L’analyse des problèmes en France permet souvent de désigner l’appareil étatique comme principal sinon seul responsable de la déliquescence que le pays subit depuis au moins les vingt dernières années. On peut ainsi pointer facilement du doigt les principaux problèmes de la société française et noter qu’à chaque fois, l’intervention étatique est très avancée. Cependant, un élément reste souvent hors de l’analyse, alors qu’il est probablement l’un des principaux responsables de cet interventionnisme outrancier.
En effet, si l’on liste les principaux problèmes lancinants depuis des années dans la société française, on y trouve notamment les effets mitigés des politiques pour l’emploi, les légères difficultés chroniques d’une bonne gestion de la Sécurité Sociale, les résultats en demi-teinte de l’Education Nationale, ou encore une petite dérive statistique dans le nombre d’heures de grève dans les transports publics.
Evidemment, ces petits points de détail ne sont pas les seuls. Mais ils constituent une bonne piste pour identifier un élément commun à tous ces problèmes.
On peut tout d’abord noter que pour chacun d’eux, depuis trente ans, une constante a été appliquée avec un soin méticuleux : à chaque fois, on a accru l’activité de l’Etat dans le domaine considéré, on a donné plus de poids à la loi directive et la perte de choix, de liberté.
Ainsi, pour l’emploi, le code du travail notamment aura pris un embompoint très léger, passant de quelques centaines d’articles au début du siècle (le XXe hein 😉 ) à une galaxie de plusieurs milliers actuellement, avec un rythme de croissance digne des plus gros dinausores jurassiques. Au gré de ces changements, le contrat de travail et les conditions légale de l’exercice d’une profession en France sont devenus une forteresse quasi imprenable que, bon an, mal an, trois millions d’assiégeants n’arrivent guère à pénétrer. Et pendant que Dalloz fournit les projectiles compacts, volumineux et terriblement affûtés aux occupants de la cité, les nouveaux arrivants aux pieds des remparts se mêlent aux assiégeants et viennent, en strates successives, renouveller les générations entières qui n’auront plus connu de longues périodes d’emploi stable.
Pour la Sécu, on retrouve le même mécanisme qui aura permis la création d’un moloch mou, gigantesque et jamais repu. Maintenant, l’organisme occupe une place aussi importante qu’un état dans l’état (même budget, nombre de personnes qui y travaillent assez similaire …). A noter toutefois : si la plupart des lois du code du travail furent passées par le parlement, il en va fréquemment autrement pour la sécu, dont l’existence même fut le fait d’une ordonnance de 1945 et non d’une loi. On se demande bien pourquoi…
Du côté de l’Education Nationale, son excellence aura permis de créer au moins deux Frances : l’une, lettrée et cultivée, représentée par les individus capables de lire, d’écrire et de formuler un raisonnement correctement. Ce sont les élites, l’intelligentsia, les privilégiés. De l’autre, la classe laborieuse qu’on aura eu soin de ne pas trop cultiver, fournissant les bras pour la classe des privilégiés. Etres frustres et serviles, bavant légèrement et le dos voûtés, ces êtres mal dégrossis n’auront reçu que les rudiments nécessaires pour se connecter à internet via un téléphone portable et communiquer dans un langage basique, à même de convoyer des expressions simples comme « baiser », « manger » et « dormir ».
Flûte. Je me suis laissé emporter par mon petit côté libéral-mangeur-d’enfants / exploiteur. Oubliez le paragraphe précédent.
L’Education Nationale, voulais-je dire, aura permis d’amener plus de 80% de personnes à l’obtention d’un bout de papier cartonné, en discréditant ceux qui ne voulaient pas l’avoir, et en obligeant ceux qui l’avaient à continuer le plus longtemps possible leurs études, utilisant de façon étonnante ce fameux carton comme cache-misère de statistiques du travail indécentes.
Et puis, pour terminer, je n’évoquerai même pas les petits enquiquinements périodiques dans les transports publics. En effet, ceux-ci ne sont pas liés, comme on pourrait le croire, à une activité particulière ou à des tensions entre les différents acteurs de la chaîne du transport, mais beaucoup plus simplement, à des aspects potagers : la France est en effet la première productrice mondiale de Grève, ce gros fruit rouge qu’on mange blet, et il a deux saisons : à la rentrée de septembre et au milieu de l’hiver vers février/mars. La gréviculture ne souffre pas d’interruption ; ceci explique cela. Circulez (en voiture), y’a rien à voir.
…
A la relecture, ici, un point devrait faire « tilt ». Eh oui, dans chaque cas, on retrouve, impliqué plus ou moins, un élément essentiel : les syndicats.
Pour l’emploi, par exemple, il semble évident que les syndicats auront eu un rôle majeur dans l’accroissement ahurissant du code du travail, dans l’absence totale de toute souplesse du système français, dans la peur panique qui agite tous les gouvernements dès lors qu’il s’agit de tenter une réforme, aussi ridicule, décalée, indolore ou inutile soit-elle. Le baisser de pantalon est devenu, chez les ministres en exercice, un sport olympique pratiqué avec ardeur dès que les syndicats montrent des dents. Certains de ces ministres gagnent du temps en ne prenant même plus la peine de mettre un pantalon.
Pour la Sécu, le syndicalisme n’est même pas partie prenante, c’est la raison d’être du Machin : édifice social entièrement à la gloire des syndicats puisque dirigé par eux et pour eux, il constitue une source de financement, de troupes fraîches, et un vivier inépuisable de bonnes raisons de défiler avec de jolies banderolles youkaïdi youkaïda dès qu’on y touche de près ou de loin. L’équivalent du budget de l’Etat échappe à tout contrôle : il est impossible de savoir combien, précisément, de personnes travaillent pour la SS, de savoir exactement combien d’euros sont mis en entrée, combien d’euros sont mis en sortie, et où vont les dépenses. On n’en est plus réduit qu’à de vague agglomérats gigantesques où l’unité de compte est le million d’euro au minimum. Délirant.
Pour l’Education Nationale, là encore, toute réforme, quelqu’elle soit, sera abandonnée, honnie, oubliée ou tant modifiée qu’inapplicable si elle n’a pas subit l’Imprimatur des syndicats d’enseignants. A l’instar de la Sécu, le syndicalisme est ici vécu comme une entrée dans les ordres : le prof syndiqué, image d’Epinal qui confine presque au caricatural, est un peu plus que le prof de base ; c’est un bon père guidant les brebis, le pasteur de sa communauté enseignante.
Enfin, dans les Transports, et par extension, dans toutes les entreprises nationales, on retrouve, toujours et encore, les syndicats, le doigt sur la gachette, prêts à déclencher une petite récolte de fruits blets dès que les frimas électoraux se font sentir.
…
A ce constat, une question : pourquoi, alors même que le syndicalisme est un principe naturel et nécessaire du libéralisme, en est-on arrivé à cette situation en France ? Pourquoi les syndicats français sont-ils aussi puissants alors qu’aussi peu attirants pour les votants, aussi encroûtés dans leurs certitudes et si peu en phase avec le monde réel, celui d’au-delà de nos frontières ?
A mon sens, tout vient de ce moment fatidique où l’on a décorrellé complètement ces syndicats de ceux qu’ils étaient sensés servir et représenter. A partir de ce moment, le syndicat n’est plus une « union » (comme disent les angliches), mais bien un « syndicate » (une mafia). Ils roulent pour leurs propres intérêts, qui, rapidement, n’ont plus rien à voir avec ceux des salariés. Ces derniers, pour être représentés, ne peuvent que choisir dans un nombre restreint (5) d’organisations, figé par décrêt.
Apparemment, le Conseil Economique et Social, un machin poussiéreux qu’on ressort parfois pour faire peur aux petits enfants, s’est penché sur une remise à plat de cette représentativité.
Quelque chose me dit que tout ceci va tourner en jus de boudin.
Je me trompe peut-être. Mais … Vous reprendrez bien une petite grève ou deux, pour la route ?
Excellente analyse. J’ai toujours pensé que les syndicats avaient été acheté, ni plus ni moins, par les hommes de l’état dès le moment où ils ont été subventionné. Achetés, comme de vulgaires fonctionnaires corrompus, avec notre argent volé de force. Comme s’étonner alors qu’ils ne fassent plus que défendre la machine à fric facile qui les engraisse ?
Je crois aussi qu’il y a des bases philosophiques derrière l’interventionnisme à tout crin de la France. On peut même les résumer en quelques Grands Mensonges Fondamentaux: "Il faut faire le bien par la force", "L’échange librement consenti est un outil d’asservissement", "Toute vérité n’est pas bonne à dire", "Tous les moyens sont bons pour défendre les droits que je crois avoir", "La Loi est le territoire et pas juste la carte du Droit", etc…
Fantastique, on se croirait dans un monde à part.
Un oubli cependant concernant les 3 millions de chômeurs. Il ne faudrait pas oublier les chômeurs déguisés: rmi, emploi de solidarité, les associations qui sont subventionné à 52% par l’Etat.
A mon avis on arrivera à doubler le chiffre de chômeurs.
Salut H16, super post.
les syndicalistes qui sont -par la definition meme du syndicalisme- des etres en constante position de faiblesse theorique finissent par experimenter par eux meme (entre eux, puis entre eux et la societe) la mechancete qui regne dans les societes soumises a la pauvrete et au stress.
La ou surpopulation, malnutrition ou violence endemique sont des stress reels, les stress imposes au sindicaliste-salarie en activite sont devenus theoriques sur bien des territoires ( EN, SS, etc.. ).
on pourrait relativiser a l’envi, il n’empeche:
le plateau de travail sur lequel je me trouve a l’heure actuelle a bien des defauts, il est vrai.
J’ai entendu par le passe recent des critiques sur le patronnat et la facon dont il nous impose cet environnement.
Les vieux briscards comme moi savent bien que cet environnement a ete invente et mis en pratique au courant des annes 90, par des jeunz qui voulaient un environnement de travail different et plus attractif, les patrons n’y ont jamais ete pour rien, sauf pour aider.
les jeunz cretins qui debarquent aujourd’hui dans ces compagnies agreables a vivre se plaignent et disent n’importe quoi, et pouf! vous prendrez bien un petit syndicat?
il existe maintenant des ecoles pour faire ce job qui auparavant etait reserve a une elite, oui je dis bien elite, quel mot employer? certains codent du language machine a 10 ans, d’autres articulent peniblement le sms a 27.
des ecoles, bien sur, ne sortent que des cretins sans griffes, aux faces rondes et aux fesse tendres et pretes a etre devorees par le premier requin qui passera par la.
je vais donc changer de metier avant qu’un syndicat ne vienne se meler de me defendre.
je vais probablement me faire requin, j’aime plus les faces rondes, ils m’ont pique mon job.
🙂
Bof
sans compter les termes employés par cette mafia, tels que "exploités", "spoliés" et autres….ils ne savent pas ce qu’être exploité veut dire, sinon ils n’emploieraient certainement pas ces expressions. les vrais exploités seraient bien contents de l’être de la sorte.
Autre point, autre théorie qui me titille, et sur laquelle je n’ai pas de certitudes : par rapport à tous ces problèmes cités plus haut, ne pouvons nous pas trouver une cause commune qui serait en fait 68 comme point de départ ? c’est bien à ce moment là que les mentalités gauchistes ont explosé au grand jour….