A de nombreuses reprises, j’ai eu l’occasion d’évoquer ici les Fluffys (ou bien-pensants) : ce sont d’admirables petits animaux, pétris de bons sentiments, issus de la culture socialiste hydroponique (i.e. n’ayant pas les pieds sur terre), et toujours prompts à s’enflammer pour une cause ou une autre, en dépit de tout sens critique. Pas bien méchants, vous me direz… Pourtant, en réalité, les Flufflys sont de terribles carnassiers.
L’enfer est (et on peut le vérifier) pavé de bonnes intentions.
L’enfer que nous pavent les Fluffys est l’un des pires : il s’agit d’un pandemonium jonché des restes de millions d’êtres humains sacrifiés sur l’autel d’une cause idiote. Alors même que, déjà, des millions sont morts à la suite d’idéologies nauséabondes, les victimes des Fluffys sont mortes à cause d’idéologies non pas nauséabondes, mais simplement stupides, enduites d’un caramel sirupeux épais, surdosé en moraline, et totalement opaque au bon sens.
Dans ces idéologies idiotes mais massacrantes, on trouve la version dévoyée de l’écologie. Je ne parle pas ici de cette écologie au sens propre du terme, c’est-à-dire la science qui étudie le milieu, et les interactions des différents êtres vivants dans ces milieux. Non, je parle du mouvement mondial lobbyiste qui vise à promouvoir l’idée que l’Homme est, de base, nuisible à la Nature, qu’il s’en serait extrait pour en profiter unilatéralement, et que son apport sur Terre serait au mieux nul, au pire infiniment négatif.
Je parle aussi de sa dérive naturelle, toujours ultrapolitisée, qui promeut l’interventionnisme individuel, de groupe, de masse et d’état et prétend aider la Nature en entravant l’Homme dans un salmigondi de contraintes toutes plus idiotes les unes que les autres, en vendant du catastrophisme facile et des visions apocalyptiques construites sur le mode Nostradamus’s Back With A Vengeance.
Evidemment, pour utiliser le concept d’ “idéologie massacrante”, il faut qu’il y ait un massacre. Pour le cas qui nous occupe ici, je parle effectivement d’une hécatombe. Je parle d’une bonne trentaine de millions de morts.
Comment en est-on arrivé là ? Le mécanisme est toujours le même (hélas) et produit (hélas) toujours le même résultat.
Phase I : un produit est découvert, qui permet de résoudre de façon efficace un problème que se posait l’humanité depuis la nuit des temps. Ce problème peut être d’ordre énergétique, agricole, financier, technique, sanitaire, peu importe.
Phase II : le produit, de surcroît, est facile à produire, extraire, utiliser ou consommer. Il peut l’être par tous sans grandes difficultés et amène très vite des résultats spectaculaires ; les effets sur la société humaine sont palpables. Comme le produit est produit/vendu à grande échelle, il génère un cash-flow pour son/ses inventeurs/exploitants/producteurs/vendeurs une marge importante.
Phase III : un groupuscule s’offusque de ces marges. Comme le produit en question permet de résoudre un problème, le groupuscule estime donc que certains s’enrichissent sur le malheur des autres. Un glissement sémantique s’est déjà opéré. Il continuera par la suite de pire en pire. Le groupuscule va donc, consciemment ou non, étudier tous les effets pervers ou supposés pervers que l’introduction de la nouveauté aura déclenchés. En général, il n’est pas trop dur d’en trouver : puisqu’avant, on avait une situation misérable mais stable, la nouvelle situation, même si elle est objectivement meilleure dans le domaine d’action de la nouveauté, apporte au moins un inconvénient : elle est instable puisque produit des changements importants dans les sociétés humaines concernées. Tout changement est potentiellement dangereux. Le groupuscule, aidé de quelques médiateurs complices, n’aura pas de mal à effectuer le glissement sémantique suivant : tout changement est dangereux (et pouf, le potentiellement est placé en orbite, in a galaxy far, far away).
Phase IV : l’attaque en règle peut avoir lieu. Elle fera feu de tous bois. Toutes les publications, scientifiques ou non, tous les témoignages, vérifiables ou non, se verront ajoutés à la thèse montrant que le changement introduit n’est pas bon et qu’il faut vite vite revenir en arrière, trouver une alternative, faire intervenir l’état, changer la donne ! Pour cela, on aura tôt fait de mettre en exergue tous les rapports alarmistes :
– la mort de centaines d’espèces animales pourra y jouer un rôle important
– si le sort tout entier de l’humanité est en jeu, on y incluera la possibilité d’un armageddon long, pénible, et pas trop loin dans le futur (mais pas trop proche, histoire que le temps puisse passer si jamais on se trompe).
– on prouvera que l’apport de la nouvelle technologie, finalement, est au mieux globalement neutre, au pire néfaste pour la Nature, l’Humanité[1], et toutes ces petites choses auxquelles chacun(e) se doit d’être attaché (comme, par exemple le caramel raté au fond de la casserole, ou le plongeur à ses semelles de béton).
Ce schéma se retrouve, avec de subtiles variantes, pour les OGM, le réchauffement climatique, et, notamment, pour le DDT.
Ce composé chimique permet de façon assez simple de débarrasser l’humanité d’une plaie qu’elle trimbale lourdement depuis des milliers d’années : la malaria. Dans la seule Afrique Sub-Saharienne, la malaria détruit 70% plus d’années de vie que ne le font tous les cancers dans tous les pays développés réunis. Des chercheurs de l’OMS ont décrit la pulvérisation d’intérieur de DDT comme la forme de lutte la plus facilement applicable à grande échelle contre la malaria. Le DDT est souvent l’insecticide de choix parce qu’il est à la fois bon marché et efficace.
Mais voilà. Comme noté, il est à la fois bon marché et efficace. Et cela, c’est une faute de goût pour le Fluffy. Car s’il est bon marché, un ou plusieurs industriels vont pouvoir le vendre facilement, faire une marge, et s’enrichir. S’il est bon marché, il va être massivement utilisé, et va obligatoirement provoquer des changements, qui, pour le Fluffy, seront néfastes.
Le DDT doit donc être mauvais. Or, dans les années quarante beaucoup de gens ont été délibérément exposés à des concentrations élevées de DDT par les programmes de saupoudrage ou l’imprégnation des vêtements, sans aucun effet sanitaire apparent. Comme le souligne The Lancet, “Il y a probablement peu d’autres produits chimiques qui ont été étudiés aussi profondément que le DDT, expérimentalement ou sur l’être humain. Il est rapidement apparu clairement que la toxicité cutanée du DDT sec était très basse, mais même la toxicité orale dépendait de la composition du régime. L’ingestion du DDT, même répété, par des volontaires ou des personnes tentant de se suicider a indiqué une basse létalité.”
Flûte : le DDT sert l’humain et ne lui est pas dangereux. Oui, mais alors, il est forcément dangereux pour … la Nature. Vlan. Et comme par hasard, on va trouver une étude pour appuyer ce point de vue, qui prouverait, par exemple, que le DDT fragilise les coquilles d’oeuf. Rendez-vous compte ! Ca va tuer des oiseaux !
Et là, miracle, tout le monde va marcher. Depuis le milieu des années 70, le DDT est donc interdit. Et depuis ces années, plus d’un million de personnes (principalement des femmes et des enfants) seront donc morts tous les ans parce que, potentiellement, le DDT tend à réduire les coquilles des oeufs. Mais que valent 30.000.000 d’humains face à une (ou plusieurs) espèce de volatiles en péril ?
Le Fluffy a fait son choix : un Coin-Coin vaut mille humains. Attention cependant : ce seront les mille humains qu’on trouvera loin de chez nous, loin du coeur, loin des yeux. Le Fluffy, je vous le rappelle, est sensible.
Las.
La thèse sur les coquilles d’oeufs, c’est du bidon. Pour être précis, je vous reporte à ceci :
Many experiments on caged-birds demonstrate that DDT and its metabolites (DDD and DDE) do not cause serious egg shell thinning, even at levels many hundreds of times greater than wild birds would ever accumulate. in Cecil, HC et al. 1971. Poultry Science 50: 656-659 (No effects of DDT or DDE, if adequate calcium is in diet); Chang, ES & ELR Stokstad. 1975. Poultry Science 54: 3-10 1975. (No effects of DDT on shells); Edwards, JG. 1971. Chem Eng News p. 6 & 59 (August 16, 1971) (Summary of egg shell- thinning and refutations presented revealing all data); Hazeltine, WE. 1974. Statement and affidavit, EPA Hearings on Tussock Moth Control, Portland Oregon, p. 9 (January 14, 1974); Jeffries, DJ. 1969. J Wildlife Management 32: 441-456 (Shells 7 percent thicker after two years on DDT diet); Robson, WA et al. 1976. Poultry Science 55:2222- 2227; Scott, ML et al. 1975. Poultry Science 54: 350-368 (Egg production, hatchability and shell quality depend on calcium, and are not effected by DDT and its metabolites); Spears, G & P. Waibel. 1972. Minn. Science 28(3):4-5; Tucker, RK & HA Haegele. 1970. Bull Environ Contam. Toxicol 5:191-194 (Neither egg weight nor shell thickness affected by 300 parts per million DDT in daily diet);Edwards, JG. 1973. Statement and affidavit, U.S. Senate Committee on Agriculture, 24 pages, October 24, 1973; Poult Sci 1979 Nov;58(6):1432-49 (“There was no correlation between concentrations of pesticides and egg shell thinning)
Et là, le Fluffy Massacreur est démasqué. Et ses mains sont enduites du sang de trente millions de personnes à cause … d’une étude mal boutiquée, d’un a priori faux et d’une idéologie baisiée qui place les petits oiseaux avant les humains.
Et ce sont ces mêmes Fluffys qui viennent vous demander, ensuite, de voter pour eux…
De respecter le protocole de Kyoto.
De ne pas manger d’OGM.
De ne plus utiliser votre voiture.
De décroître.
De vous soumettre.
Ca laisse songeur.
Quelques pages d’intérêt, présentant les différents points de vue :
–DDT FAQ
–Courrier International
–WWF
–Malaria.Org
–Pseudo-Medecines
On notera que les effets environnementaux néfastes du DDT, au mieux difficiles à prouver, ont cependant la vie longue…
Notes
[1] des hommes, pas celle des journalistes capitalo-communistes