Pourquoi et comment la presse papier va disparaître

Je l’ai déjà dit dans d’autres billets : la presse française ne vaut pas tripette, et son avatar papier, mourant, va définitivement disparaître dans la prochaine décennie. Et cette fois-ci, pour étayer un peu plus mes remarques, je vous propose de regarder un intéressant graphique réalisé à partir des données collectées sur LinkedIn.

Ce que ce graphique (visible ci-dessous) montre fort bien, c’est que le changement, donnée de base inhérente à toute société qui vit, s’adapte et évolue, doit absolument être compris et surtout accueilli comme une opportunité et non comme une fatalité.

Il est nécessaire ici de constater l’attitude symptomatique des journalistes (français en particulier) qui n’ont de cesse de réclamer des subventions et des aides toujours plus importantes pour protéger leur secteur des mutations qui le touchent, alors que les données collectées montrent de façon limpide où se situe leur avenir : tout en bas en rouge, on voit que l’industrie des journaux (physiques, sur papier) perd des emplois, alors que parallèlement, l’industrie des médias connectés (sur internet) est en forte croissance (tout en haut, en vert).

LinkedIn : growing and shrinking industriesCliquez pour agrandir

Mais voilà : les journalistes et les patrons de presse papier sont restés, pour la plupart, coincés dans l’idée qu’ils vendaient des journaux, du papier imprimé. En réalité, ils n’ont jamais été que les supports d’information et vendent leur audience. C’est parce qu’ils ont de l’audience qu’on les lit, c’est aussi cette audience qu’ils peuvent monnayer auprès d’annonceurs publicitaires. Et c’est cette audience qui leur permet d’aller au plus près de l’information. C’est la raison pour laquelle faire payer pour de l’information ne leur permettra jamais de rentabiliser leur opération, puisque ce paiement diminuera leur audience.

Comme l’audience est la nécessité vitale de ces entreprises, elles doivent tout faire pour la soigner.

Or, il n’y a que deux façons de soigner son audience : toucher un maximum de personne avec des sujets aussi racoleurs que possible, ou au contraire, choisir le chemin de la qualité, plus difficile, mais bien plus fidélisant (par exemple, Contrepoints a choisi cette voie). La première façon, à l’évidence, réduit rapidement le potentiel d’image de marque (qui veut être associé aux pires ragots ?). Si la démarche peut encore tenir dans un monde où l’information se paye sur papier, dans un monde où elle est gratuite et l’image de marque la seule source de revenu, la course à l’audience par le sujet gras mène à l’impasse. Pendant ce temps, l’autre option, celle de la qualité, permet de bâtir des empires (le luxe en est un exemple flagrant).

Pour le moment, la presse française, baignée de subventions, n’a pas eu à choisir. A mesure que l’argent gratuit viendra à manquer, elle devra adopter une stratégie claire. Et comme ce choix sera fait dans la panique d’un changement non désiré et non planifié, vous pouvez être sûr qu’il ne sera pas le bon.

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Commentaires29

  1. vincent

    Personnellement, Contrepoints est devenu mon premier mag’ d’information (en langue FR). Le reste, je le pêche sur Twitter. Je n’ai plus aucune lecture systématique d’un médium traditionnel.

    1. Before

      Sur Atlantico on peut trouver aussi des points de vue plus libéraux qu’ailleurs, mais pas que.
      Un pont intéressant pour confronter différentes idées, même si la ligne éditoriale générale est plutôt de droite classique.

  2. Shonin

    Pareil.

    Petite tradition chaque matin à 9h = lecture de h16

    le reste, c’est contrepoints.

    1. Calvin

      +1
      C’est effectivement comme cela que je m’informe.

      Par contre, ayant des trajets quotidiens en voiture, j’écoute aussi la radio. Ce qui me permet de savoir ce qui émeut, intéresse ou étonne les autres Français. Et me procure des grands moments navrants !

  3. Satelmarc

    Ca fait bien longtemps que je pense la même chose et l’on voit bien que certains journaux ont su évoluer vers l’internet, mais d’autres se contentent de survivre avec les subventions qu’ils perçoivent. (c’est tellement plus facile)
    Des subventions à fonds perdus, puisque l’on sait d’avance l’issue de ces journaux qui n’ont pas su prendre le virage au bon moment sont à présent condamnés.
    Qui de nos jours aurait les moyens de s’acheter 2 ou 3 quotidiens par jour, alors que par leurs sites ou des réseaux comme twitter, on peut se tenir informé en permanence sans payer ?
    Alors les plus fautifs, comme toujours ce sont ceux qui distribuent notre argent, n’importe comment, sans se soucier du retour sur investissement, pour soutenir pendant des années, des causes perdues et augmenter notre déficit colossal de 1720 milliards – – –
    Tiens j’aimerai connaitre le total des subventions versées à la SNCF rien que sur les 30 dernières années – – – et aussi, parallèlement celles qui ont alimenté le fret ferroviaire pour le résultat que l’on connais.

  4. Calvin

    Deux remarques :
    – l’idée de se servir d’outils modernes pour faire de la prospective est effectivement intéressant. Google, LinkedIn et autres apportent des données globales pertinentes (et portant anonymes).
    – jamais le slogan de campagne de F. Hollande n’avait été aussi pertinent. Le changement, c’est vraiment maintenant ! Par contre, le candidat qui le porte est à l’opposé du mouvement. En fait de changement, il propose de revenir 5 ans en arrière en matière de gouvernance, de charge fiscale, d’acquis sociaux, etc.
    Pour 2012, vous avez le choix : l’immobilisme bondissant et excité (candidat sortant) ou le changement vers le passé (les autres candidats).
    Le futur, lui, est absent du débat.

    1. Deres

      5 ans en arrière, tu es gentil. Son maître et idole, c’est Mitterrand, et donc il voudrait bien revenir 30 ans en arrière si cela était possible … Son programme est très similaire même si les termes ont été modernisés. Par exemple, la relocalisation est l’équivalent direct de la volonté d’indépendance industrielle du pays . Au lieu de nationaliser les banques, il veut créer une banque publique. Au lieu de nationaliser l’industrie, il veut en acheter des parts via un fonds souverain. Tout cela se ressemble beaucoup …

      Personnellement, je suis à nouveau surpris par Sarkozy. Il a discrètement ajouté à son programme la diminution de la dépense publique, la suppression des normes et réglementations inutiles, le contrôle des dépenses des collectivités et le passage par référendum pour court-circuiter les syndicats et les corporatismes. Ce n’est que de la publicité mensongère comme les réformes promises en 2007 mais cela montre au moins que même si il ne le fait pas, il sait ce qu’il faudrait faire … Il faut bien un peu d’espoir dans la vie …

      1. Calvin

        Point 1 : tu as raison, il voudrait revenir encore plus en arrière, mais, officiellement, il prône déjà le retour à une situation d’avant 2007, plus ses « propositions géniales à lui ». De toute façon, il ne pourra pas aller jusque là…

        Point 2 : je me demande si Sarkoko n’est pas en train de se préparer une traversée du désert à la De Gaulle (toutes proportions gardées !!), en ce sens qu’une fois éjecté, Hollande devrait être aux commandes lors de la ruine du pays. A ce moment, son prédécesseur pourra revenir sur le devant, avec ses « visions » sur ce qu’il fallait faire (enfin, à minima, parce que c’est assez timide), et avec sa stature de « j’ai déjà été président ».
        En général, quand il y a la tourmente, la majorité préfère se raccrocher à un vieux de la vieille qu’à un parfait inconnu…

        1. Deres

          Je ne pense pas que Sarkozy voit plus loin que l’élection actuelle … Faut pas rêver … En cas de défaite, il s’inventera une stratégie visionnaire à posteriori seulement il ne se fait pas éjecter par les jeunes loups. Sinon, son éjection sera camouflée par ses propos sur son retour au privé.

    2. Hefjee

      « Pour 2012, vous avez le choix : l’immobilisme bondissant et excité (candidat sortant) ou le changement vers le passé (les autres candidats).
      Le futur, lui, est absent du débat. »

      Très bon.

  5. Sanksion

    Lecture de h16 le matin, zerohedge le reste de la journée. Quelques flux RSS pour lire les grandes lignes. Et désolé, je suis un infidèle de Contrepoints, je n’y vais plus. Mais c’est un très bon site.

  6. Monsieur Z

    Vite vite, une loi Hadopresse. Il est honteux de creuser les inégalités sociales par la discrimination numérique que subissent tous les gens qui n’ont pas Internet. Diffuser l’information sur papier est une mission d’intérêt général.

    J’ai bon ?

    Sinon, les embauches dans le numérique, ce sont des gens affiliés au syndicat du livre CGT ?

    Je demande juste.

  7. Pandora

    Vous ne parlez pas de la niche fiscale dont bénéficient les journalistes, instaurée pour « préserver leur indépendance » (on croit rêver!) et qu’aucun homme politique n’a voulu supprimer.
    On comprend que le « statut » de journaliste intéresse autant de monde (et pas forcément les meilleurs…)

  8. Lib

    LinkedIn peut effectivement être utilisé pour mesurer l’attractivité des différents secteurs.

    Plus fin, ça donne un early warning sur la tendance entreprise par entreprise. J’avais lu il y a quelques temps que Yahoo était en train de crever parce que tous les gens compétents se barraient…

  9. Joe

    Il me semble important de préciser que cela concerne principalement la presse d’information. La presse professionnelle se porte bien, vend ses informations de qualité souvent très cher et a su prendre d’une part le virage d’internet mais aussi chercher des relais de croissance dans les nouvelles technologies : recherche plein texte dans les archives, organisation de web conférence, goodies « utiles », …

    Et etrangement, ces groupes de presse gagne très bien leur vie et font des magnifiques LBO qui ne plantent pas. Il faut néanmoins reconnaitre qu’ils ne sont pas dirigés par des gauchistes ou autres étatistes.

      1. Deres

        La presse d’information est en fait une presse spécialisée dans la politique. Seul les sujets politiques correspondent à des choix éditoriaux et contiennent des analyses journalistiques. Dans les autres domaines, la presse d’information ne fait que relayer les articles des autres, généralement des agences de presse ou de la presse spécialisé sans plus de réflexion. Je lis les nouvelles scientifiques avec au moins une semaine d’avance sur des sites internet. Pour les articles sociétaux en particulier en ce qui concerne le high-tech, le International Herald Tribune a facile un bon mois d’avance …

        Par contre, les sujets sans rapport sont souvent analysés avec le jour politique correspondant au parti-pris du journal. En ce moment, c’est assez caricatural avec le Figaro et surtout le Monde. Le marquage du Figaro à droite est bien connu même si souvent exagéré. Par contre, le Monde a fait ces derniers temps un outing complet en virant sa cuti. Fini de faire semblant d’être au centre, c’est devenu le journal officiel du PS en campagne. Que des articles pro-Hollande et anti-Sarkozy ou action du gouvernement. Pas un jour sans un compte-rendu détaillé de tous les déplacements et meeting de Hollande. Pas une semaine sans un article sur le travail de démarchage et l’abnégation des militants du PS (les jeunes, puis les vieux, puis les geeks, …).

  10. MarcusVinicius

    J’aime bien Valeurs Actuelles, conservateur sans excès sur les moeurs, plutôt libéral sans dogmatisme sur l’économie.
    Comme il a souvent été dit, c’est plus la presse quotidienne qui est menacée, moins les hebdomadaires, qui fournissent des articles plus approfondis.

    Il n’y a rien de choquant sur le fait que le Monde chouchoute Hollande, cela va dans le sens de sa ligne éditoriale clairement marquée à gauche. L’inverse est vrai dans d’autres journaux. Ce qui est choquant c’est le pourcentage de médias marqués à gauche dans ce pays. Là il y a une vraie anomalie par rapport à d’autres pays développés.

  11. Flo

    HS.
    Et on voudrait plus d’Etat (et « de moyens » mais est-il encore utile de le répéter?) pour améliorer l’égalité (« l’âme de la France » comme dit Mr Hollande):

    http://www.lemonde.fr/ecole-primaire-et-secondaire/article/2012/04/12/ecole-les-moyens-attribues-renforcent-les-inegalites_1684433_1473688.html

    Une preuve de plus que ceux qui tiennent le système, grands pourfendeurs de l’individualisme, sous couvert de générosité solidaire et de toutes les bonnes paroles socialoïdes, le manipulent, le triturent et le dévoient à leur avantage exclusif.
    Ni nouveau, ni surprenant.

    1. Deres

      Cet article est surement de mauvaise foi … Comme le souligne un des commentaires, le système de placement des enseignants âprement défendu par les syndicats fait que ce sont uniquement de jeunes enseignants mal rémunérés qui se retrouvent dans les zones défavorisés alors que les plus anciens avec de meilleures salaires choisissent leur affectation. Cela impacte fortement les budgets qui sont principalement constitués de salaires. Ensuite, je ne sais pas si ils tiennent compte des classes prépas pour les lycées car cela explose aussi les budgets avec des enseignants de qualité et les heures de colles.

  12. Flo

    De mauvaise fois je ne sais pas, venant du Monde c’est probable.
    Il reste amusant de constater qu’un journal demandant sans cesse plus d’ETAT pour plus d’égalité révèle les futures conclusions d’un rapport d’un organisme étatique dirigé par un socialste qui sgnale précisément que l’action de l’ETAT « renforce les inégalités.
    Pour les classes prépas, font-elles partie de l’enseignement secondaire ou de l’enseignement supérieur?

  13. channy

    H16 vous aviez fait un billet l’an passé en ajoutant que la presse régionale même archi gavée de subventions se portait mieux
    Voyez vous la même évolution entre la presse nationale et la presse régionale plus collée a l actu régionale? même si c est pour parler de l atelier poterie de saint rat mort la zone ou du dernier match de l AS maraicher.
    Les lecteurs de la presse régionale ne recherchent pas le même type ou qualité d infos; d ailleurs est l’edito est souvent le seul vrai article de fond de ces journaux.

    1. La presse régionale va, elle aussi, perdre de son pouvoir rapidement. Elle fonctionne encore car elle apporte un plus que la presse nationale ne peut pas apporter : la proximité. Comme il y a une grande quantité de personnes qui sont encore attachées au papier, cela permet de valoriser un peu leur audience, mais c’est appeler à disparaître avec l’avènement des générations qui se passent de plus en plus de support physique…

  14. johnny_rotten

    Non la presse nationale et regionale papier en France n’est pas du tout appelée à disparaitre. Idem pour les pays étrangers
    1)Elle réalise encore un gros chiffre d’affaire ….malgré la presse gratuite.
    2) la presse internet va continuer son essor mais sur le modèle de Médiapart (donc payante et sur abonnement)

    3)Car acheter un journal fait partie d’un standing pour les classes moyennes.La presse gratute n’est lue que par une classe populaire qui n’a pas les moyens d’abonnement à un journal.

    4)La presse papier est faite par des professionnels très bien payés et pour y travailler les places sont tres limitées.
    Donc beaucoup d’apprentis journalistes fantasment sur la posssibilité de faire leur propre journal web en bricolant avec des logiciels de mise en page ; mais ils resteront de simples amateurs sans aucun espoir de generer du chiffre d’affaire.

    1. 1) elle est sursubventionnée. Le CA ne veut rien dire. Le bénéfice net après impôts est bien plus significatif.
      2) il y aura une presse payante, mais il y aura majoritairement une presse vendant son audience. C’est déjà le cas, et c’est une évidence à long terme : les gens ne sont pas prêts à payer pour qq chose qu’ils peuvent avoir gratuitement.
      3) la bonne blague. Vous n’avez pas lu mes précédents articles sur le lectorat (qui se casse la figure depuis les années 70).
      4) la presse papier est faite par des rigolos qui ne savent ni lire ni écrire. La presse mensuelle et spécialisée, là, oui, on peut parler. Pour ce qui est des salaires, ils sont élevés pour quelques danseuses à la Joffrin ou Apathie et autres, mais minable pour le reste (la grande masse des pigistes). Pour votre gouverne, il y a déjà des journaux en ligne pure player qui génèrent du CA (et je n’évoque même pas HuffPo, ce serait indécent).

      Bref : votre analyse pêche par un décalage de 20 ans dans le passé.

    2. Web et SEO

      1) et pour combien de temps encore ?
      2) faux
      3) et pour combien de temps encore ? la crise, la vraie, se pointe à l’horizon et vu comment la bce imprime elle touchera surtout les classes moyennes
      4) absolument faux, de nombreux amateurs gagnent plus qu’un journaliste pro.

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