Glandeurs et nanodanse

Il y a quarante ans, la France, à défaut de posséder du pétrole ou des idées, disposait d’un leader charismatique. Le Grand Charles, dans sa grande clairvoyance, se rendit compte du dénuement du pays et décida qu’il fallait intervenir : une pléthore de programmes furent lancés, et il vit que cela était bon… De nos jours, nous n’avons plus de leader, pas plus d’idées ou de pétrole, mais, régulièrement, des petits tâcherons poussifs tentent de lancer, de-ci de-là, des « grands » projets scientifiques, histoire de favoriser étatiquement tel ou tel domaine de recherche avec un succès … discutable.

Le domaine à la mode, actuellement, c’est les Nanotechnologies. Moyennant quoi, la France se lance à corps perdu dans les nanotechs, à grand frais, et en utilisant les pompes à phynances publiques. Dernièrement, c’est le Minatec qui a été créé, avec force petits-fours, flonflons, revues de presse et battage médiatique.

Cette inauguration du pôle de recherche sur les nanotechnologies se situe dans la ligne des créations des pôles de compétitivités que le Grand Jacques, dans sa grande lucidité (et toujours avec petits-fours, flonflons, revues de presse et battage médiatique), avait lancé il y a quelques mois pour remettre la France sur les rails de l’innovation.


(On se remémorera d’ailleurs son apparition, avec une belle tête de vainqueur et tout vêtu de plastique, dans les locaux d’Alcatel)

Parallèlement à tout cet argent investi (plus de 190 millions d’euros, tout de même et sans parler des petits-fours, flonflons, revues de presse et battage médiatique), l’Europe – disons, la Commission Européenne – distribue des subventions à qui en demandera pour les projets innovants dans ces domaines là, précisemment.

Tout ceci brosse un portrait particulièrement juteux (surtout financièrement) de la situation : subventions d’un côté, aides étatiques de l’autre, des pôles de compétitivité, nouveaux locaux, inaugurations citoyennes et festives avec, on ne le dira jamais assez, force petits-fours, flonflons, revues de presse et battage médiatique … Bref, un environnement douillet et économiquement grassouillet, un terreau fertile, permettant à n’importe quelle société jeune, dynamique et fashion de pousser et sépanouir.

Las, que nenni : mes petits yeux cyniques se sont portés récemment sur un article de La Tribune (du 6 Juin 2006), relatant les misères d’une start-up du domaine. Et, à la lecture de l’article, il est troublant de constater la grande banalité des problèmes rencontrés, depuis la levée de fonds, l’obtention des subvention jusqu’au dépôt de bilan.

Ainsi, la société Inanov, qui proposait pourtant de fabriquer de très grands écrans plats, tactiles et souples, à base de nanotubes de carbone, aura subit les affres des tracasseries administratives nationales et européennes, pour finir par déposer le bilan en mars de cette année.

Et là, je laisserai le dirigeant, J.C. Favreau, persifler : « J’ai le furieux sentiment d’avoir été floué par les annonces officielles sur l’aides à l’innovation. Inanov n’aurait-elle servi qu’à justifier des aides publiques à de grands laboratoires publics ? ». Selon lui, la méfiance des institutions publiques à l’égard des start-ups n’a d’égal que leur compulsion à filer des tombereaux de l’argent du contribuable … aux plus grandes entreprises.
« Cette sorte de machisme technocratique explique pourquoi il est si difficile d’innover en France : une start-up ne peut lever des fonds privés que lorsqu’elle dispose d’un proto, et elle ne peut lever des fonds publics pour réaliser le proto que si elle dispose d’un montant équivalent en fonds propres. »

Oh, M. Favreau, qu’allez-vous imaginer-là ?! Que l’état favoriserait exclusivement ses ouailles, son secteur de recherche, qui ne produit finalement pas grande innovation, mais engouffre toujours plus de subventions ? Rooooh, coquin !

Bah oui, que voulez-vous ! En France, ou bien vous êtes un gros laboratoire, dont la glandouille tranquille et journalière n’aura pas permis de décrocher le moindre Nobel ni la moindre innovation réelle depuis des années, mais pour qui pleurnicher pour des fonds publics est une démarche administrative standard qui permet d’obtenir par voie hiérarchique rôdée des fonds rapidement ; ou bien vous êtes une petite société innovante et vous devez disposer de ce que vous demandez pour pouvoir le demander, ce qui est à la fois idiot, paradoxal et typique des usines à gaz kafkaïennes.

De façon quasi-darwinienne et par voie de conséquence, nous aurons en France, nous pouvons le dire maintenant, la recherche privée la plus efficace du monde : les sociétés privées qui innoveraient encore, et qui le feraient sans subventions et en évitant les crocs-en-jambe de l’état seront des champions extraordinaires ! Certes, il n’en restera bientôt plus aucun.

Mais la pépite qui subsistera sera, à n’en pas douter, un leader du monde de demain …

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Commentaires5

  1. pp

    Le système est complètement corrompu. Le grand Charles s’était taillé une constitution à sa mesure, mais la présidence a trop de pouvoir. Il faudrai que le parlement puisse prendre lui-même des initiatives, c’est à dire être un vrai comtre pouvoir (un peu comme aux US). Nos parlementaires devront aussi un peu murir car il ont pris le mauvais pli.

  2. photon

    Mon cher c’est encore bien "mieux" que vous pensez! Tout est artificiel et ne tient en fait qu’à l’existence d’une locomotive extérieure au système merveilleux, (dit de l’exception économique, culturelle, scientifique et technologique…), locomotive que l’on copie avec vingt, trente ou quarante ans de décalage. Le nucléaire vient d’une license westinghouse, le gros machin qui vole est une copie-actualisation de gros porteurs mis en vol en 67 et 79 ; alors les nanotechs et biotechs… Il faut regarder les choses froidement! Sans complaisance! Nos élites ont merdé et ont enfumé les béotiens pris dans les illusion de l’ "exception"… Pays ruiné, décalé, en déclin, qui n’a rien à apporter sauf des mots et des symboles.

    Est dupe qui veut.

    Bravo pour votre blog!

  3. Emma

    Rien d’étonnant à la déconfiture de J.-C. Favreau : il n’avait tout simplement pas compris comment fonctionne le système. Les subventions sont accordées à ceux qui ont les dents les plus acérées et le réseau d’influence le plus étoffé, le plus nocif et qui fréquentent les allées feutrées du pouvoir : ce sont les copains et les coquins de droite ou de gauche bénéficient toujours de la manne de cet Etat vermoulu. Le système est corrompu jusqu’à la moëlle mais qu’est-ce que notre J.-C. Favreau allait faire dans cette galère ? Il eût fallu qu’il s’y prenne autrement, qu’il lève auprès de ses amis, connaissances quelques capitaux pour fabriquer son prototype, éventuellement déposer un brevet qui eût été acheté à n’en pas douter par un étranger finaud et vogue la galère.
    Attendre quelque chose de positif des hommes de l’Etat français est montrer qu’on n’a rien compris à ce système verreux.
    Vive la glandouille des nanotechnologues aux frais de la princesse !

  4. Chroniques patagones

    Remplacer les subventions par une réduction générale de l’impôt des entreprises

    Selon l’Institut Economique de Montréal, plus les subventions gouvernementales directes aux entreprises jouent un rôle important au sein d’une économie, moins la croissance économique est importante. Dans une note économique intitulée…

  5. LePetitPingouin

    Tiens c’est bizarre ca me rappelle l’industrie des jeux videos tout ca.
    La France: leader mondial des grosses illusions.

    ping

  6. ylyad

    Champions

    Champions des impôts et malgré cela, 5ème puissance économique mondiale. En effet, les Français sont extrêmement productifs, les entreprises françaises sont plutôt bien gérées, réussissent un peu partout dans le monde (et pas que les champio…

  7. bol

    "vous êtes un gros laboratoire, dont la glandouille tranquille et journalière n’aura pas permis de décrocher le moindre Nobel ni la moindre innovation réelle depuis des années"

    Cette année un francais issu d’un laboratoire hypertrophié (IFP) a recu le prix nobel de chimie.

    Mon expérience personnelle est qu’en France les fonds privés sont terriblement réticent à investir dans de la r&d, grosso modo une start-up doit commencer à faire du chiffre d’affaire dès la deuxieme année pour espérer attirer des investisseurs. Un projet necessitant plusieurs années de dev avant de commencer à être commercialisé doit obligatoirement être assisté de petits projets annexes vendables à plus court terme pour esperer seduire les investisseurs. C’est un problème très francais mais absolument pas confiné à la sphère gouvernementale. C’est un problème d’aversion au risque et au long terme.

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