et fournir un devis ? Fileriez-vous un blanc-seing à ces gens qui, d’un moment à l’autre, peuvent passer de la plus cordiale amitié à la plus parfaite haine sordide telle qu’on n’en fait guère qu’entre voisins se battant pour une même source d’eau ?
Rappelez-vous, il ne s’agira plus alors, de diriger un comité local, une réunion de meeting, ou même un groupe politique, mais bien de redresser la France, partant, en plus, d’un niveau particulièrement bas. Il s’agira d’insufler à 60 millions de personnes un élan suffisant pour les propulser, enfin (!), dans le 21e siècle…
Pour le moment, à chaque problème, ils proposent une intervention de l’état. A chaque mal, une dépense. A chaque gangrène, de l’aspirine. Seule change la forme d’intervention entre la droite et la gauche.
Mais aucun de nos Bricoleurs du Budget des Autres ne fournit un discours clair : moins d’état, moins d’impôts, moins de taxes, plus de libertés.
A chaque fois que l’un deux ouvre le bec, c’est, à la suite d’une observation confinant à la banalité la plus consensuelle, pour proposer une dépense. Mais, en matière d’idée neuve, chaque parti semble incroyablement démuni.
La seule chose qui ne semble pas manquer à tous ces beaux partis politiques, c’est le cash pour produire des âneries.
Notes
[1] Je dis milieu, pas centre, car centre serait donner trop d’importance à un micro-parti aux micro-idées.