Sous le règne précédent, le roi président nous avait laissé une pyramide, une bibliothèque, une gauche en décomposition, quelques cadavres moisis de plus et une poignée de rues à son nom. Le roi président courant ne veut pas être en reste : il nous agonit d’un Institut du Monde Arabe, et, trouvant cela sans doute un peu juste, nous pond une chaîne tout info, internationale, et en Français je vous prie : CFII.
Il était temps : à quelques mois de la fin de son douzennat laconique, il fallait au Président Jacques une marque tangible de son passage, une trace laissée à la postérité et à la méditation des générations futures.
Avec la chaîne internationale d’information en Français, la CFII, il a trouvé une idée lumineuse. Il est vrai qu’avoir un monument à son nom était sans doute un peu trop encombrant compte tenu de la conjoncture assez morose de dettes de l’état, d’un budget pas trop folichon et d’une ambiance somme toute assez médiocre de fin de quinquennat poussif.
Alors parvenir, à grand renfort d’argent public (le nôtre), à créer un médium d’information international, voilà une lubie qui mérite de laisser une trace dans le temps, et, si ce n’est dans le temps, au moins dans les finances.
Parce que cette chaîne va cumuler de nombreux avantages, en plus d’être en Français dans le texte : elle aura pour but, en effet …de porter partout dans le monde les valeurs de la France et sa vision du monde, dixit Jacques. Et pour cela, elle sera dotée, au départ, d’un budget de 70 millions d’euros, entièrement payé par les contribuables, puisque pour Donnedieu de Vabres, il s’agit d’un service public ; tout ceci, bien sûr, est totalement logique puisque, toujours pour le sémillant ministre complice du Jacques, « ses objectifs sont ambitieux, son organisation est réaliste, son financement est assuré et son rôle sera complémentaire de celui rempli par les autres acteurs de l’audiovisuel français ». Evidemment.
Mais le plus beau, c’est bien que 130 journalistes seront de la partie. On ne peut que se réjouir de cette excellente nouvelle : pour une profession qui manque de postes, voilà une occasion rêvée pour officier. Et quand on connaît la probité, le gauchisme la droiture exemplaire des journalistes et leur détachement incomparable du pouvoir en place, on sait pertinemment que cette chaîne pourra, comme le demande Jacques, porter partout dans le monde les valeurs de la France.
Cependant, on peut se poser quelques questions.
En effet, cette chaîne, dont les membres seront des journalistes intègres, travaillant pour le service public donc, sera-t-elle la meilleure placée pour annoncer, à la face du monde ébahit, que la France (et son modèle) sont en faillite ?
Sera-ce de cette chaîne que nous apprendrons que la Sécu n’est plus du tout obligatoire, et qu’il existe donc un moyen simple d’éviter pour chaque affilié, de sombrer dans le gouffre de ses dettes en s’en débarrassant ?
Cette chaîne aura-t-elle le courage de se détacher des poncifs habituels et analyser vraiment les propositions plus ou moins farfelues de Jacques, en les remettant à la place sanitaire qu’elles n’auraient jamais dû quitter ?
CFII, une fois en route, saura-t-elle trouver la force de dénoncer les raisonnements idiots, les petites bassesses et les coups-fourrés de nos élus, au jour le jour, tel un Canard Enchaîné de l’audiovisuel ?
…
Je crais qu’à ces questions, une seule réponse prévale : le non, ce même ‘non’ que la France répète inlassablement devant l’OMC pour renégocier la PAC, ce ‘non’ devant les évidences de la dette, ce ‘non’ complice de toute les lâchetés budgétaires et syndicales…
Les politiciens français, finalement, auront une belle chaîne de propagande internationale (CFPI, quoi), un outil à la mesure de leurs égos, probablement aussi autiste qu’eux : une voix sans écoute et sans analyse, un blabla nasillard en continu, tel le télécran de 1984, chargé de réécrire l’histoire au fur et à mesure qu’elle se passe.
Mais pour (seulement) 70.000.000 d’euros par an, pensez donc, Jacques ne pouvait pas s’en priver !
Le Monde : 130 journalistes pour CFII
Reuters : La CFII sur les rails
> il nous agonit d’un Institut du Monde Arabe
Ne confondez vous pas avec le musée de Arts Premiers ? L’IMA a été inauguré sous le règne précédent.
Lors de ma rédaction, j’avais hésité entre les Arts Premiers et l’Institut en question. Je n’ai évidemment rien contre ni l’un ni l’autre si ce n’est la provenance douteuse des fonds (le vol étatique) et des collections (recel ?)
A l’instar du second et dernier mandat de Bush, cette fin de règne de notre Chi national me fout les jetons.
C’est l’hallali sur les finances, après moi le déluge.