Préfon, plus un rond ?

Décidément, rien ne va plus en cette fin d’année ! Toutes les certitudes, solidement ancrées dans la réalité et toutes les assurances garanties par l’Etat omniprésent, omniscient et omnipotent, se délitent dans une grande bouffée d’air chaud qui fait s’envoler les voiles légers des pieux mensonges politiques dont l’Etat était couvert et qui le mettent à nu : même pour les fonctionnaires, même pour la Préfon, des rentes garanties à vie, ça n’existe pas

Rebondissement, donc, dans la longue histoire des retraites françaises.

Comme beaucoup ne le savent pas, si les retraites sont dites par répartition pour tous les Français, certains ont le délicat privilège de pouvoir cotiser à des retraites dites par capitalisation, avec, cerise sur le caviar, une garantie de rente à vie.

C’est en tout cas ce qu’offre, pardon offrait Préfon, le fonds de capitalisation, ouvert aux fonctionnaires (et seulement à ceux-là) et dont la gestion permettait jusqu’à récemment de « garantir à vie » les rentes de ceux qui en bénéficiaient. Inutile de préciser qu’un tel montage ne peut fonctionner qu’avec une garantie étatique derrière : aucun organisme ne peut garantir, à partir de versements non garantis, des rentes garanties sans limitation de durée (si on ne peut pas prévoir parfaitement ce qui rentre, il paraît difficile de planifier exactement ce qui va sortir).

C'est pas gagné

Et voilà donc que le fonds Préfon, investi très majoritairement en … obligations d’état (les bons d’état, en AAA, c’est du solide !), doit provisionner plusieurs centaines de millions d’euros pour satisfaire aux exigences de couverture des besoins. Oh, certes, sur le papier, tout va encore très bien : les 91.000 bénéficiaires de rentes continueront de toucher des ronds, et les 370.000 affiliés pourront continuer de verser à ce fonds sans craindre une disparition prochaine de l’édifice.

Mais en attendant, ce sont donc les assureurs et réassureurs de ce fonds qui vont devoir boucher le trou, au moins pendant le temps où l’argent correspondant sera immobilisé. Et les clients de ces assureurs (AXA, CNP, Groupama, Allianz) n’ont aucune crainte à avoir pour les coûts de prestations. Si si.

Si l’on se rappelle que l’ensemble des retraites par répartition des français non privilégiés est certainement moins bien géré que Préfon et qu’en plus, la couverture financière entre les actifs et les retraités n’est pas orientée au beau fixe, on peut trouver cette péripétie douteusement rassurante.

Vous ne trouvez pas ?

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Commentaires19

  1. Epicier vénéneux

    Vous oubliez de préciser que les versements au Préfon effectués sur l’année fiscale n apparaissent miraculeusement comme un abattement non plafonné sur la déclaration de revenus de l’année fiscale (n+1). Ce serait vraiment mesquin de ne pas pouvoir échapper à l’impôt sur le revenu alors qu’on a déjà la possibilité de capitaliser égoïstement dans son coin.

    Vous savez qu’une fois j’ai balancé la moitié d’une pinte de Guinness fort bien tirée à la gueule d’un coco qui m’a sorti l’excuse du « si t’es pas heureux, t’as qu’à passer les concours de la fonction publique »?

    Pas pour l’excuse, mais pour le fait qu’il se soit permis de me tutoyer. Camarade.

    1. Toni

      Epicier vénéneux, avec les fêtes de fin d’années … Les cocos, je les entends débiter leurs anneries pendant tout un repas. Le coco dont vous parlez … J’imagine qu’il a du vous causer d’une façon à peine aimable en plus de vous tutoyer.
      Très très courageux votre geste. J’ai souvent eu envie de faire la même chose.

      Les cocos ont le vilain défaut de vouloir imposer leur façon d’être et de vivre à tous ceux qui sont quelque peu différents d’eux. C’est un cauchemard de passer ne serait ce que quelques heures au milieu de ces gens.

    2. Sanksion

      Jeter de la Guiness alors que des millions d’alcooliques sont en manque à travers le monde … quelle honte.

  2. Serge Cheminade

    Il n’y a pas trou au Préfon comme tu le penses mais une gestion conforme à celle qui se pratique dans les entreprises.

    Autrement dit il n’y a pas de problème de trésorerie. Par contre contrairement aux retraites du privé, le versement des retraites futures doit être assuré. L’argent que va apporter les assureurs ne va pas servir à payer les retraites mais à garantir le paiement de celles qui ont été promises. Avec ce système s’il n’y a plus de cotisant ou s’il y en a moins, le paiement des retraites et garantie. Avec la retraite par répartition il n’y a plus rien pour payer les retraites.

    Donc ce qui va être payé par les assureurs va être placé… à ce qui parait il y en a qui ont besoin d’argent.

      1. Serge Cheminade

        Je pense que l’article de lesechos.fr cité en lien par H16 explique assez bien le problème. Cependant beaucoup ignorent comment doit être comptabiliser un engagement dans une entreprises je l’explique à :
        http://www.orvinfait.fr/immensite_de_la_dette_publique_francaise.html
        où je montre que la dette publique n’était pas de 1 500 milliards d’euros mais de 7 000 si la comptabilité publique respectait les règles comptables en vigueur dans les entreprises.

        Le préfon qui est une caisse de retraite complémentaire créée par les fédérations de fonctionnaires CFDT, CFTC, CGE-CGC, FO, qui en assure à tour de rôle la présidence doit obligatoirement respecter les règles comptable en vigueur dans les entreprises et non celles utilisées par l’Etat d’où une certaine incompréhension et peut-être une mauvaise gestion des actifs.

        Les actifs du préfon sont constitués pour 77,37% d’obligations. Compte tenu de ceux qui président à la gestion de ce fond il y a fort à parier qu’il s’agit en majorité d’obligations concernant la dette de la France. Or cette dette tourne. Les anciens emprunts sont remboursés et d’autres sont émis. Quand les taux d’intérêts sont élevés ce qui était le cas autrefois, une obligation de 100 euros était monnayée plus chère qu’une obligation de 100 euros de maintenant car les taux d’intérêts sont plus bas. Or c’est la valeur de vente qui parait dans les comptes et non pas la valeur de 100 euros. Conclusion au niveau comptable, même s’il y a toujours le même nombre d’obligations de 100 euros, les actifs sont valorisés à une valeur moindre qu’à la fin 2009. Il n’y aurait pas eu ce problème si le portefeuille était composé à 77,37% d’actions puisque cette année leur valeur de vente a nettement augmenté :
        http://www.lefigaro.fr/bourse/2010/12/31/04013-20101231ARTFIG00028-bourse-les-experts-anticipent-une-hausse-de-10-en-2010-.php

        9,2 milliards d’euros d’actifs pour 91.000 retraités concernés représentent 101 098.90 euros par retraité. Donc pas de panique il ne manque pas d’argent pour payer les retraites complémentaires.

    1. Je n’ai pas dit qu’il y avait un pb de trésorerie. Je pose simplement deux questions :
      – pourquoi l’état est-il garant de la partie « rente fixes à vie », et pas pour les autres retraites ?
      – si Préfon est ric-rac sur le plan gestion alors qu’il est globalement mieux géré que les autres retraites, cela ne donne-t-il pas un peu froid dans le dos concernant ces dernières ?

      C’est tout.

      1. Serge Cheminade

        « si on ne peut pas prévoir parfaitement ce qui rentre, il paraît difficile de planifier exactement ce qui va sortir »

        C’est un système géré par les assurances. La prime est fonction du risque. Il n’est certes pas évident de prévoir la date de décès d’un individu comme il n’est pas possible de prévoir ni les dates, ni le nombre des incendies de maison. Il est vrai qu’il n’est pas possible de prévoir exactement ce qu’il va sortir mais il est possible de prévoir la somme qu’il faudra probablement débourser en tenant compte de l’allongement de l’espérance de vie. Les calculs étant théoriques il faut prendre une marge pour être sûr de couvrir le risque et c’est bien ce que fait Préfon.

        Les assurances constituent un capital en fonction du risque pris. S’il n’y a plus d’actif qui cotise au Préfon, les retraites seront quand même versées jusqu’à échéance. Dans ce régime les actifs cotisent pour eux-mêmes. ( D’après ton texte je pense que tu as compris que les actifs cotisaient pour les retraités ce qui est faux pour Préfon )

        Pour les retraites par répartition il n’y a pas de capital de constitué pour garantir les retraites. L’Etat donne des droits à retraite mais il ne constitue pas ou très peu de provision pour garantir ces droits. Autrement dit si les actifs se révoltent et ne veulent plus payer pour les autres, s’il y a un chômage massif, s’ils quittent massivement le pays, s’ils ne font pas assez d’enfants, si l’espérance de vie augmente… il n’y a plus assez d’argent pour payer les retraites et il faut réformer le système. Autrement dit les droits promis par les politiques avec ce système ne peuvent pas être tenus. Si des assureurs proposaient un tel système, ils iraient en prison pour escroquerie.

        Il n’est pas possible de comparer un système basé sur une bonne gestion comptable et un autre dont la gestion est basée sur des principes d’escrocs.

        Je sais. C’est une comparaison qui est souvent faite lorsque l’on compare les fonds de pension américains avec la retraite par répartition à la française. C’est ainsi qu’en 2008 les fonds de pension américains ont connu de fortes pertes comptables car leurs actifs comptaient des actions dont les prix de vente avaient fortement chuté. La comptabilité a enregistré une forte perte de valeur et donc un important déficit mais les actions étaient dans leur grande majorité stockées et non vendues. Voir par exemple : http://www.oecd.org/document/48/0,3343,fr_2649_34853_41843386_1_1_1_1,00.html

        Ce qu’oublient de dire les défenseurs du système par répartition c’est que si avec la crise la valeur des actions fond, les actions ne disparaissent pas. Le déficit n’est que comptable. C’est ce qui se passe pour Préfon avec les obligations. Mais le problème comptable avec les actions n’est que passager, leur prix finit toujours par remonter. Sur contrepoints on ne l’oublie pas :
        http://www.contrepoints.org/2010/09/23/36-le-systeme-prive-de-pension-chilien-sort-indemne-de-la-crise

        Les actifs financiers de la retraite par répartition ne dévaluent pas autant ou n’augmentent pas autant pour la bonne raison qu’ils sont quasi inexistants. Quand on a rien, on ne perd jamais rien. Doit-on vraiment en déduire que le système par répartition est plus stable que le système par capitalisation? Autrement dit préfère-t-on être pauvre et dépendre de la taxation du travail des autres (répartition) ou être riche et dépendre de revenus issus du patrimoine que l’on a soi-même accumulé (capitalisation)?

        1. je pense que tu as compris que les actifs cotisaient pour les retraités

          Non. J’y parle même de « retraite par capitalisation« .

          les droits promis par les politiques avec ce système ne peuvent pas être tenus.

          Même chose dans le cas de retraites à prestations définies à l’avance.

          Il n’est pas possible de comparer un système basé sur une bonne gestion comptable et un autre dont la gestion est basée sur des principes d’escrocs.

          Si si. C’est tout à fait possible. Si le premier a des difficultés la crise venue, le second va à la catastrophe. C’est tout l’intérêt de comparer, justement.

          Mais l’intérêt de la capitalisation n’est pas dans sa puissance par rapport à la répartition. Cette capitalisation est valable pour deux raisons :
          – morale : on n’oblige personne à payer pour d’autres.
          – économique : le risque porté par une retraite ne fait pas peser de risque sur les autres retraites.

    2. cac 40

      Ce qu’il convient surtout de mnetionner : c’est qu’aucune garantie n’est à 100%, ndlr. Etat ou non en caution.
      Aujourd’hui les agences de ratings font la pluie et le beau temps sur les marchés financiers et si demain le joli triple A de la France (car c’est la retraite tricolore dont il s’agit ici) venait à vaciller pour des raisons d’endettement de plus en plus pléthorique, nous pourrions pourquoi pas connaître un jour ou l’autre les affres de la Grèce ! de l’Irlande… du Portugal demain sans doute…

  3. vincent

    Il en est ainsi de tous les fonds à prestations définies à l’avance: il arrive un moment ou la collecte est insuffisante. Seul les systèmes à cotisation définies mais à rente non garantie sont viables.

  4. Herstal

    Comme toute entreprise mafieuse ; la prefond n’est qu’un avatar du cref.
    Dont les ‘nantis’ qui y adhèrent ont une assoce de ses victimes :
    http://cids-cref.net/
    bien sur sans contrôle de la monnaie, impossible de maintenir la valeur du capital, sans être entrainé dans les délices de la gestion à risque.
    Entendu delamarche cette semaine, une phrase culte :
    – la monnaie commence furieusement à ressembler aux assignats !
    Dommage que ce pays ne s’adresse plus à nous que comme à des enfants…

  5. Nick de Cusa

    A la place de l’expression « retraites par répartition » préférer le descriptif historico-technique : système Pétain-Madoff.

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