Anonymat : le sénateur qui voulait des noms

Cela fait quelques jours que les médias et la blogosphère bruissent de ce petit vent de panique que seule une proposition de loi encadrant l’internet est capable de provoquer. Cette fois-ci, dans le rôle du nouveau shérif débarqué dans la petite ville de Blogotown, j’ai nommé JL Masson. Jay-Hell, pour les intimes…

Jay-Hell, il a des principes. L’un d’eux est que toute information ou bribe d’information, émise par un quidam, doit pouvoir être identifiée. Autrement dit, les blogueurs, les commentateurs et les anonymes du net, s’ils émettent un avis, s’ils usent de leur « liberté d’expression », doivent être identifiables facilement.

Et pour arriver à cette fin, il propose d’appliquer le régime des professionnels de l’information aux non-professionnels ; pour cela, il veut modifier la LCEN en supprimant la possibilité pour les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication au public en ligne de s’abriter derrière l’hébergeur pour préserver leur anonymat.

En gros, comme l’explique Authueil, chaque site, chaque blog devrait alors faire figurer une mention expliquant qu’en cas de demande, les informations d’identifications formelles de l’auteur seraient fournies. Pouf. Comme ça, sur simple demande.

C’est enquiquinant, cette histoire de la liberté d’expression. On en a déjà parlé sur ce blog, on en a déjà parlé ailleurs, on en parle régulièrement un peu partout notamment lorsqu’il s’agit de dénoncer les dérives fachisssses du pouvoir néo-libéral de Sarkozy et sa main-mise sur le système.

Certes, c’est souvent exagéré ou un peu à côté de la plaque, mais de temps en temps, ça tombe parfaitement juste et on devrait en parler pas mal – comme ici, par exemple –  à l’occasion de cette ridicule proposition de loi, parce qu’il est particulièrement pénible d’entendre toujours les mêmes arguments foireux pour justifier une nouvelle fois un rognage en bonne et due forme des libertés de base au profit d’un état policier de plus en plus envahissant.

La question qu’on peut se poser est de savoir dans quelle mesure notre aimable sénateur n’est pas complètement à côté de la plaque pour des raisons qui ne sont pas, en réalité, présentées dans la loi.

On écarte la probabilité – non nulle mais faible – qu’il vienne d’un autre monde, par exemple de la petite planète Kravatoribl dans le système Mytaylorispoor, et qu’arrivé sur Terre, il se fasse passer pour un politicien chevronné. Non. Cette hypothèse n’est pas crédible. Il a juste des goûts de chiottes et un amour manifeste de l’agression visuelle.

Jay-Hell, de la planète Kravatoribl

L’autre probabilité, plus sérieuse, est qu’en réalité, il aime bien qu’on parle de lui. Non-inscrit, il doit en effet avoir quelques problèmes, sans le soutien d’un parti officiel et puissant, pour attirer les caméras à lui. Une proposition de loi à la fois couillue et ridicule permettra d’attirer les bonnes grâces journalistiques.

Et ce sera coup-double si, en plus, cette loi permet, de façon détournée, d’envoyer le message « Protégeons les journalistes » : imposer l’absence d’anonymat et les mêmes règles pour les blogueurs privés et non-professionnels qu’aux professionnels, c’est, très clairement, favoriser ceux qui sont installés « officiellement » au détriment de ceux qui, derrière, poussent les premiers dans leurs retranchements en les obligeant, par exemple, à se relire, à vérifier leurs informations, et à justifier clairement le versement des subventions publiques. En d’autres termes, le blogueur « gratuit et non-professionnel » pousse le payant, subventionné et professionnel à offrir une vraie valeur ajoutée.

On comprend que ce surcroît de travail enquiquine, agace, fatigue et irrite. Notamment les mauvais, bien sûr (non non, je ne vais pas parler de Huet et Foucard, je ne veux pas stigmatiser).

En outre, une source indépendante, non subventionnée, non-professionnelle, c’est peut-être une source toute pourrie, qui ne vaut rien, mais c’est aussi peut-être une source d’autant plus fiable qu’elle est anonyme. Mieux : cela oblige le lecteur à un travail de recoupement, de vérification, en plus de celui qui aura été mené pour lui présenter des informations.

En somme, les sources alternatives, non professionnelles et anonymes, c’est la fin du gobage passif de purée informative prédigérée et estampillée Approuvée Par Le Gouvernement, Mainstream Media Endorsed, ou Bien-Pensance Incluse En Kit.

On comprend que les politiciens et les journalistes confortablement installés dans le ronron de leurs habitudes soient de plus en plus nerveux. Et on comprend dès lors pourquoi la proposition de loi de l’hurluberlu n’a pas attendu pour avoir droit à son rapporteur (une certaine Bruguière), alors que d’habitude, ceci peut traîner en longueur ou ne jamais aboutir.

Accessoirement, on peut aussi noter que l’anonymat est indispensable à beaucoup de ceux qui bloguent actuellement. Combien de textes ne seraient jamais produits s’ils ne l’étaient pas sous le sceau de l’incognito ? On retrouve quelques arguments à ce sujet dans le billet de Birenbaum, mais de façon générale, l’anonymat est indispensable dans une société de libre-expression, de la même façon qu’un vote doit être secret. Il ne peut y avoir de libre parole s’il peut y avoir des pressions sur celui qui s’exprime. Et le meilleur moyen d’exercer une pression est, tout de même, de connaître clairement la personne.

De la même façon qu’un état qui vire dangereusement totalitaire passe généralement par la case « Interdiction Totale des Armes » pour les citoyens – le citoyen libre et armé constitue, en réalité, le principal ennemi de l’état totalitaire – la case « Suppression de l’Anonymat » ne vient pas très loin avant l’étape « Suppression de la libre-expression ».

Je vous laisse en tirer la conclusion de votre choix.

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(Et pour la petite histoire, n’étant pas résident français, je me fiche de l’impact de la proposition de loi en question)

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Commentaires39

  1. daredevil2009

    Quand on est aux abois, on est prêt à toutes les turpitudes pour se maintenir au pouvoir… mais après tout, cette proposition de loi n’est-elle pas la suite logique de la lopsi et de l’hadopi?

    1. hb45

      Je me souviens que tout jeune élève d’une école qui conduisait tout droit vers ce qu’on appelle aujourd’hui l’opérateur historique et qui se nommait alors les PTT, on expliquait que les télégrammes pouvaient être rédigés dans n’importe quelle langue ou code à la condition que la langue soit connue et le code « déposé »! Sinon on les refusait et comme personne d’autre ne pouvait accéder aux tuyaux, on était tranquiles. On comprend que cette atmosphère qui a imprégné des générations de fonctionnaires monopolistes laisse encore des traces.

  2. ValLeNain

    D’un côté on ne peut pas leur en vouloir de contrôler le web, de l’autre on peut se demander si le contrôle qu’ils veulent mettre en place ce n’est pas plutôt un étiquetage massif de tous ceux qui pourraient être amenés à leur nuire, l’adresse IP étant suffisante pour retrouver un blogueur si ses propos sont « illégaux »

    1. Serge Cheminade

      L’anonymat n’existe pas actuellement pour la justice française voir :
      http://www.maitre-eolas.fr/post/2008/03/24/905-blogueurs-et-responsabilite-reloaded
      http://www.maitre-eolas.fr/post/2008/03/25/909-que-faire-quand-on-recoit-un-courrier-d-avocat

      Nous pouvons y lire :

      « D’où ma censure (j’assume le terme) de certains commentaires que j’estime diffamatoires, malgré les cris d’orfraie de leur auteur. Si le commentaire est diffamatoire, c’est moi qui encours les poursuites, et je n’ai pas vocation à servir de paratonnerre judiciaire à qui que ce soit. »

      A partir du moment où on oblige les blogueurs à censurer à cause d’un risque juridique, n’a-t-on pas déjà mis en place une censure légale en France?

      1. Pour le cas de censure d’un commentaire, oui et non. Disons que si la loi oblige à censurer un commentaire que l’auteur aurait approuvé, admettons. Mais n’oublions pas que le blog est une propriété privée (pour ma part, je possède le nom de domaine et paye l’hébergement). Le propriétaire peut aussi choisir de ne pas laisser tel ou tel commentaire, parce que bon, tout simplement, il n’en veut pas… Là, ce n’est plus de la censure.

      2. ValLeNain

        « A partir du moment où on oblige les blogueurs à censurer à cause d’un risque juridique »
        oui mais dans ce cas, ça veut dire qu’aucun propos ne peut être sous le coup de la loi ? la loi est une censure, mais acceptée, elle forme les limites de la censure « injuste ». Sinon on laisse tout le monde dire tout et n’importe quoi au nom de cette fameuse liberté d’expression, que faites-vous du proverbe « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » ?

        1. Rocou

          « Sinon on laisse tout le monde dire tout et n’importe quoi au nom de cette fameuse liberté d’expression, que faites-vous du proverbe « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » ? »

          J’ai du mal à voir le problème. La liberté d’autrui s’arrête devant ma propriété et vice versa. Par conséquent, je peux déblatérer autant que je veux sur MON blog mais je n’ai pas le droit d’aller laisser mes crottes sur VOTRE blog.
          Voilà comment doit s’entendre la fameuse maxime que vous citez.

    2. on ne peut pas leur en vouloir de contrôler le web

      Ah mais si ! Pourquoi vouloir contrôler le web ? La société part en sucette depuis qu’il existe ?

      1. ValLeNain

        parce que contrôler le web, ça veut pas dire mettre des chaines au web, ça veut dire faire attention à ce qu’il n’y ait pas d’hurluberlus déjantés qui fassent n’importe quoi, tout comme on fait attention à ce qu’il n’y ait pas d’hurluberlus déjantés qui conduisent avec les pieds en marche arrière… Si les hommes savaient se tenir, ça se saurait !

        1. Jesrad

          « Si les hommes savaient se tenir, ça se saurait ! »

          Le seul petit problème, cher ami, c’est que ce sont ceux qui savent le moins se tenir qui s’autoproclament gardiens et juges des autres. Les hurluberlus déjantés sont à l’Assemblée et l’Elysée.

        2. Essepe

          Tu veux que ça soit les gourvernements qui t’assurent la sécurité sur le net … alors que les fonctionnaires ont des années lumières de retard sur le net … et alors que déjà l’état ne sait pas assurer la sécurité des personnes et des biens.

          Si tu veux assurer ta sécurité sur le web compte sur des boites compétentes comme Google ou autre, mais surtout pas sur l’Etat.

        3. ValLeNain

          Les gouvernements ou des entreprises privées si vous voulez, qu’importe…
          et permet moi de penser, Jesrad, que les hurluberlus ne sont pas qu’à l’Élysée et à l’Assemblée…

        4. Et tu as un exemple concret de « faire n’importe quoi sur le web » qui est empêché par une loi spécifique internet ?

        5. Rocou

          « Si les hommes savaient se tenir, ça se saurait ! »

          Ha. Donc il faut laisser aux hommes le soin de contrôler des hommes. N’est-ce pas le serpent qui se mord la queue?

        6. ValLeNain

          loi anti-spam c’est un bon exemple non ?

          « il faut laisser aux hommes le soin de contrôler des hommes »
          exactement, il faut laisser des personnes à qui l’on a attribué cette tâche exercé leur pouvoir, n’est-ce-pas le concept même de la société ?

    3. daredevil2009

      Qu’est-ce que ça veut dire « propos illégaux »? Et que faites-vous de la liberté d’expression? Vous devriez voir ou revoir le film « la vie des autres » (à titre d’exemple), cela vous permettrait peut-être de comprendre là où le bât blesse…

      1. ValLeNain

        la liberté d’expression c’est une liberté comme les autres non ? comme je le disais au-dessus, elle s’arrête là où commence celle des autres. Alors c’est vrai qu’insulter quelqu’un ne l’empêche pas de répondre mais liberté d’expression ne veut pas dire « je suis au dessus de la loi quand je parle »…
        Je vais essayer de voir la vie des autres si vous voulez 😀

        1. daredevil2009

          Justement, c’est exactement pour cette raison que je suis contre toute forme de censure, parce que cela s’avère toujours être un moyen de réduire toute forme de contestation!(cf. le décret de Berlusconi sur les télévisions du web, il y a peu!)
          Mais la question n’est pas d’être au dessus ou en dessous des lois, sachant que celles-ci ont été conçues par des hommes qui défendaient le plus souvent leurs intérêts particuliers (ou ceux des groupes de pression qu’ils représentaient) : à ce propos, je suis en train de lire le texte de Bastiat sur cette question. J’en recommande d’ailleurs la lecture tout à fait édifiante!

        2. Jesrad

          « comme je le disais au-dessus, elle s’arrête là où commence celle des autres.  »

          Ce qui signifie très exactement que chacun est totalement libre de s’exprimer par ses propres moyens, et que la ligne se situe là où certains imbéciles voudraient soit empêcher quelqu’un d’utiliser son propre papier, son propre blog ou quelque autre moyen d’expression de la manière qu’il souhaite, ou utiliser les moyens des autres contre leur avis. Cette loi tombe dans le premier cas de violation de cette liberté.

  3. Serge Cheminade

    Si la loi passe ne pourront plus bloguer
    -les professionnels interdits de publicité personnelle. Tel est le cas de maître Eolas dont le blog a un nombreux lectorat. (Les avocats peuvent faire de la publicité mais pas de publicité personnelle.)
    -de nombreux fonctionnaires. Ils ont un devoir de réserve. Critiquer leur employeur pourrait donc leur être reproché.
    -un grand nombre d’employés. Si leurs propos déplait à leur employeur il pourra les virer en évoquant bien sûr, parfois (souvent?) d’autres motifs. Si ces employés sont au chômage, la qualité de leurs écrits et leurs propos pourront leur faire perdre des emplois potentiels. Il est vrai que la qualité de blog peut aussi aider à trouver un emploi mais dans ce cas là le candidat à intérêt à le signaler sur son CV.

    Finalement pour moi qui suis un professionnel indépendant vivant de la publicité sur Internet grâce à mes écrits cela ferait beaucoup de concurrence en moins. Donc économiquement une telle loi serait excellente. Elle serait également excellente pour les journalistes. Cependant j’ai une vision libérale de la société et c’est là que l’on voit que libéralisme ne va pas avec le développement d’une société qui se fait aux dépends des droits humains (droits de l’homme pour ceux qui négligent les femmes) . Par contre une vision de droite s’en accommode très bien

    Pour moi un tel projet de loi, bien qu’il me soit financièrement très favorable, n’est pas acceptable car il limite fortement la liberté d’expression. Pour ma part je pense que dans le domaine de l’information c’est comme au foot, pour mériter le titre de professionnel il faut pouvoir en vivre. Cela signifie que des amateurs peuvent être meilleurs que des professionnels mais ne souhaitent pas vivre de ce talent et préfèrent trouver leurs revenus ailleurs.

    Ce n’est pas à l’Etat de dire que l’on est un professionnel ou un amateur de l’information. Ce n’est pas à l’Etat de décider que le professionnel mérite subventions et que l’amateur fait concurrence déloyale au professionnel. Pour s’imposer comme professionnels reconnus par l’Etat certains journalistes n’hésitent pas à désinformer, défendre les subventions, défendre les lois liberticides, défendre l’Etat, mener des expériences avec l’argent des contribuables pour montrer qu’ils ont indispensables. Je donne des exemples de tout cela à :
    http://www.orvinfait.fr/corinne_lepage_est-elle_liberale_ou_qu_est-ce_que_le_liberalisme.html

  4. Higgins

    Mon cher H16, je plussoie sans vergogne à tes dires. Ma chère et tendre a mis longtemps avant d’admettre que nous ne sommes plus et depuis longtemps, le pays de liberté que nous prétendons être. Il est vrai que la liberté a un coût (ça, c’est encore la faute des libéraux) et qu’elle demande un minimum de culture pour être exercée pleinement (sur ce plan, je dois dire que les actions des socialos et consorts sont assez contreproductives. Cf les pbs de l’EN). L’enfer est décidément pavé de bonnes intentions.

  5. darius

    Je releve l’élement de l’armement du peuple, je pense que tant qu’on peut encore se procurer une arme, fusse une replique a poudre noire encore en vente libre aux majeurs, il faut le faire.Une des première mesure édictée par le célèbre adoplphe, de sinistre mémoire, a été de desarmer les citoyens allemands, « pour leur bien et leur sécurité », on a vu ce que ca a donné!
    Pensez vous que les habitants d’oradour sur glane se seraint laisser massacrer si les autorité d’occupation n’avait pas préalablement(en 41 je crois) confisqué toutes les armes de chasse?
    Vu les temps troublés vers lesquels nous nous dirigeons au pas de course, il est temps de prendre ses précautions, la mesure idéale etant evidement de quitter le pays.

      1. Mr T

        «L’Etat seul détient le monopole de la violence légitime»

        – seul (redondant), – légitime, ça passe mieux.

        J’aime déjà le ton donné d’entrée de jeu 😀

      2. darius

        C’est pas encore passé,(je pense que c’est encore trop tot heureusement les gens on encore quelques neurones malgres le battage de certaine chaines tnt qui mettent en boucle un reportage sur les collectionneurs, ou on ne voit vraiment pas le rapport avec la violence armées qui se fait a l’ak 47 et pas au fusil de chasse ni a la petoire de nos aieux).
        Bref tant qu’on a cette liberté, il faut s’en servir.

      3. Tabs

        C’est certes consternifiant de voir quelles conneries peuvent être débitées par des députés PS, mais bon, l’article date de 1998.

  6. vincent

    @ val le nain :

    « la liberté d’expression c’est une liberté comme les autres non ? comme je le disais au-dessus, elle s’arrête là où commence celle des autres. Alors c’est vrai qu’insulter quelqu’un ne l’empêche pas de répondre mais liberté d’expression ne veut pas dire « je suis au dessus de la loi quand je parle »

    Certes. La liberté d’expression ne retire rien quant à la responsabilité que vous prenez en vous exprimant. Si vous vous livrez à une insulte diffamatoire, vous serez poursuivi. Si vous incitez explicitement à commettre des actes de violence contre des tiers, il y a des chances pour que vous le soyez aussi. Ce sont des applications normales du principe de responsabilité.

    La ou le législateur dérape, c’est quand il commence à criminaliser des propos qui ne portent préjudice direct à personne. Interdit de nier tel événement historique, de critiquer telle religion, d’avoir publiquement certaines opinions… Certes, le législateur commence par le politiquement correct, alors tout le monde se dit : « pourquoi pas » ? mais après ?

    Bref, le « maintien des limites de l’acceptable » doit être assuré par l’application du principe de responsabilité mais rien d’autre.

    Cela pose la question de l’anonymat. Le fait d’être anonyme ne vous exonère en rien de votre responsabilité quant aux conséquences de vos propos, et une enquête ad hoc, en cas de violation des droits des tiers, reste possible pour lever votre anonymat. En revanche, qui est légitime à lever votre anonymat si vos propos violent une loi de bonne conscience genre Taubira, mais ne porte aucun préjudice à aucun tiers ? Certainement pas le gouvernement.

    Affirmer que tous les gens qui bloguent doivent le faire de façon nominative, est clairement une atteinte à la liberté d’expression (et je le dis d’autant plus facilement que je blogue à découvert moi même, à mes risques et périls, jugés très acceptablement faibles, mais chaque cas est particulier). Car parfois, dénoncer certaines pratiques, révéler ce que l’on voit, ou tout simplement tenir des propos « anti politiquement corrects » peut vous valoir de discrètes ou moins discrètes rétorsions.

    Ne serait-ce que si votre employeur affiche haut et fort des opinions d’un bord politique et que vous en affichez d’autres: devez vous risquer de vous facher avec votre patron si vous craignez les réactions de celui ci ? Non, si vous estimez que c’est mieux ainsi.

    De même, si vous avez un maire, disons, « déontologiquement border line » et que, en tant qu’administré, vous voulez dénoncer certaines choses qui vous paraissent bizarre, devez vous le faire « à découvert » ? Non, si c’est votre choix.

    Il y a donc d’excellentes raisons de vouloir rester anonyme et tant que la personne anonyme s’astreint au même respect des lois(*) que la personne identifiée, alors l’anonymat est aussi respectable que l’identification.

    (*) lois actuellement trop contraignantes, on est d’accord

    @ S.cheminade:

    « de nombreux fonctionnaires. Ils ont un devoir de réserve. Critiquer leur employeur pourrait donc leur être reproché. »

    Certes, toutefois il ne faut pas croire que les fonctionnaires soient totalement baillonés. Leur devoir de réserve ne s’applique que spécifiquement à la structure qui les emploie, et à condition de révéler des éléments précis ou de s’en prendre à l’image de la structure. Par exemple, un fonctionnaire de paul employ qui s’amuserait à révéler les turpitudes internes de son administration ou à lancer un détournement des campagnes de pub de son employeur sur Internet aurait intérêt à bien verrouiller son anonymat (en passant par un tiers), alors que critiquer d’une façon générale la philosophie des politiques de l’emploi en France ne lui serait pas reprochable.

    Critiquer la fonction publique en général, le gouvernement en particulier, reste fort heureusement encore possible, même pour les fonctionnaires ! Simplement, il faut éviter les exemples directement en provenance de son employeur. Ce serait parfaitement pareil dans le privé d’ailleurs.

    Pour le reste, on est parfaitement en phase.

    @ H16: vous utilisez quoi pour le morphing photo ?

  7. SaladCheck

    Grâce à cette loi, on va enfin savoir qui est ce M. H16 qui écrit si bien et de manière si drôle sur les tribulations masturbatoires et un poil autistiques qui se déroulent là haut, tout là-haut.

    Ouvrez le parapluie, un fantasme sénatorial s’amoncèle à l’horizon. Le résultat est gluant et rajoute de la viscosité au pétrin bureaucratique. On est plus à cela près, c’est un vrai déluge.

    Blague à part, c’est toujours un plaisir de vous lire. ;]

    1. adnstep

      Après le 3ème secret de Fatima, le mystère de la Résurrection et le blogging-out de Jean Martin, H16 enfin dévoilé !

    2. Stéphane

      Même pas, puisque h16 a fort judicieusement décidé de se mettre hors de portée de l’Etat français pour blogger.

      Ce qui me fait dire que le nombre de cas révélés par ladite loi, dans l’hypothèse improbable où elle passerait la rampe, serait de… Zéro.

      A part une entaille supplémentaire dans le costume bien entamé de la France-pays-de-liberté, la fameuse transparence recherché ne serait même pas au rendez-vous.

  8. adnstep

    En fait, si la loi passe, on ne pourra plus écrire que « Masson est un con » ?

    (Notez les guillemets et le point d’interrogation)

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